16 avril 2025
La trahison de Judas
Aujourd’hui, le frère Yvon Pomerleau, O.P., situe la trahison de Judas dans le contexte de l’évangile de Matthieu et nous révèle un Jésus conscient de ce qui l’entoure et consentant aux évènements.

LIVRE DU PROPHÈTE ISAÏE (50, 4-9a)
Le Seigneur mon Dieu m’a donné le langage des disciples, pour que je puisse, d’une parole, soutenir celui qui est épuisé. Chaque matin, il éveille, il éveille mon oreille pour qu’en disciple, j’écoute.
Le Seigneur mon Dieu m’a ouvert l’oreille, et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas caché ma face devant les outrages et les crachats. Le Seigneur mon Dieu vient à mon secours ; c’est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages, c’est pourquoi j’ai rendu ma face dure comme pierre : je sais que je ne serai pas confondu.
Il est proche, Celui qui me justifie. Quelqu’un veut-il plaider contre moi ? Comparaissons ensemble ! Quelqu’un veut-il m’attaquer en justice ? Qu’il s’avance vers moi ! Voilà le Seigneur mon Dieu, il prend ma défense ; qui donc me condamnera ?
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT MATTHIEU (26, 14-25)
En ce temps-là, l’un des Douze, nommé Judas Iscariote, se rendit chez les grands prêtres et leur dit : « Que voulez-vous me donner, si je vous le livre ? » Ils lui remirent trente pièces d’argent. Et depuis, Judas cherchait une occasion favorable pour le livrer.
Le premier jour de la fête des pains sans levain, les disciples s’approchèrent et dirent à Jésus : « Où veux-tu que nous te fassions les préparatifs pour manger la Pâque ? » Il leur dit : « Allez à la ville, chez untel, et dites-lui : “Le Maître te fait dire : Mon temps est proche ; c’est chez toi que je veux célébrer la Pâque avec mes disciples.” » Les disciples firent ce que Jésus leur avait prescrit et ils préparèrent la Pâque.
Le soir venu, Jésus se trouvait à table avec les Douze. Pendant le repas, il déclara : « Amen, je vous le dis : l’un de vous va me livrer. » Profondément attristés, ils se mirent à lui demander, chacun son tour : « Serait-ce moi, Seigneur ? » Prenant la parole, il dit : « Celui qui s’est servi au plat en même temps que moi, celui-là va me livrer. Le Fils de l’homme s’en va, comme il est écrit à son sujet ; mais malheureux celui par qui le Fils de l’homme est livré ! Il vaudrait mieux pour lui qu’il ne soit pas né, cet homme-là ! » Judas, celui qui le livrait, prit la parole : « Rabbi, serait-ce moi ? » Jésus lui répond : « C’est toi-même qui l’as dit ! »
Homélie
Au cours des dernières années, il m’a été donné de prêcher sur la trahison de Judas. Je me souviens d’avoir brossé un triple portrait de Judas : Judas l’ami de Jésus, le traitre de Jésus et le complice de Jésus. Je ne voudrais pas me répéter encore moins me plagier ce matin. J’essaierai plutôt de situer ce récit de la trahison de Judas dans le cadre littéraire de l’évangile de Matthieu, plus précisément dans l’ensemble du chapitre 26 qui comporte 75 versets.
La Bible de Jérusalem divise ce chapitre avec une douzaine de titres. Les voici dans l’ordre : Complot contre Jésus – L’onction de Béthanie – La trahison de Judas – Préparatifs du repas pascal – Annonce de la trahison de Judas – Institution de l’eucharistie – Prédiction du reniement de Pierre – À Gethsémani – L’arrestation de Jésus – Jésus devant le Sanhédrin – Reniements de Pierre.
On remarque que l’onction de Béthanie se situe entre le complot contre Jésus et la trahison de Judas. Les deux événements impliquent des proches de Jésus, une femme (Marie, comme le précise l’évangile de Jean) et Judas, l’un des disciples de Jésus. C’est dans le cercle même de Jésus que les bonnes œuvres et les gestes de trahison se manifestent. La trahison de Judas n’est pas une action isolée : le reniement de Pierre est aussi une forme de trahison. Dans nos cercles chrétiens et dans nos propres vies, l’amour et la trahison sont présents.
Dans le même chapitre de Matthieu, il y a une alternance entre ces récits d’onction, de trahison et le repas pascal. Chaque événement suppose une préparation, une annonce et une réalisation. Chaque événement est aussi porteur d’un message, d’un sens profond en lien avec le mystère de la mort-résurrection de Jésus. « Les pauvres, vous les aurez toujours avec vous, mais moi, vous ne m’aurez pas toujours ». « Le Fils de l’homme s’en va selon qu’il est écrit de lui, mais malheur à cet homme-là par qui le Fils de l’homme est livré ». « Vous tous, vous allez succomber à cause de moi, cette nuit même ».
Tous les gestes d’onction et de trahison se réalisent à la demande ou du moins avec l’agrément de Jésus lui-même. À l’indignation des disciples devant le geste de la femme, Jésus réplique que c’est vraiment une « bonne œuvre » qu’elle a accomplie. Pour les préparatifs du repas pascal, c’est Jésus qui demande d’aller chez un tel, et « les disciples firent comme Jésus leur avait ordonné ». À la table avec les douze, Jésus dit : « En vérité je vous le dis, l’un de vous me livrera ». Au mont des oliviers, Jésus dit à ses disciples : « Vous tous, vous allez succomber » et il réplique à Pierre : « En vérité, je te le dis, cette nuit même avant que le coq chante, tu m’auras renié trois fois ».
Encore aujourd’hui, le Seigneur n’est pas étranger à ce qui nous arrive. C’est dans notre monde qu’il vit encore sa passion avec toutes les trahisons qui y sont liées. C’est aussi à notre monde qu’il ouvre les portes de l’espérance pascale.
Fr. Yvon Pomerleau, O.P.
PRIÈRE
Seigneur Dieu,
tu as voulu que ton Fils soit soumis pour nous
au supplice de la croix
afin de nous arracher au pouvoir de l’Ennemi ;
donne à ceux qui te servent
de recevoir la grâce de la résurrection.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.