Homélie, dimanche de la 4ème semaine du Temps ordinaire

2 février 2025

Une promesse accomplie !

Aujourd’hui, le frère André Descôteaux, O.P., nous présente Syméon et Anne comme des exemples à suivre, car, éveillés et alertes, guidés par l’Esprit, ils reçoivent le Messie de l’Alliance Nouvelle au nom de tout Israël !

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Homélie

Enfin, un évangile pour les vieillards ou mieux dit, un évangile où les vieillards ont le beau rôle. Ils sont en plein cœur de l’action, non écartés ni exclus comme ils le sont souvent dans une société qui ne juge souvent la valeur d’une personne que par son travail. Ils sont les principaux acteurs alors que souvent ils sont oubliés et les premières victimes des coupes budgétaires dans les services de santé. Dans notre évangile, ils font ce que savent faire tant et tant de grands-parents : accueillir et porter dans leurs bras des petits bébés. J’ai peu de souvenirs de ma grand-mère maternelle, mais je me souviens qu’en me berçant elle me chantait « c’est la poulette grise qui a pondu dans l’église un beau coco pour André qui va dormir bientôt ».

Enfin, un dimanche où les vieillards ont la première place. Mais à y regarder de plus près l’ont-ils vraiment ? Tout d’abord, il y a Jésus, ce beau petit bébé. Comme tous les bébés, il est le centre de l’attention. En effet, tout tourne autour de lui. Le vieillard Syméon n’a pu résister : il le prend dans ses bras. Et Anne qui, comme une bonne grand-mère, est tombée sous son charme, ne cesse d’en parler.

Mais il y a un autre acteur qu’on ne voit pas. Luc mentionne par trois fois sa présence : l’Esprit Saint. En effet, l’Esprit repose sur Syméon. C’est aussi l’Esprit qui lui avait annoncé qu’il ne mourrait pas avant d’avoir vu le Christ. Et c’est encore l’Esprit qui le pousse à être au Temple au moment où la famille de Nazareth se présente.

Cela étant dit, la présence de Syméon et d’Anne est essentielle. La petite famille de Nazareth arrive au Temple. Elle est perdue dans la masse anonyme des croyants et croyantes qui y viennent pour prier. Elle n’est pas accueillie par les hautes autorités religieuses, mais par ces deux vieillards. Il faut bien qu’elle soit reçue, car, selon le prophète Malachie, quelqu’un d’important se présente. « Soudain viendra dans son Temple le Seigneur que vous cherchez. Le messager de l’Alliance que vous désirez ». Enfin, il est là !

Ce seront Syméon et Anne qui les accueilleront et à travers eux, c’est tout Israël qui accueille le messager de l’Alliance. Forgés par la foi multiséculaire du peuple de l’Alliance, ils sont la quintessence de l’attente du Messie eux qui espéraient la véritable consolation d’Israël dans la prière et le jeûne. Syméon et Anne sont certes des vieillards, mais ils sont bien vivants et alertes, car, au plus profond d’eux-mêmes, ils sont habités par le désir de la délivrance et de la paix pour leur peuple qu’apportera le Messie, ce que Luc appelle la consolation d’Israël. Cette espérance est si vive chez Syméon que l’Esprit lui a promis de ne pas mourir sans avoir vu le Messie. Anne et Syméon sont loin d’être blasés ou cyniques n’attendant plus rien de la vie si ce n’est la mort. Au contraire, même âgés, ils incarnent la vive espérance d’Israël qui est sur le point d’être comblée.

Recevant l’enfant dans ses bras, l’Esprit intervient en ouvrant les yeux de Syméon. Il lui permet de faire, dans la foi, le pas de la reconnaissance du Messie et du Sauveur. Dieu a tenu parole ! Nous assistons ici à un jeu remarquable entre l’Esprit et Syméon. En Syméon, c’est Israël qui reçoit dans ses bras l’enfant et c’est grâce à l’Esprit qu’il peut bénir Dieu en reconnaissant dans l’enfant la lumière qui se révèle aux nations et donne gloire au peuple d’Israël.

L’action de l’Esprit ne s’arrête pas là, car il permet à Syméon de percevoir que cet enfant si exceptionnel ne sera pas accueilli par tous ses frères et toutes ses sœurs dans la foi comme il conviendrait. Il sera un signe de contradiction au point que Marie verra son cœur transpercé d’un glaive. Le destin de cet enfant sera tragique. L’auteur de la lettre aux Hébreux relisant la vie de Jésus comprendra que, s’il a subi la mort ignominieuse de la croix, c’est par solidarité avec l’humanité. « Parce qu’il a souffert jusqu’au bout l’épreuve de la passion, il est capable de porter secours à ceux qui subissent une épreuve ». Solidaire en partageant notre condition dont la mort, nous sommes solidaires avec lui en communiant à sa vie en plénitude.

Ce matin, nous sommes avec Marie, Joseph, Syméon et Anne. Nous les voyons tous autour de Syméon tenant dans ses bras le petit Jésus. Nous aussi, comme Syméon, nous sommes habités par l’Esprit et pouvons ainsi reconnaître en lui le sauveur, la lumière du monde qui éclaire nos vies même dans les ténèbres les plus épaisses du monde.

Nous avons allumé des cierges comme nous le ferons lors de la veillée pascale. Déjà, nous anticipons ce que nous célébrerons dans quelques semaines. Cet enfant est le Ressuscité, le vainqueur de la mort, la lumière dans nos ténèbres. Avec lui, qui a partagé notre condition, communiant à la sienne, nous entrerons dans le nouveau Temple, non construit par des mains humaines, dans le ciel, devant la face de Dieu même !

Voilà pourquoi nous pouvons comme Syméon être en paix. Maintenant, ô, maître souverain, ton serviteur peut s’en aller en paix. Dieu a tenu parole. Il peut partir même s’il vit encore en un pays occupé. En accueillant Jésus, il accède à une paix profonde, celle de l’espérance comblée par Dieu seul, celle que son cœur désirait passionnément.

Malgré notre vieillissement, malgré tous les maux qui peuvent nous accabler et affliger ce monde, nous voyons, en Jésus, le salut que Dieu a préparé à la face de tous les peuples. La promesse enfin s’accomplit. L’attente de notre cœur est enfin exaucée ! Comme Anne, nous pouvons proclamer les louanges de Dieu et parler de l’enfant à tous ceux et à toutes celles qui attendent un monde nouveau, qui espèrent la véritable consolation, insatisfaits de ce que notre monde, malgré sa beauté, peut offrir. Peut-être l’âge nous permet-il de libérer nos cœurs de l’accessoire pour ne rechercher que l’essentiel ? Ainsi, grâce à l’Esprit, pouvons-nous reconnaître Dieu venant à nous en son Fils, Jésus. Il entre dans le temple de nos cœurs dans l’attente du jour béni où ce sera le Seigneur Jésus lui-même qui nous prendra dans ses bras et nous présentera à son Père et notre Père.

En attendant, la vie continue : les deux tourterelles ont été offertes. Jésus retourne avec ses parents à Nazareth, mais il ne cesse, par l’Esprit, de grandir dans l’Église et dans le monde. La grâce de Dieu est toujours avec lui et, par lui, avec nous. Soyons dans la paix ! Amen.

Fr. André Descôteaux, O.P.

 

PRIÈRE

Dieu éternel et tout-puissant, Dieu de majesté,
nous t’adressons cette prière :
puisque ton Fils unique, ayant pris notre chair,
fut en ce jour présenté dans le Temple,
fais que nous puissions, avec une âme purifiée,
être présentés devant toi.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.