Prédication, Solennité du Christ-Roi C

23 novembre 2025

Un amour qui sauve

En cette joyeuse Solennité du Christ-Roi et ce dernier dimanche de l’année liturgique, le frère Peace Michael A. Mushimiyimana, O.P., nous explique ce que les trois lectures du jour nous apprennent sur la royauté de Jésus et nous invite à nous demander si celui-ci est vraiment le Roi de nos cœurs et de nos vies.

Prédication

Alors que nous achevons l’année liturgique C, l’Église nous invite à contempler le Christ sous un titre à la fois solennel et déroutant : Roi de l’univers. Cette appellation, loin d’être une simple métaphore, nous plonge au cœur du mystère chrétien. Mais de quelle royauté parlons-nous exactement ? Les textes de ce dimanche de Samuel, de Paul aux Colossiens, et de l’évangile selon saint Luc nous offrent une triple lumière pour mieux comprendre cette royauté singulière.

Dans le deuxième livre de Samuel, les tribus d’Israël viennent reconnaître David comme roi, scellant une alliance qui inaugure une dynastie. « Tu seras le berger d’Israël mon peuple, tu seras le chef d’Israël. » Cette scène évoque déjà, la promesse d’un règne qui ne passera pas. Or, cette promesse trouve son accomplissement plénier dans le Christ. En effet, saint Paul affirme que le Christ est « l’image du Dieu invisible, le premier-né de toute créature », celui en qui tout a été créé et par qui tout subsiste. Il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin qu’il ait en toute la primauté. Ainsi, sa royauté dépasse les limites du temps et de l’espace : elle est éternelle, cosmique, vivante.

Cependant, cette royauté ne se manifeste pas selon les critères habituels du pouvoir. L’évangile de Luc nous présente un roi crucifié, moqué, apparemment vaincu. Et pourtant, c’est précisément sur la croix que Jésus révèle la vérité de son règne. Tandis que les chefs se moquent de lui et que les soldats le défient, un condamné, un homme brisé, reconnaît en lui le roi d’un royaume invisible : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. » À cette supplication, Jésus répond par une promesse bouleversante : « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. » Ainsi, la croix devient le trône d’un roi dont le pouvoir s’exerce dans le pardon et la miséricorde.

Par ailleurs, il est essentiel de comprendre que la royauté du Christ implique une relation de dépendance librement consentie. Dans l’Antiquité, le roi était celui dont dépendait la paix, la justice, la prospérité du peuple. Il garantissait les conditions du bonheur. De manière analogue, mais transfigurée, le Christ est pour les croyants la source du sens, des valeurs, des priorités qui orientent l’existence. Vivre sous son règne, c’est recevoir de lui l’Esprit Saint, c’est s’ouvrir aux promesses de la vie divine, c’est marcher à sa suite vers la plénitude de la communion avec Dieu.

Néanmoins, à la différence des rois de ce monde, le Christ ne s’impose pas. Sa royauté ne relève pas d’un régime autoritaire ou héréditaire. Elle est l’objet d’un choix, d’une option personnelle. Comme il le dit à Pilate : « Je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix. » Autrement dit, l’appartenance au Christ repose sur un acte de foi, libre et éclairé. Il ne règne que sur ceux qui acceptent de l’écouter, de le suivre, de s’en remettre à lui. Et ce choix, loin d’être réservé à une élite spirituelle, est accessible à tous, même au dernier instant, comme en témoigne le bon larron.

Pour nous, étudiants et chercheurs de sens, dans un monde où les pouvoirs passent, où les idéologies s’effondrent, où les promesses politiques déçoivent, la royauté du Christ nous invite à une autre espérance. Non pas celle d’un pouvoir qui domine, mais d’un amour qui sauve. Non pas celle d’un règne imposé, mais d’une alliance libre. Non pas celle d’un roi lointain, mais d’un Dieu proche, crucifié et ressuscité.

Alors, en ce dimanche, posons-nous cette question : qui règne véritablement sur ma vie ? À quelle voix est-ce que je prête l’oreille ? Et si, comme le larron, nous osions dire aujourd’hui : « Jésus, souviens-toi de moi », peut-être entendrions-nous cette parole qui transforme tout : « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »

Fr. Peace Michael A. Mushimiyimana, O.P.

 

PRIÈRE

Dieu éternel et tout-puissant,
tu as voulu récapituler toutes choses
en ton Fils bien-aimé, le Roi de l’univers ;
dans ta bonté, fais que, libérée de la servitude,
toute la création serve ta gloire
et chante sans fin ta louange.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.