Homélie, vendredi, Semaine sainte C

18 avril 2025

Pèlerins de l'espérance, qui cherchons-nous?

En ce soir du Vendredi saint, le frère Daniel Cadrin, O.P., nous invite à revoir les questions présentes dans la Passion selon saint Jean qui nous poussent à examiner l’identité de Jésus et la relation que nous avons avec lui et avec nous-mêmes.

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Homélie

Ce récit de la Passion en Jean, que nous entendons chaque année au Vendredi Saint, est un drame saisissant, avec des figures en mouvement et en interaction, des dialogues vifs et intenses, et un fil conducteur, au centre de cette action : Jésus le Nazaréen. Plusieurs lectures de ce récit sont possibles, entre autres les réactions face à Jésus, avec toute leur variété, de l’hostilité à la fuite en passant par la solidarité. Et nous retrouvons nos propres histoires dans ces diverses attitudes et positions.

En écoutant ce récit, en le lisant, plusieurs questions montent en nous. Mais des questions, déjà ce drame en contient plusieurs, qui ressemblent aux nôtres ou qui s’adressent à nous, comme aux premiers auditeurs et lecteurs de l’Évangile. Je vais me concentrer sur deux sortes de questions : celles posées à Jésus, par l’un ou l’autre intervenant. Et celles, plus signifiantes et interpellantes encore, que Jésus pose à l’une ou l’autre figure.

D’abord les questions posées à Jésus : Où ? Par qui ? À propos de quoi ? Il y en a sept. Dans le palais du grand-prêtre, il est mentionné que celui-ci interroge Jésus sur ses disciples et son enseignement. Première question de base : de qui et de quoi s’agit-il. Nous-mêmes revenons à cette question première.

Puis, au prétoire, le palais du gouverneur Pilate, celui-ci pose plusieurs questions à Jésus. Elles portent presque toutes sur l’un ou l’autre aspect de Jésus comme tel, sur son identité : « Es-tu roi des Juifs ? Ta nation t’a livré : qu’as-tu donc fait ? Alors, tu es roi ? D’où es-tu ? ». Et au travers de cela, une question fondamentale, adressée à Jésus et plus largement : « Qu’est-ce que la vérité ? ». Et sa dernière, qui réfère à lui-même : « Ne sais-tu pas mon pouvoir ? ».

Ainsi, Jésus est questionné par le pouvoir religieux, le grand-prêtre, et par le pouvoir politique, le gouverneur Pilate. Dans les deux cas, cela se passe chez eux, sur leur terrain, le palais puis le prétoire. Et ces questions tracent presque un programme de formation pour catéchumènes, à la découverte de Jésus : son enseignement, son action, son origine, son royaume, ses disciples. Comme une invitation à porter ces questions, à se mettre en quête de leurs réponses.

Puis, nous entendons les questions posées par Jésus : Où ? À qui ? Sur quoi ? Il y en a aussi sept. D’abord dans le jardin où il s’est retiré avec ses disciples, Jésus pose une question aux gens qui viennent l’arrêter, des soldats et gardes envoyés par les grands-prêtres et les pharisiens, et guidés par Judas, l’un des douze : « Qui cherchez-vous ? ». Par deux fois : « Qui cherchez-vous ? ». La question est claire et forte. Dans nos jardins, avec nos ténèbres et nos armes, qui cherchons-nous ?

Puis, dans le même jardin, Jésus pose une question à Pierre, ou en même temps à lui-même : « Vais-je refuser de boire la coupe que le Père m’a donnée ? ». Elle porte sur son propre engagement, à l’heure de l’épreuve. Et nous, quels choix avons-nous à faire, à ce moment-ci de nos vies ?

Puis, au palais du grand-prêtre, dans son procès, Jésus pose deux questions à ceux qui l’accusent : toutes deux portent sur le pourquoi. Au grand-prêtre : « Pourquoi m’interroges-tu ? Je n’ai rien caché,… ». Au garde qui le gifle : « Si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? ». Dans les deux cas, Jésus se tient droit avec dignité et va plus loin, faisant appel aux motivations de ses accusateurs et à leur conscience. Un modèle pour nous dans nos situations difficiles, pour garder le respect de nous-mêmes et celui des autres.

Puis, au prétoire du gouverneur, à Pilate qui l’interroge sur sa royauté, Jésus demande : « À mon sujet, dis-tu cela de toi-même ou d’autres te l’ont dit ? ». Au fond, qui parle ici ? Est-ce toi Pilate ? Ou tu répètes ce qui circule dans les réseaux ? Une question qui porte sur la vérité, à faire dans nos paroles. Une invitation à parler honnêtement, en notre nom, avec notre voix.

Les prochaines questions de Jésus ne sont pas dans notre récit de la Passion. Il les posera au matin de Pâques, en un autre jardin, où son corps a été déposé dans un tombeau neuf. Il les posera à une disciple, Marie de Magdala (Jn 20, 15) : « Pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? ». On retrouve la même question qu’au début de la Passion, dans le Jardin des Oliviers : « Qui cherchez-vous ? ». Et nous, dans nos jardins, de ténèbres et de lumières, de la passion et de la résurrection, jardins de la nuit et du matin, qui cherchons-nous ?

Pèlerins de l’espérance, continuons notre marche à la suite de Jésus, portant nos questions, les approfondissant, et étant attentifs à écouter les questions que sa parole nous pose. Car ces questions ouvrent nos horizons, au plus intime de nous, au cœur de nos relations, et au plus vaste de notre univers. « Je suis venu pour rendre témoignage à la vérité », a dit Jésus. Que cette vérité, qui est vivante et vibrante, nous éclaire et nous encourage en nos jardins de rencontres et sur nos chemins d’espérance. Amen.

Fr. Daniel Cadrin, O.P.

 

PRIÈRE

Souviens-toi, Seigneur, de ta miséricorde,
sanctifie ceux qui veulent te servir et protège-les toujours,
car c’est pour eux que ton Fils Jésus Christ a institué
par son sang répandu le sacrement pascal.
Lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.