Homélie, vendredi de la 6ème semaine du Temps ordinaire

21 février 2025

Réussir une vie chrétienne

Aujourd’hui, alors que Jésus nous demande de renoncer à nous-même et de porter nos croix, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous explique à quoi se doit de ressembler une vie alignée sur le Royaume de Dieu.

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Homélie

« Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même… » Formule frappante, mais quelque peu ambiguë. Car renoncer à soi-même, ce n’est pas renoncer à la vie, ce n’est pas étouffer toutes ses aspirations à avoir une vie réussie. Renoncer à soi-même, c’est plutôt mettre de côté certains types de projet de vie. La plupart des gens, nous le savons, tiennent à réussir leur vie, à mener une existence qui leur apporte joie et satisfaction. C’est pourquoi ils élaborent un projet de vie à partir de ce qu’ils observent dans leur entourage immédiat et en fonction de ce que leur société valorise. Ils s’inspirent aussi des témoignages de gens qu’ils admirent. Ils orientent de la sorte leur avenir personnel et familial en tenant compte de leurs talents naturels, de leurs aspirations et des portes que leur ouvre le marché du travail,

Or, quand des chrétiens et chrétiennes font le choix d’orienter leur vie en fonction de leurs aspirations personnelles et d’un engagement professionnel intéressant, ils sont incités à prendre en compte l’Évangile. Ce choix de laisser la lumière évangélique guider leurs pas vient colorer en profondeur leur projet de vie. Il y a d’abord des chemins qu’ils s’engagent à ne pas emprunter. Par exemple, ils doivent dire non à tout projet qui repose sur l’exploitation des autres. C’est plutôt le souci du bien commun et celui des personnes dans le besoin qui doivent avoir la priorité. Pas de projet d’une vie chrétienne sans la recherche de la justice, du partage et de la fraternité. C’est là l’expression de l’amour de Dieu et du prochain. En conséquence, le plan de vie élaboré par un baptisé dépasse de beaucoup le projet individuel bâti dans une perspective purement terrestre, car il vient s’inscrire dans le projet même de Dieu, celui de son Royaume. En d’autres mots, en cherchant à situer son projet de vie à l’intérieur du projet de Dieu, le chrétien fait éclater les limites liées aux premières esquisses de son projet originel.

Nous le constatons, situer son projet de vie dans le cadre du projet de Dieu, c’est accepter de devenir collaborateur de Dieu. C’est ainsi vouloir contribuer à ce que le projet de Dieu soit privilégié. D’où une transfiguration de l’orientation donnée à sa vie personnelle. Un tel choix, s’il exige des renoncements comme Jésus l’a affirmé, il a par ailleurs pour effet d’ouvrir sur une vie féconde pour soi et pour les autres. En revanche, il importe de le reconnaître, un tel choix peut entraîner, dans la vie de tous les jours, des conséquences blessantes et même dangereuses. Pour un chrétien ou une chrétienne vivant dans un pays musulman ou un pays totalitaire, le prix à payer est habituellement fort élevé. Même chez nous, au Québec, il suffit d’entendre les témoignages de bénévoles (hommes et femmes) qui se sont généreusement engagés dans la vie de leur paroisse pour découvrir qu’un tel engagement est largement déprécié, même méprisé, par des baptisés qui se disent maintenant « sans-religion ». Pensons aussi aux hommes (jeunes et moins jeunes) qui, de nos jours, portent le projet de devenir prêtres. Ils savent bien qu’ils seront humiliés, ridiculisés s’ils présentent leur projet en dehors des cercles de chrétiens engagés. Ils se feront dire qu’ils vont gaspiller leur vie.

Oui, suivre le Christ implique des renoncements. Retenons que vouloir réussir sa vie en osant se laisser guider par l’Évangile est autrement plus fécond, plus comblant que le choix de s’en tenir aux normes de la culture contemporaine marquée par le matérialisme et l’individualisme à outrance. Car suivre le Christ, c’est compter sur une vie en plénitude, sur une communion définitive avec Dieu. « Celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera ». Que cette parole nous donne force et confiance dans notre marche à la suite du Christ Jésus !

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
toi qui unis les cœurs des fidèles dans une seule volonté :
donne à ton peuple d’aimer ce que tu commandes
et de désirer ce que tu promets,
pour qu’au milieu des changements de ce monde,
nos cœurs s’établissent fermement
là où se trouvent les vraies joies.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.