10 janvier 2024
Le salut dans le secret
Aujourd’hui, le frère Yvon Pomerleau, O.P., nous explique pourquoi Jésus demande aux personnes qu’il guérit de garder le silence sur ses miracles.
PREMIÈRE LETTRE DE SAINT JEAN (5, 5-13)
Bien-aimés, qui donc est vainqueur du monde ? N’est-ce pas celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu ? C’est lui, Jésus Christ, qui est venu par l’eau et par le sang : non pas seulement avec l’eau, mais avec l’eau et avec le sang. Et celui qui rend témoignage, c’est l’Esprit, car l’Esprit est la vérité.
En effet, ils sont trois qui rendent témoignage, l’Esprit, l’eau et le sang, et les trois n’en font qu’un. Nous acceptons bien le témoignage des hommes ; or, le témoignage de Dieu a plus de valeur, puisque le témoignage de Dieu, c’est celui qu’il rend à son Fils. Celui qui met sa foi dans le Fils de Dieu possède en lui-même ce témoignage. Celui qui ne croit pas Dieu, celui-là fait de Dieu un menteur, puisqu’il n’a pas mis sa foi dans le témoignage que Dieu rend à son Fils.
Et ce témoignage, le voici : Dieu nous a donné la vie éternelle, et cette vie est dans son Fils. Celui qui a le Fils possède la vie ; celui qui n’a pas le Fils de Dieu ne possède pas la vie. Je vous ai écrit cela pour que vous sachiez que vous avez la vie éternelle, vous qui mettez votre foi dans le nom du Fils de Dieu.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT LUC (5, 12-16)
Jésus était dans une ville quand survint un homme couvert de lèpre ; voyant Jésus, il tomba face contre terre et le supplia : « Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier. » Jésus étendit la main et le toucha en disant : « Je le veux, sois purifié. » À l’instant même, la lèpre le quitta. Alors Jésus lui ordonna de ne le dire à personne : « Va plutôt te montrer au prêtre et donne pour ta purification ce que Moïse a prescrit ; ce sera pour tous un témoignage. »
De plus en plus, on parlait de Jésus. De grandes foules accouraient pour l’entendre et se faire guérir de leurs maladies. Mais lui se retirait dans les endroits déserts, et il priait.
Homélie
« Jésus ordonna (au lépreux) de ne le dire à personne. »
« De grandes foules accouraient pour entendre (Jésus) et se faire guérir de leurs maladies. »
Dans ces deux passages de l’évangile, deux points importants de la mission de Jésus sont soulignés : l’universalité du salut (de grandes foules – leurs maladies) et le secret messianique (ne le dire à personne). Deux affirmations qui ne semblent pas faciles à harmoniser. Plus le salut s’étend et rejoint un grand nombre de personnes, moins le secret sur l’action de Jésus peut être gardé.
Commençons par l’affirmation du salut universel. « De grandes foules accouraient pour l’entendre et se faire guérir ». Un salut pour tous : c’est ce que le prophète Isaïe avait annoncé concernant le Messie. « Je ferai reposer sur lui mon esprit, aux nations il fera connaître le jugement. Les nations païennes mettront leur espoir en son nom ». Le message de Jésus n’est pas lié à un peuple (le peuple juif) même si au départ Jésus s’adresse surtout aux Juifs. Ce salut pour tous se veut aussi un salut global. Il est pour tous ceux qui souffrent de quelque mal. Il rejoint toutes nos misères humaines : les maladies du corps, l’ignorance liée à l’esprit et les péchés qui proviennent du cœur. « Lequel est le plus aisé de dire : tes péchés sont pardonnés ou de dire : lève-toi et marche ? »
Mais alors pourquoi imposer le secret sur les guérisons que Jésus opère? Qu’est-ce qu’un secret? Pourquoi recourt-on au secret dans notre expérience quotidienne? Vous connaissez tous cette définition du secret qui n’est pas dépourvu de vérité : le secret, c’est ce qu’on dit à une personne à la fois. Plusieurs motifs peuvent nous amener à imposer le secret. Parce qu’il s’agit de quelque chose d’important ou de personnel ou tout simplement d’incertain. Ou bien encore quelque chose susceptible de changer ou d’être mal interprété. Partager un secret peut être un signe de confiance et d’amitié.
Qu’en est-il du secret imposé par Jésus? Jésus impose le secret pour quatre sortes de guérison attendues pour les temps messianiques. Jean-Baptiste ayant entendu parler de ce que Jésus faisait envoya deux de ses disciples lui demander : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre? » Et Jésus de leur répondre : « Allez et rapportez à Jean ce que vous voyez et entendez : les aveugles recouvrent la vue; les lépreux sont guéris; les sourds entendent et les morts ressuscitent ». Jésus se manifeste donc par ses guérisons comme le messie attendu. Jésus cependant ne veut pas que la foule tire des conclusions fausses sur son titre de messie. On pourrait faire de Jésus un messie politique, un messie triomphant. Jésus est un messie crucifié. C’est la nécessité de la passion et de la mort qui est la raison du secret. Il y a là une mise en garde pour les disciples de Jésus et pour tous les chrétiens de ne pas escamoter la passion, la croix, pour ne considérer que le Christ dans sa gloire qui est anticipée par ses miracles. C’est par sa souffrance et sa mort que Jésus peut guérir les corps blessés et les cœurs brisés.
Parce que Jésus a vaincu le mal en sa propre chair et qu’il est ressuscité pour le salut de tous, il est bon et beau de chanter la louange de notre Dieu dans la célébration eucharistique.
Fr. Yvon Pomerleau, O.P.
PRIÈRE
Dieu tout-puissant,
tu as manifesté par une étoile
qu’un Sauveur était né pour le monde ;
nous t’en prions :
que la lumière de cette naissance se révèle
à nos esprits et grandisse toujours dans nos cœurs.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.