29 octobre 2024
Une fleur d'espérance dans l'adversité
Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., met en contraste l’idéalisme de la parabole de la graine de moutarde et les réalités difficiles dans lesquelles la Bonne Nouvelle a su fleurir.
LETTRE DE SAINTE PAUL APÔTRE AUX ÉPHÉSIENS (5, 21-33)
Frères, par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ; les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus ; car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Église, le Christ est la tête, lui qui est le Sauveur de son corps. Eh bien ! puisque l’Église se soumet au Christ, qu’il en soit toujours de même pour les femmes à l’égard de leur mari.
Vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église, il s’est livré lui-même pour elle, afin de la rendre sainte en la purifiant par le bain de l’eau baptismale, accompagné d’une parole ; il voulait se la présenter à lui-même, cette Église, resplendissante, sans tache, ni ride, ni rien de tel ; il la voulait sainte et immaculée. C’est de la même façon que les maris doivent aimer leur femme : comme leur propre corps. Celui qui aime sa femme s’aime soi-même. Jamais personne n’a méprisé son propre corps : au contraire, on le nourrit, on en prend soin.
C’est ce que fait le Christ pour l’Église, parce que nous sommes les membres de son corps. Comme dit l’Écriture : À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église.
Pour en revenir à vous, chacun doit aimer sa propre femme comme lui-même, et la femme doit avoir du respect pour son mari.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT LUC (13, 18-21)
En ce temps-là, Jésus disait : « À quoi le règne de Dieu est-il comparable, à quoi vais-je le comparer ? Il est comparable à une graine de moutarde qu’un homme a prise et jetée dans son jardin. Elle a poussé, elle est devenue un arbre, et les oiseaux du ciel ont fait leur nid dans ses branches. »
Il dit encore : « À quoi pourrai-je comparer le règne de Dieu ? Il est comparable au levain qu’une femme a pris et enfoui dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que toute la pâte ait levé. »
Homélie
La parabole du grain de moutarde était sûrement très suggestive pour les gens qui écoutaient Jésus. Elle évoquait une croissance impressionnante. Malgré sa petitesse, la graine de moutarde engendrait, dans les pays du Proche-Orient, une plante de deux mètres de hauteur, parfois davantage, et une abondante récolte de graines. Rien de mieux pour laisser entendre que le Royaume de Dieu s’implanterait non seulement en terre d’Israël mais qu’il se répandrait rapidement dans le monde entier.
Mais, il faut le reconnaître, cette parabole ne dit pas tout de la réalité. À la différence de la parabole de la semence qui tombe sur des terrains plus ou moins productifs, la parabole du grain de moutarde ne contient pas d’indications sur les conditions d’ensemencement. Par exemple, rien sur la qualité du sol, rien sur la quantité des précipitations. La parabole nous situe dans un univers agricole idéalisé. Ce qu’elle fait imaginer, c’est une croissance généreuse et même étonnante. La réalité, nous le savons, correspond partiellement à l’image projetée. C’est pourquoi il faut lire la parabole en sachant relativiser le rêve qu’elle peut engendrer. C’est d’ailleurs ce qu’ont fait les deux premières générations chrétiennes. À ce propos, saint Paul s’est rapidement montré conscient des contraintes auxquelles était soumise la semence qu’était la Parole de Dieu. Contraintes internes et externes à la fois. Contraintes internes d’abord : Paul constatait, au sein des jeunes communautés qu’il avait fondées, des dérives théologiques, des relâchements moraux et même des scandales. Contraintes externes aussi du fait que les jeunes communautés faisaient la pénible expérience de persécutions épisodiques planifiées par des entités juives ou païennes. Les conséquences étaient évidentes : les nouvelles communautés connaissaient, le plus souvent, une croissance lente, une croissance qui n’avait rien d’explosif.
Or, malgré les lenteurs observées et même les échecs encaissés, saint Paul et les autres apôtres n’ont pas cessé de proposer le Christ Jésus et son Évangile. Ils ont agi de la sorte car ils avaient la conviction que Dieu, finalement, assurerait une fécondité réelle à leur travail d’évangélisation, que Dieu mènerait à terme son projet de salut.
Aujourd’hui, nous devons le reconnaître, alors même que nous sommes plongés dans des conditions socioreligieuses lourdes à porter, étouffantes même, des chrétiens et chrétiennes (une minorité à tout le moins) manifestent la même attitude de confiance que les premiers apôtres. Ils continuent de croire que l’Évangile doit être offert le plus ouvertement possible aux gens qui les entourent, et ce, même si ces derniers se montrent peu intéressés. Ils savent par exemple qu’au Québec, plus de 40 % des citoyens et citoyennes de moins de 50 ans se disent sans appartenance concrète à une institution religieuse officielle. Ce constat ne leur enlève pas la conviction que l’Esprit du Seigneur est toujours à l’œuvre et qu’il va faire croître la graine de moutarde qu’eux vont semer. Pour appuyer leur vision, ils tiennent compte des conversions d’adultes, jeunes et moins jeunes, que l’on observe présentement sur le terrain, au Québec.
À propos de croissance évangélique, rappelons ici que le Royaume de Dieu déborde de beaucoup les frontières des communautés chrétiennes concrètes. L’action de l’Esprit Saint travaille mystérieusement toute notre humanité. Ce qui est visible ne rend pas compte de toute la réalité. Pour cette raison, nous sommes invités à vivre avec l’assurance que proposer le Christ Jésus n’est jamais vain, et ce, même si nous ne voyons pas les effets de nos interventions. C’est Dieu, le premier, qui rejoint les cœurs et les transforme.
Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.
PRIÈRE
Dieu éternel et tout-puissant,
comme l’enseigne l’Esprit Saint,
nous pouvons déjà t’appeler du nom de Père ;
fais grandir en nos cœurs l’esprit d’adoption filiale,
afin que nous soyons capables d’entrer un jour
dans l’héritage qui nous est promis.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.