Homélie, dimanche, 3ème semaine de Pâques

14 avril 2024

C'est bien moi !

En ce troisième dimanche de Pâques, Sylvie Latreille, L.O.P., nous dit que, malgré notre potentielle difficulté à faire le lien entre Jésus de Nazareth et le Christ Ressuscité, celui-ci nous demande tout de même de faire un saut de foi et de le reconnaître de par les traces qu’il a laissées sur le monde et celles que le monde a laissées sur lui.

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Homélie

Dites-moi, qu’est-ce que ça va prendre aux onze Apôtres et aux disciples pour reconnaître Jésus le Christ Ressuscité? Ce n’est pas la première fois que le Seigneur leur apparaît.

Qu’advient-il du témoignage des disciples d’Emmaüs, le cœur brûlant à l’ouverture de leur intelligence à l’Écriture et à la fraction du pain?

Qu’advient-il de la joie des apôtres lorsque Jésus se manifeste au milieu d’eux et leur dit « Que la paix soit avec vous » en leur présentant ses mains et son côté? C’était le huitième jour.

Qu’advient-il de la confession de foi de Thomas « Mon Seigneur et mon Dieu » à la vue de ses mains et de son côté? C’était huit jours plus tard.

Qu’advient-il de l’annonce de Marie de Magdala après avoir vu le Seigneur au petit matin de Pâques? « J’ai vu le Seigneur. » C’était le premier jour.

Le Seigneur Jésus ne se décourage pas devant la lenteur des siens à le reconnaître comme étant le Christ Ressuscité. Il se manifeste à nouveau. Il leur dit à nouveau : « La paix soit avec vous ». Frayeur et crainte sont encore au rendez-vous. Mais il est bien là au milieu d’eux.

En effet, les apôtres sont confrontés à l’inconcevable, à l’incompréhensible. Ils ont de la difficulté à établir le lien entre le Christ Ressuscité et le Jésus qu’ils ont connu.

« Voyez mes mains et mes pieds. C’est bien moi ! »

Comme le souligne le commentateur, ses mains sont porteuses de vie et ses pieds l’ont conduit à proclamer le Royaume de Dieu. Les apôtres étaient avec lui parcourant les chemins de la Galilée jusqu’à Jérusalem. Ils l’ont vu à l’œuvre guérissant les malades, annonçant la Bonne Nouvelle, libérant des esprits du mal. Ses mains sont porteuses de vie.

Jésus n’a-t-il pas tendu la main à Pierre face à la violence des vents sur les eaux du lac lui reprochant son peu de foi? Ils l’ont vu imposer ses mains pour guérir l’aveugle-né, le sourd-muet, la belle-mère de Pierre.

Et combien d’autres! De ses mains, il a béni les enfants qui venaient vers lui. Il a rompu les pains et les a donnés à ses disciples pour nourrir la foule dans le désert.

Jésus a posé des gestes de salut et de miséricorde en annonçant la Bonne Nouvelle aux personnes les plus démunies. C’est ainsi que la parole prophétique de Jean le Baptiste s’actualise. « Le Père aime le Fils et il a tout remis en sa main, celui qui croit au Fils a la vie éternelle. » (Jn 3,35) En présentant ses mains, Jésus se donne à reconnaître aux Apôtres. Il est au milieu d’eux, lui, le Ressuscité de Pâques.

Ses pieds ne l’ont-ils pas conduit à proclamer le Royaume de Dieu? Il gravit la montagne pour prier son Père, pour enseigner les Béatitudes à la foule assoiffée de ses paroles, pour manifester la Gloire à venir lors de la transfiguration.

C’est bien à ses pieds que des gens vinrent déposer des personnes malades comme le rapporte l’évangéliste Matthieu au chapitre 15. Il les guérit. Les apôtres ont été témoins de l’émerveillement de la foule voyant des muets parler, des estropiés devenir valides, des boiteux marcher droit et des aveugles recouvrer la vue. Comme le mentionne le commentateur, déposer quelqu’un aux pieds de Jésus, c’est le lui confier pleinement, en quête de guérison, en quête de miséricorde, en quête de salut.

De nombreuses personnes se sont jetées aux pieds de Jésus. Par exemple, cette mère syro-phénicienne demande à Jésus de chasser le démon hors de sa fille en se jetant à ses pieds. Dans la tradition de l’évangéliste Luc, la guérison d’une étrangère annonce l’évangélisation des païens et leur place au repas du Seigneur. Un autre exemple. Marie de Béthanie tombe aux pieds de Jésus en pleurant la mort de son frère Lazare. « Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort. » (Jn 11,32b) Précédemment, Marie s’est assise aux pieds de Jésus se faisant reprocher par sa sœur Marthe de ne pas l’aider au service de la maison. Chez l’évangéliste Luc, s’asseoir aux pieds de Jésus représente l’attitude du disciple.

Il y a quelques jours à peine, c’est elle, Marie, qui a oint les pieds de Jésus avec un parfum de nard de grand prix. (Jn 12, 3) Il y a quelques jours à peine, c’est lui, Jésus, qui a lavé les pieds de ses Apôtres au cours du dernier repas. (Jn 13, 3b-5)

Comme il est difficile pour les Onze de reconnaître Jésus de Nazareth, leur Rabbi, dans le Ressuscité qui se tient au milieu d’eux. L’expérience unique de l’improbable, l’inconcevable, l’inimaginable est là sous leurs yeux. Il leur dit : « Pourquoi êtes-vous bouleversés? Voyez mes mains et mes pieds : c’est bien moi ! Touchez-moi, regardez. »

Tout comme pour les disciples d’Emmaüs, le Seigneur ne se décourage pas. Il leur rappelle la parole qu’il leur avait dite quand il était encore avec eux : « Il faut que s’accomplisse tout ce qui a été écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes ». Combien de fois, Pierre a réagi fortement à l’annonce de cet accomplissement. Combien de fois, les apôtres n’ont pas compris la venue prochaine des événements que Jésus leur annonçait en marchant vers Jérusalem.

Alors, à nouveau, il ouvre leur intelligence à la compréhension des Écritures. « Le Christ souffrirait, ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, la conversion serait proclamée en son nom, le pardon des péchés serait accordé à toutes les nations, en commençant par Jérusalem. »

C’est ainsi que, dans la première lecture tirée des Actes des apôtres, nous retrouvons Pierre à Jérusalem. Il proclame devant le peuple la mort et la résurrection du Christ, le Messie de Dieu. Il rappelle à son auditoire que « Dieu a accompli ce qu’il avait annoncé d’avance par la bouche des prophètes. » Pierre confesse que Dieu est ressuscité d’entre les morts, le Prince de la Vie. Enfin, il jaillit de sa bouche, ce que le Ressuscité leur avait demandé : « Nous en sommes témoins. » Pierre reconnaît publiquement le lien entre le Christ Ressuscité et le Jésus que les apôtres et les disciples ont connu. L’inconcevable, l’incompréhensible, s’effacent car « rien n’est impossible à Dieu. » (Lc 1, 37)

C’est comme un saut dans la foi que demande le Seigneur aux siens. Entre vous et moi, n’est-ce pas ce qui nous est demandé à nous aussi aujourd’hui? À travers nos doutes, nos craintes et nos peurs, comment l’expérience des disciples peut-elle nous soutenir dans nos cheminements de foi? Vous savez, la relation communautaire et fraternelle que vous vivez au Centre est un soutien indispensable pour « sauter dans la foi » au Christ Ressuscité.

Le Seigneur nous donne une piste pour nous aider à approfondir et à témoigner de notre foi, encore aujourd’hui. Ouvrir nos intelligences à la compréhension des Écritures. Au CéDum, vous portez votre attention à la Parole de Dieu et à sa compréhension. Des activités sont en lien direct avec la Parole. Que ce soit la Lectio Divina, le Parcours Alpha ou Une tasse de thé-ologie.

Il nous est parfois difficile de faire le lien entre le Christ ressuscité et le Jésus de Nazareth dévoilé par les évangélistes dans leurs évangiles. Peu importe l’âge que nous avons. Nous réunir autour de la table de l’Eucharistie, écouter la Parole de Dieu, chanter d’un seul chœur avec la chorale crée ce lien afin de reconnaître le Ressuscité de Pâques. « C’est bien moi ! Touchez-moi, regardez… » Je suis au milieu de vous.

Sylvie Latreille, L.O.P.

 

PRIÈRE

Garde à ton peuple sa joie, Seigneur Dieu,
car tu renouvelles la jeunesse de son âme ;
il se réjouit d’avoir retrouvé la gloire de l’adoption filiale :
qu’il attende désormais le jour de la résurrection,
dans la ferme espérance du bonheur que tu donnes.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.