3 octobre 2025
Malheur !
Aujourd’hui, le frère André Descôteaux, O.P., nous explique que bien des malheurs que nous considérons comme des punitions de Dieu sont en fait souvent les conséquences directes du pécher humain qui nous détruisent et qui font pleurer Dieu…
LIVRE DU PROPHÈTE BARUC (1, 15-22)
Au Seigneur notre Dieu appartient la justice, mais à nous la honte sur le visage comme on le voit aujourd’hui : honte pour l’homme de Juda et les habitants de Jérusalem, pour nos rois et nos chefs, pour nos prêtres, nos prophètes et nos pères ; oui, nous avons péché contre le Seigneur, nous lui avons désobéi, nous n’avons pas écouté la voix du Seigneur notre Dieu, qui nous disait de suivre les préceptes que le Seigneur nous avait mis sous les yeux. Depuis le jour où le Seigneur a fait sortir nos pères du pays d’Égypte jusqu’à ce jour, nous n’avons pas cessé de désobéir au Seigneur notre Dieu ; dans notre légèreté, nous n’avons pas écouté sa voix.
Aussi, comme on le voit aujourd’hui, le malheur s’est attaché à nous, avec la malédiction que le Seigneur avait fait prononcer par son serviteur Moïse, au jour où il a fait sortir nos pères du pays d’Égypte pour nous donner une terre ruisselant de lait et de miel. Nous n’avons pas écouté la voix du Seigneur notre Dieu, à travers toutes les paroles des prophètes qu’il nous envoyait. Chacun de nous, selon la pensée de son cœur mauvais, est allé servir d’autres dieux et faire ce qui est mal aux yeux du Seigneur notre Dieu.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT LUC (10, 13-16)
En ce temps-là, Jésus disait : « Malheureuse es-tu, Corazine ! Malheureuse es-tu, Bethsaïde ! Car, si les miracles qui ont eu lieu chez vous avaient eu lieu à Tyr et à Sidon, il y a longtemps que leurs habitants auraient fait pénitence, avec le sac et la cendre. D’ailleurs, Tyr et Sidon seront mieux traitées que vous lors du Jugement. Et toi, Capharnaüm, seras-tu élevée jusqu’au ciel ? Non, jusqu’au séjour des morts tu descendras !
« Celui qui vous écoute m’écoute ; celui qui vous rejette me rejette ; et celui qui me rejette rejette celui qui m’a envoyé. »
Prédication
Les deux lectures de ce jour évoquent le malheur de ceux et celles qui se détournent de Dieu ou qui n’ont pas reconnu sa voix. Ils seraient ainsi châtiés. Je me permets de voir les choses légèrement différemment en posant simplement la question : quel parent est heureux de punir ses enfants? Il y a toujours des personnes déséquilibrées, mais il me semble qu’une personne normalement constituée ne peut que se réjouir de voir ses enfants progresser et s’épanouir ou être peinée de les voir emprunter des chemins destructeurs les conduisant à leur malheur. Comme Jésus dit ailleurs, « Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent (Mt 7, 11) » !
D’ailleurs pourquoi Dieu aurait-il créé l’humanité en l’insérant dans une splendide et magnifique création? « Ô Seigneur, notre Dieu, qu’il est grand ton nom par tout l’univers ! … qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? Tu l’as voulu un peu moindre qu’un Dieu, le couronnant de gloire et d’honneur (Ps. 8)?
Pourquoi? Nous trouvons une magnifique réponse dans le tout début de la lettre aux Éphésiens. « Il nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour. Il nous a prédestinés à être, pour lui, des fils adoptifs par Jésus, le Christ. Ainsi l’a voulu sa bonté, à la louange de gloire de sa grâce, la grâce qu’il nous donne dans le Fils bien-aimé (Ep 1, 4-6) ». Nous sommes le but de la création dans le Christ Jésus. Nous sommes désirés de toute éternité! Et Dieu prendrait plaisir à nous voir nous détourner de lui pour emprunter des chemins qui conduisent à la mort, à l’anéantissement! Sa bonté est telle qu’il a créé l’être humain libre, car il veut être aimé non par un pantin, mais par un être libre qui choisit de répondre à sa grâce par amour.
Le châtiment ce sont d’abord les chaînes que crée le pécheur et qui entravent son chemin vers le bonheur. C’est la corde tressée avec laquelle il se pend! Regardons notre terre, notre maison commune. Qu’en faisons-nous? Elle crie sa détresse. Le climat devient de plus en plus inhospitalier pour l’humanité! Les espèces animales et végétales disparaissent à vitesse grand v. Le niveau des océans ne cesse d’augmenter. Il faut circuler à Sainte-Flavie, au début de la Gaspésie, et voir la digue qui vient d’être construite pour protéger le village de l’érosion. Elle défigure le paysage!
Et que dire de la violence avec laquelle les nations se détruisent? L’Ukraine, Gaza, le Hamas et j’en passe. Avant de punir, Dieu doit pleurer quand il voit le mal que l’humanité s’inflige. Alors qu’ayant entendu le cri de son peuple réduit en esclavage en Égypte, il l’a libéré et lui a proposé une loi de liberté. Toutefois « chacun est allé, selon la pensée de son cœur mauvais, servir d’autres dieux et faire ce qui est mal aux yeux du Seigneur ». Est-ce que Jésus veut châtier Corazine et Bethsaïde? Je parie qu’il pleure sur ces villes en voyant le malheur dans lequel le refus de sa parole de miséricorde les enferme! Comme il a pleuré sur Jérusalem. « Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n’avez pas voulu (Mt 23, 37) » !
« Que vont devenir les pécheurs? », s’écriait notre père, saint Dominique, dans sa prière. Pensait-il au châtiment qu’ils devraient subir? Mais ne pensait-il pas d’abord au cul-de-sac dans lequel les conduisaient leurs égarements, leurs révoltes, leurs péchés?
« Allez apprendre ce que signifie : Je veux la miséricorde, non le sacrifice. En effet, je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs (Mt 9, 13.) »
Entendons ces lectures comme le cri d’un Père, le cri de notre frère et sauveur, qui ne veut que notre bonheur et que nous ayons la vie, la vie en plénitude. Prenons conscience que nos choix ne sont pas sans conséquence pour nous-mêmes et pour Dieu lui-même.
Fr. André Descôteaux, O.P.
PRIÈRE
Seigneur Dieu,
tu as voulu que toute la loi de sainteté consiste à t’aimer
et à aimer son prochain :
donne-nous de garder tes commandements,
et de parvenir ainsi à la vie éternelle.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.
