Homélie, lundi de la 24ème semaine du Temps ordinaire

16 septembre 2024

Donner pour faire vivre

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous parle des communautés de sœurs dominicaines qui œuvrent en Irak pour la population musulmane dans le besoin, gratuitement, à la manière de Jésus.

Homélie

La guérison de l’esclave du centurion romain est, aux yeux des exégètes, un miracle tout à fait singulier. Pour justifier leur point de vue, ils relèvent les points suivants. En premier lieu, Jésus ne rencontre pas l’esclave malade, il ne lui parle pas et ne le touche pas. Tout se fait à distance. Ce n’est pas tout : le centurion qui implore la guérison de son esclave ne se présente pas en personne devant Jésus. Lui, un païen, il choisit d’envoyer des notables juifs faire la demande de guérison à sa place. Il se sent indigne. Mais on devine bien que le centurion, grâce à ses contacts dans la petite ville de Capharnaüm, avait entendu parler du guérisseur Jésus et de sa puissance. En contrepartie, Jésus est informé, par les notables, que le centurion païen est un homme bon qui se soucie vraiment de la vie de son esclave. Ces derniers l’informent d’ailleurs de la confiance surprenante que ce païen manifeste à son endroit. À ce point que Jésus reconnaît en lui un modèle exemplaire de croyant. Touché par cette confiance, Jésus guérit l’esclave à distance. Une surprise nous attend : le récit s’arrête là, abruptement, après l’annonce de la guérison. Aucune allusion, dans le récit, à une possible volonté de la part du centurion de se faire disciple de Jésus. Silence révélateur. Tout laisse croire que cet « homme de bonne volonté », profondément humain, a continué sa carrière dans l’armée romaine. Et Jésus, pour sa part, ne demande pas de retour. Guérison gratuite, réalisée pour le bien de l’esclave et de son maître.

Nous ne pouvons pas entendre ce récit sans penser à un grand nombre d’entreprises missionnaires de l’Église qui ont œuvré et qui œuvrent encore aujourd’hui à la manière de Jésus. En présence de malades ou face à des situations sociales détériorées ou en regard de besoins criants d’éducation, des communautés religieuses en particulier se sont investies sans demander quoi que ce soit en retour, sauf la permission de faire du bien, de venir en aide aux personnes et collectivités dans le besoin.

Dernièrement, j’apprenais que les sœurs dominicaines présentes en Irak pendant plus d’un siècle, avaient pu, à partir de 2018, y reprendre leurs engagements apostoliques. En 2014, face aux violences destructrices du mouvement islamiste Daech, elles avaient dû se cacher ou s’exiler. Puis, à partir de 2017, avec le rétablissement d’une certaine sécurité, elles ont repris leurs missions à Bagdad et à Qaraqosh en particulier. À Bagdad, leur Hôpital St-Rafaël accueille maintenant, chaque année, environ 30 000 malades, soit pour des consultations ou de courts séjours. Les religieuses tiennent à ce que les pauvres y soient tout aussi bien traités que les gens fortunés. En parallèle, ces dernières dirigent, à côté de leur hôpital, une école mixte qui comprend le primaire et le secondaire. La grande majorité des étudiants et étudiantes sont musulmans. Puis, du côté de Qaraqosh, les sœurs dominicaines, en recevant l’appui de diverses ONG étrangères, ont pu rebâtir une école qui accueille présentement 600 élèves. Comme il reste moins de 150 000 chrétiens en Irak sur une population de 45 millions d’habitants, on comprend que les divers services offerts visent avant tout la population musulmane. Ce qui frappe au niveau du personnel religieux, c’est de savoir que de jeunes religieuses, originaires d’Irak, travaillent étroitement avec des religieuses âgées (plusieurs étant d’origine française). Ces dernières ont porté le flambeau de l’espérance au cœur du drame qu’a vécu la population. Elles ont gardé ouvertes les portes de la charité.

Donner gratuitement, à la manière de Jésus, voilà ce qu’ont fait et que font ces religieuses dominicaines. Leur présence est un signe de la fécondité actuelle de l’Évangile. Donner pour faire vivre, donner pour faire grandir. Un tel témoignage interpelle, car il porte la marque du Christ Jésus. Puissions-nous nous réjouir, en tant que baptisés, de ces sœurs qui incarnent la générosité du Seigneur. En elles, l’Esprit Saint s’est pleinement manifesté.

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
tu as donné à ton peuple,
dans les bienheureux Corneille et Cyprien,
des pasteurs dévoués et d’invincibles martyrs ;
par leur intercession,
fortifie notre courage et notre foi,
et accorde-nous de travailler avec empressement
pour l’unité de l’Église.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.