Homélie, mardi de l’Octave pascale B

2 avril 2024

La première envoyée

Aujourd’hui, le frère André Descôteaux, O.P., nous invite à prendre en exemple Marie Madeleine qui a su passer d’un deuil profond à une nouvelle relation au Ressuscité basée sur la foi, le témoignage, un amour encore plus profond et une connexion par l’Esprit du Dieu Vivant.

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Homélie

Marie-Madeleine ne se résigne pas à la mort de Jésus. Elle l’avait suivi et lui était profondément attachée. Contrairement à tant d’autres dont Pierre et la majorité des disciples, elle était restée fidèle. Elle avait été là au pied de la croix. Elle avait été là quand on l’avait descendu de la croix. Elle était encore là quand on l’avait déposé au tombeau. Que serait sa vie sans son Jésus? Non seulement il était mort, mais il était disparu. Il faut avoir vécu un deuil pour la comprendre. Déjà la mort est difficile, s’il faut y ajouter la perte de la dépouille! Cette disparition rend encore plus aigu ce besoin qu’elle éprouve d’une relation immédiate avec Jésus, fût-il mort.

Aveuglée qu’elle est par sa peine, elle ne reconnaît pas Jésus qui vient à elle. Cette méprise montre que la Résurrection de Jésus n’est pas une simple réanimation. Jésus ne bénéficie pas d’une prolongation exceptionnelle de vie comme Lazare qui, éventuellement, mourra. Le Crucifié ne vit plus désormais dans le monde, il est retourné vers le Père. De ce fait, le corps historique du Christ a bel et bien disparu. Marie n’a pas tort, mais elle ne cherche pas au bon endroit. Et c’est justement son Maître et ami qui va lui permettre de découvrir quelle nouvelle relation sa résurrection lui permet d’établir avec le Ressuscité. S’il y a une manière de vivre avec le Seigneur qui n’est plus possible, une autre s’ouvre.

C’est justement le Ressuscité qui va lui dessiller les yeux. Il le fera par la parole, n’est-ce pas étrange? Et pas n’importe laquelle. Son nom, comme le bon pasteur qui appelle chacune de ses brebis par son nom et dont la voix est reconnue par elles. Jésus aurait bien pu lui dire : ‘C’est moi le Ressuscité, tu ne me reconnais pas?’. Il aurait bien pu lui dévoiler son identité. Mais non, il l’appelle, elle! En l’appelant, il recrée et transforme radicalement le lien qui les unissait. C’est toujours le Maître et Marie, mais autrement, car il la libère d’un intimisme qui n’a plus sa place en l’ouvrant à l’amour du Père et des frères tout en permettant une relation d’amour vécue dans l’Esprit avec son Seigneur.

En reconnaissant le Ressuscité, elle découvre qui elle peut devenir, qui elle est appelée à être. Il lui faut lâcher les pieds du Ressuscité. Encore une fois, un certain type de relation n’est plus possible avec lui. Marie l’a compris. Elle fait le saut, celui de la foi et accepte de rejoindre l’amour sans frontière que son Seigneur lui propose. D’ailleurs au lien physique entre deux êtres qui ne peut être que temporaire et éphémère est substituée une communion que rien ne pourra détruire, car le Seigneur a vaincu la mort.

Tout en devant surmonter l’épreuve de la distance que la mort impose, la relation entre Marie et Jésus devient plus vivante que jamais. Elle ne repose plus sur le souvenir qu’elle peut garder dans son cœur ou sur un cadavre pourrissant dans un tombeau, mais sur l’accueil du Vivant dans l’Esprit.

Cette nouvelle vie avec le Ressuscité n’est pas pour elle seule. C’est encore le Ressuscité qui le lui fera comprendre en l’envoyant annoncer la grande nouvelle à ses frères que le Seigneur monte vers son Dieu et leur Dieu, vers son Père et leur Père. Elle, enfermée dans sa peine, devient la première envoyée!

Quel parcours! Quelle femme! Il n’est pas surprenant que la Tradition ait désigné Marie Madeleine, comme l’apôtre des Apôtres. Elle est la première qui a annoncé la Bonne Nouvelle de la Résurrection. Une petite parenthèse. Il y a quelques années, à l’émission ‘Dessine-moi un dimanche’, à ici Première de Radio-Canada, le bibliste Sébastien Doane que certains, ici, connaissent bien, affirmait que ‘sans femmes, il n’y a pas de Pâques’!

Au-delà de cette question, l’itinéraire de Marie-Madeleine nous ramène au nôtre. Contrairement à elle, nous n’avons pas connu physiquement Jésus. Et jamais, nous le connaîtrons ainsi, en ce monde! Notre relation avec le Seigneur se vit, il faut l’admettre et ne pas avoir peur de l’avouer, sous le registre de l’absence. Par contre, nous nous rejoignons, car, comme elle, nous sommes appelés par le Seigneur par notre nom et nous l’avons tous été d’une manière bien officielle, le jour de notre baptême. Appelés, nous sommes, comme elle, invités à entrer dans une relation vivante et amoureuse avec le Ressuscité pour partager la communion de vie avec son Dieu et notre Dieu, avec son Père et notre Père. Finalement, nous sommes nous aussi envoyés vers nos frères et sœurs pour être témoins de la Bonne Nouvelle du Christ ressuscité.

Fr. André Descôteaux, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
tu nous guéris par les célébrations pascales ;
poursuis toujours l’œuvre de ta grâce :
que ton peuple trouve une liberté parfaite
et parvienne à la joie du ciel
dont il exulte déjà sur la terre..
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.