20 mai 2024
Marie, Mère de l'Église
En cette journée dédiée à la Bienheureuse Vierge Marie, Mère de l’Église, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous explique comment et pourquoi la mère de Jésus a reçu ce titre seulement récemment, un titre ajouté à une liste déjà très longue.
LIVRE DES ACTES DES APÔTRES (1, 12-14)
Les Apôtres, après avoir vu Jésus s’en aller vers le ciel, retournèrent à Jérusalem depuis le lieu-dit « mont des Oliviers » qui en est proche, – la distance de marche ne dépasse pas ce qui est permis le jour du sabbat. À leur arrivée, ils montèrent dans la chambre haute où ils se tenaient habituellement ; c’était Pierre, Jean, Jacques et André, Philippe et Thomas, Barthélemy et Matthieu, Jacques fils d’Alphée, Simon le Zélote, et Jude fils de Jacques. Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie la mère de Jésus, et avec ses frères.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT JEAN (19, 25-27)
En ce temps-là, près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie Madeleine. Jésus, voyant sa mère, et près d’elle le disciple qu’il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils. » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère. » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui.
Homélie
Depuis 2018, la Vierge Marie porte un nouveau titre dans la liturgie de l’Église catholique, celui de Mère de l’Église. Cela peut surprendre, car la Vierge Marie était déjà surchargée de titres. Au long des siècles, les autorités de l’Église ont en effet intégré beaucoup de titres pour décrire les rôles ou les fonctions que Marie a pu assumer dans la vie de l’Église. La religion populaire a aussi imaginé bien des particularités. À propos de titres, je donne quelques exemples : Marie mère de Dieu, Marie lumière des peuples, Marie mère de la charité, Marie mère de la miséricorde, Marie Siège de la Sagesse, Marie Reine de la paix, Marie Reine des affligés, Marie Reine du Bon Conseil. À ces titres, il faut ajouter ceux qui sont liés à des lieux d’apparition ou à des lieux de pèlerinage : la Vierge de Fatima, la Vierge de Guadalupe, la Vierge de Lourdes, la Vierge de Medjugorje, etc.
À l’occasion du Concile Vatican II, les évêques qui y étaient présents ont promulgué, le 21 novembre 1964, la constitution dogmatique sur l’Église. Le dernier chapitre de ce document (le 8e) était consacré à la Vierge Marie. Les Pères du Concile étaient conscients de la profusion de titres déjà accordés à Marie. Or, ces derniers, après discussion, décidèrent de ne pas donner à Marie le titre de « Mère de l’Église ». Ils voulaient éviter les confusions théologiques et spirituelles. En effet, Marie est le modèle de l’Église, mais elle en est aussi une fille, elle marche avec nous, comme la première en chemin. Elle est le prototype de ce lieu du salut qu’est l’Église. Elle est donc une femme sauvée comme les autres… par Jésus, le seul Rédempteur, même si ce don lui est fait dès le premier instant de sa conception par une grâce venant déjà de la mort de son Fils. À ce propos, retenons qu’au milieu du XXe siècle la dévotion populaire, du moins dans certains milieux, accordait à Marie un rôle plus important que celui accordé au Christ Jésus lui-même. C’est elle qui devenait, aux yeux de bien des personnes dévotes, la porteuse du salut espéré. Il y avait là un excès réel à ne pas encourager.
En regard de ce contexte, les Pères du Concile ont donc pris une décision qui se voulait prudente, et ce, dans le but de ne pas porter atteinte à l’unique médiation de Jésus dans le mystère du salut. Ils ont opté pour la sobriété dans l’attribution de titres accordés à Marie.
Or, cette crainte d’engendrer la confusion dans l’esprit des fidèles avec l’ajout du titre Mère de l’Église, les papes qui sont venus après le Concile Vatican II ne l’ont pas éprouvée. Au contraire. Le pape Paul VI lui-même, au moment de clôturer la 3e session du concile en 1964, a parlé de Marie comme étant la Mère de l’Église. Le pape Jean-Paul II a fait de même par la suite, et à bien des reprises. Ce n’est donc pas sans surprise que le nouveau titre a été proclamé en 2018. Le courant de pensée cherchant à maximiser ce qui pouvait être dit de Marie au cœur du mystère de la foi l’a emporté sur l’autre courant, plus incarnationiste celui-là, qui voulait plutôt mettre en lumière l’appartenance de Marie à l’humanité commune du Peuple Dieu.
Bref, retenons que Marie est un modèle dans l’ordre de la foi, de la charité et de la parfaite union au Christ. Elle illustre le chemin ecclésial : elle est passée de l’humilité de sa condition ici-bas à la gloire du ciel. En la priant, sachons que le discours sur Marie s’inscrit dans une longue tradition qui repose sur la Révélation. En la priant, retenons que l’honneur attribué à Marie lui vient de son Fils, sauveur du monde..
Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.
PRIÈRE
Dieu, Père de toute miséricorde,
ton Fils unique, cloué sur la croix,
a voulu que la bienheureuse Vierge Marie, sa Mère,
soit aussi notre mère ;
accorde à ton Église, soutenue par son amour,
la joie de donner naissance à des enfants toujours plus nombreux,
de les voir grandir en sainteté
et d’attirer à elle toutes les familles des peuples.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.