Prédication, 31ème dimanche du temps ordinaire

2 novembre 2025

Préparer une place

En ce dimanche de la Commémoration des fidèles défunts, le frère André Descôteaux, O.P., nous invite à avoir confiance en Jésus et en le chemin de Vie qu’il a engendrer par la croix, ainsi qu’en son Père qui est tout Amour et tout accueil et qui connaît les besoins des âmes et des cœurs.

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Prédication

Perdre un être cher n’est jamais facile. Évidemment, chacun, chacune vit un deuil selon sa personnalité et selon les circonstances. La mort peut être vécue comme une véritable délivrance tellement les souffrances étaient devenues insupportables, pour la personne décédée. Il peut arriver, que le disparu, à cause d’une maladie dégénérative, n’était plus celui que nous avions connu et aimé depuis des années. Quoi qu’il en soit, une mort reste une mort. Elle constitue un départ et une brisure. Un vide est créé. De plus, la mort de quiconque nous ramène à la nôtre. Ainsi, pouvons-nous être bouleversés, comme Jésus le pressent quand il dit à ses disciples : « que votre cœur ne soit pas bouleversé ».

Replaçons-nous dans le contexte de l’évangile. Jésus vient de laver les pieds de ses disciples en signe de la mort qui l’attend. Il sera traité et condamné comme un esclave. Leurs cœurs sont bouleversés. Ce Jésus qu’ils suivent depuis des années, ce Jésus dont la parole les fascine, ce Jésus qui accomplit des signes merveilleux, ce Jésus qu’ils essaient d’aimer, malgré leurs faiblesses, sera tué. Il sera enseveli. Tout sera fini et sans espoir, eux, qui espéraient en lui ! En outre, que deviendront-ils ? Seront-ils, comme lui, persécutés ? Leur avenir sera complètement chamboulé. Leurs cœurs peuvent bien être bouleversés.

Jésus les comprend. Il les connaît. Sa réponse : croire. Oui, croire en Dieu, au Dieu des vivants, mais aussi, dans le même mouvement, croire en lui. La mort est une réalité contre laquelle nous butons tous et toutes. À vue humaine, il n’y a pas d’issue. Le désarroi qui peut nous affecter ne peut être surmonté que dans la mesure où nous nous en remettons à la seule réalité fiable et toute puissante : Dieu. Et cette foi est inséparable de la foi en Jésus Christ, car Dieu n’a d’autre visage dans ce monde et pour ce monde que celui de Jésus.

Souvent, le passage du Christ par la mort est présenté comme une victoire à laquelle le croyant est associé. Ici, Jésus utilise une image, celle des places pour mieux cerner le sens de son passage. En effet, en mourant, il emprunte un chemin qui le conduit vers la maison du Père. Et là, il y prépare des places pour chacun et chacune. Et il y en aura plusieurs, car il y a de nombreuses demeures, chez son Père.

Quel message d’espérance ! Nous sommes attendus par le Père dans sa maison. En plus, il y a beaucoup de place. La demeure de chacun et de chacune lui est propre respectant son individualité. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Le Christ, vainqueur, reviendra pour nous emmener avec lui « afin que là où il est, nous soyons, nous aussi ».

Nous ne serons pas seuls, isolés comme des statues dans leurs niches, si belles soient-elles. Nous serons en profonde communion avec le Christ, avec le Père et par là les uns avec les autres.

Oui, les disciples de Jésus peuvent croire en lui, car son départ, qui plonge les disciples dans le désarroi, est en fait une bonne nouvelle. Il est l’événement qui ouvre le chemin vers la vie en plénitude. La croix n’est pas la fin d’un chemin, mais constitue, au contraire, un départ ouvrant un nouveau chemin qui, cette fois, n’est plus exposé aux aléas du monde. Voilà pourquoi Jésus répond à Thomas qu’il est le chemin. Ici, il ne s’agit plus du chemin que Jésus doit emprunter, mais du chemin qu’Il est lui-même. Il s’identifie à ce chemin. Et ce chemin, il nous invite à le prendre et à le faire nôtre. Nous ne pouvons trouver le chemin de vie que dans le Christ. C’est en lui que se manifeste la seule réalité qui peut porter notre humanité à son accomplissement, le Dieu d’amour au point d’être la Vérité et la Vie.

Qu’en est-il de notre peine ? De notre désarroi ? Il est clair que croire au Christ n’élimine pas la douleur de la séparation ni ne comble automatiquement le vide créé par la mort. Cependant, croire nous ouvre à l’espérance et nous aide à voir plus loin que notre deuil même si, quelques fois, nous avons le cœur gros et pouvons pleurer abondamment. Uni au Christ, l’être cher disparu connaît ou connaîtra le bonheur et nous pourrons nous retrouver, un jour, tous et toutes ensemble, dans la maison du Père où il y a de nombreuses demeures. Une lumière brille dans notre nuit pour éclairer notre quotidien, notre peine et nous garder dans l’espérance.

En attendant, en cette célébration où nous nous souvenons de nos défunts, il nous est proposé de prier pour eux pour qu’ils soient entièrement comblés de la vie de Dieu même s’il leur faut, selon la tradition catholique, passer par une étape intermédiaire appelée le purgatoire. Personnellement, j’aime dire que c’est ma seule chance d’aller au ciel ! Peut-être ne fais-je pas assez confiance à la miséricorde de Dieu. Et pourtant !

Récemment, j’ai découvert une présentation originale du purgatoire qui m’était inconnue, celle de Maurice Zundel, un prêtre suisse, un très grand spirituel et prédicateur, qui a vécu au XXe siècle. Je vous la partage.

« Le purgatoire n’est autre chose qu’une immense espérance ! Il y a une foule de gens qui n’ont pas été des modèles ! mon Dieu. Ils ont fait ce qu’ils ont pu sans doute, mais ils n’ont pas fait quand même le maximum. Ils auraient peut-être pu faire davantage [J’ajoute il y a aussi tant de mesquinerie dans notre quotidien]. Il y en a même qui n’ont rien su du tout et qui n’ont rien pu faire ! Le Purgatoire c’est comme une grande couveuse où toutes ces âmes qui ne se sont pas encore développées au soleil de l’Amour, pourront éclore et fleurir ».

Une couveuse, ou si vous préférez, un incubateur où le nouveau-né a besoin de chaleur, de médicaments et de nutriments adaptés pour combattre certaines maladies ou encore pour permettre à certains organes de se développer. Certes, notre place nous attend, elle a été préparée, encore faut-il que nous soyons prêts pour l’occuper. Il nous faut peut-être passer par l’incubateur du regard tout aimant, guérissant et chaleureux de la miséricorde du Père.

Ma foi dans le purgatoire repose sur la ferme conviction que, d’une part, la miséricorde divine ne gomme pas ma réalité avec mes choix et, d’autre part, que rien n’est jamais fini pour Dieu à moins que nous lui opposions un non définitif ! Malgré les fautes que nous pouvons commettre, il est toujours possible de recommencer même après notre mort pour que nous goûtions dans la plénitude et la vérité de ce que nous sommes l’amour et la vie de Dieu.

Dans cette eucharistie, prions donc pour tous les défunts, et, en particulier, tous nos proches qui nous ont quittés. Que le Seigneur les emmène avec lui à la place qu’il leur a préparée. Qu’ainsi, par la miséricorde de Dieu, ils reposent en paix ! Amen.

Fr. André Descôteaux, O.P.

 

PRIÈRE

Écoute nos prières avec bonté, Seigneur,
nous t’en prions :
tandis que grandit notre foi
en ton Fils ressuscité d’entre les morts,
affermis aussi notre espérance,
puisque nous attendons la résurrection
de ceux qui t’ont servi.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.