Homélie, jeudi de la 6ème semaine du Temps ordinaire

20 février 2025

Une question qui demande action !

Aujourd’hui, alors que, dans l’évangile, Jésus demande à ses disciples qui il est pour eux et donc d’exprimer la nature de leur relation avec lui, Gustavo Adolfo Garay Ortega nous donne un exemple concret et récent d’entraide fraternelle et d’amour du Christ que notre communauté universitaire à su manifester !

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Commentaire

Ce passage de l’évangile selon Marc (8, 27-33) est considéré comme le noyau du ministère de Jésus. Après avoir prêché et enseigné à la foule, fait des guérisons et d’autres signes du Règne et fait beaucoup de chemin avec ses disciples, Jésus interpelle ces derniers afin de connaître l’impact de sa prédication et de son ministère sur les gens. C’est comme une sorte de sondage de mi-mandat. Mais la question de Jésus a un objectif plus profond que le seul fait de savoir ce que les autres pensent de sa personne et de sa prédication.

À première vue, la question est simple et n’engage les disciples qu’à dire ce qu’ils ont entendu à propos de Jésus : « Au dire des gens, qui suis-je ? ». Cependant, la réponse est très importante, car les gens identifient Jésus à deux prophètes clés de l’histoire d’Israël : Jean le Baptiste et Élie. Tous deux proclament haut et fort le besoin de conversion. La vie de ces deux prophètes est marquée par la cohérence et la fidélité à Dieu dans leur mission. Son impact et son influence sur les foules sont donc non négligeables, intenses même ; nous pouvons supposer que cette ouverture aux enseignements de Jésus résulte d’un besoin intense de changement ou de la réalisation qu’avec Jésus, ce changement tant attendu est arrivé.

Maintenant, est-ce que ce dire des gens interpelle les disciples ? Voilà la raison de la deuxième question de Jésus : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? ». Cette question peut être vraiment compromettante pour les disciples, car ils doivent se prononcer sur l’identité de Jésus et, par conséquent, son impact dans leur vie et leur relation avec lui. Ce qui me laisse à penser que ce deuxième questionnement de Jésus a probablement provoqué un silence gêné chez les disciples, avant que Pierre, l’impulsif du groupe, ne réponde au nom des Douze : « Tu es le Christ. »

Attribuer le titre de Christ à Jésus est synonyme de dire qu’il est l’envoyé de Dieu, c’est-à-dire, le Messie. Il faut dire qu’à l’époque, il était très difficile pour un juif de reconnaître Jésus comme le Messie parce qu’il fallait déjà reconnaître comme vrai qu’il était de la lignée de David (2Sa, 7) et, en plus, le libérateur promis par Dieu. De plus, le messianisme de Jésus ne répondait pas aux attentes des autorités juives, celles d’un libérateur politique ou guerrier face à l’Empire romain qui dominait la région.

Malgré l’exactitude de la réponse de Pierre, il reste dans une vision humaine et dans les préjugés de la société juive à propos du messianisme de Jésus, car, même si Jésus leur a expliqué les raisons qui le mèneront à souffrir sa passion, sa mort et sa résurrection, il cherche tout de même à le dissuader. En effet, les explications de Jésus ne sont faciles à comprendre pour personne. Pourquoi fallait-il qu’il donne sa vie pour la recevoir à nouveau ? Pourquoi l’accomplissement de sa mission requérait-il sa mort sur la croix ? Pourquoi faudrait-il perdre pour vraiment gagner ? Jésus lui répond donc vigoureusement et de façon à interpeler tous les disciples : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. »

Pierre, comme chaque croyant au cours de l’histoire, a besoin de se débarrasser des images préconçues et fausses pour s’ouvrir à la nouveauté de l’amour de Dieu que Jésus révèle dans sa personne et à travers sa mission. À ce moment-ci de l’évangile, Jésus confronte ses disciples afin de s’assurer que ce qui est en train de se réaliser, l’instauration du Royaume de Dieu, soit bien compris : il faut penser, regarder, accueillir, donner comme Dieu le fait ; il faut aimer comme Dieu nous aime, sans réserve, sans limites, sans condition.

Jeudi et dimanche passés ont été marqués par deux tempêtes et une abondance de neige historique. Les déplacements étaient difficiles et, encore aujourd’hui, des montagnes impressionnantes de neige bordent les rues de Montréal. Mais ce qui m’a marqué vraiment, c’est la générosité des 54 personnes présentes dimanche passé à la messe universitaire. Je m’explique brièvement : Sr Violaine Paradis de la Congrégation Notre-Dame a communiqué avec moi pour demander de l’aide financière pour une personne en difficulté au Honduras. Cette personne s’appelle Danilo et il est bien connu des sœurs de la Congrégation Notre-Dame qui font mission là-bas. Il travaillait en conduisant son camion lorsqu’il a accidentellement frappé un motocycliste, lui causant des fractures à une jambe et des côtes cassées. La famille du motocycliste veut mettre Danilo en prison s’il ne paie pas pour les soins du blessé. Une somme de 50 000 lempiras (environ 2770$ canadiens) a donc été exigée de Danilo. Sa famille le soutient, mais elle n’a pas les moyens de payer toute la somme demandée.

J’ai donc fait l’annonce à la messe pour inviter notre communauté à ramasser des fonds (l’équivalent de 1108$ canadiens) et venir en aide à Danilo. Dans la même journée, nous avons ramassé 900 $ et, avec les contributions de la famille de Sr Violaine, la somme était atteinte ! Oui, c’était au milieu de la tempête et je sais que plusieurs ont donné généreusement même si leurs revenus sont très limités. Nous avons aidé quelqu’un en difficulté. Au moment-même où j’ai écrit ce commentaire, l’argent était acheminé vers Danilo. Il n’y a pas eu de préjugés, mais plutôt, à travers nos actes, la réponse à la question de Jésus : « Pour vous, qui suis-je ? »

Il ne s’agit pas de répondre théoriquement, mais bien de laisser le cœur parler de notre propre expérience avec Jésus pour dire aux autres la place qu’il occupe dans nos vies. Pour moi, c’est clair ! Ceux qui ont répondu à l’appel d’aide sont déjà dans la dynamique proposée par le Christ : instaurer le Règne de Cieux où l’amour sans limites de Dieu nous embrasse et nous inspire tellement qu’il nous amène à aimer comme il nous aime.

Voilà la mission du Christ : amener l’être humain à une rencontre profonde avec Dieu et que cet être en devenir apprenne à vivre dans une dynamique d’amour. La libération offerte par le Christ brise nos préjugés, rompt avec toute image préconçue. Il s’agit d’amener notre humanité à un autre niveau : celui de l’amour de Dieu, où nos pensées sont orientées vers les autres et en leur faveur, où il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux et celle qu’on aime (cf. Jn 15,13).

Gustavo Adolfo Garay Ortega

 

PRIÈRE

Dieu créateur et maître de tout,
pose sur nous ton regard,
et pour que nous ressentions l’effet de ton pardon,
accorde-nous de te servir avec un cœur sans partage.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.