1er avril 2024
Une lecture de foi
En ce lundi de l’Octave pascale, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous invite à écouter les témoins de foi tels que les femmes qui ont cru en la résurrection de Jésus, ainsi que les personnes, de plus en plus nombreuses, qui décident de se faire baptiser à l’âge adulte.

LIVRE DES ACTES DES APÔTRES (2, 14.22b-33)
Le jour de la Pentecôte, Pierre, debout avec les onze autres Apôtres, éleva la voix et leur fit cette déclaration : « Vous, Juifs, et vous tous qui résidez à Jérusalem, sachez bien ceci, prêtez l’oreille à mes paroles. Il s’agit de Jésus le Nazaréen, homme que Dieu a accrédité auprès de vous en accomplissant par lui des miracles, des prodiges et des signes au milieu de vous, comme vous le savez vous-mêmes.
« Cet homme, livré selon le dessein bien arrêté et la prescience de Dieu, vous l’avez supprimé en le clouant sur le bois par la main des impies. Mais Dieu l’a ressuscité en le délivrant des douleurs de la mort, car il n’était pas possible qu’elle le retienne en son pouvoir.
« En effet, c’est de lui que parle David dans le psaume : Je voyais le Seigneur devant moi sans relâche : il est à ma droite, je suis inébranlable. C’est pourquoi mon cœur est en fête, et ma langue exulte de joie ; ma chair elle-même reposera dans l’espérance : tu ne peux m’abandonner au séjour des morts ni laisser ton fidèle voir la corruption. Tu m’as appris des chemins de vie, tu me rempliras d’allégresse par ta présence.
« Frères, il est permis de vous dire avec assurance, au sujet du patriarche David, qu’il est mort, qu’il a été enseveli, et que son tombeau est encore aujourd’hui chez nous. Comme il était prophète, il savait que Dieu lui avait juré de faire asseoir sur son trône un homme issu de lui. Il a vu d’avance la résurrection du Christ, dont il a parlé ainsi : Il n’a pas été abandonné à la mort, et sa chair n’a pas vu la corruption.
« Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous tous, nous en sommes témoins. Élevé par la droite de Dieu, il a reçu du Père l’Esprit Saint qui était promis, et il l’a répandu sur nous, ainsi que vous le voyez et l’entendez. »
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT MATTHIEU (28, 8-15)
En ce temps-là, quand les femmes eurent entendu les paroles de l’ange, vite, elles quittèrent le tombeau, remplies à la fois de crainte et d’une grande joie, et elles coururent porter la nouvelle à ses disciples. Et voici que Jésus vint à leur rencontre et leur dit : « Je vous salue. » Elles s’approchèrent, lui saisirent les pieds et se prosternèrent devant lui.
Alors Jésus leur dit : « Soyez sans crainte, allez annoncer à mes frères qu’ils doivent se rendre en Galilée : c’est là qu’ils me verront. »
Tandis qu’elles étaient en chemin, quelques-uns des gardes allèrent en ville annoncer aux grands prêtres tout ce qui s’était passé. Ceux-ci, après s’être réunis avec les anciens et avoir tenu conseil, donnèrent aux soldats une forte somme en disant : « Voici ce que vous direz : “Ses disciples sont venus voler le corps, la nuit pendant que nous dormions.” Et si tout cela vient aux oreilles du gouverneur, nous lui expliquerons la chose, et nous vous éviterons tout ennui. »
Les soldats prirent l’argent et suivirent les instructions. Et cette explication s’est propagée chez les Juifs jusqu’à aujourd’hui.
Homélie
Le jour de Pâques au matin, les femmes accourues au tombeau de Jésus ainsi que les gardes chargés de faire la surveillance du lieu rapportent un événement imprévu et inexplicable : la dépouille de Jésus est mystérieusement disparue. Tant les gardes que les femmes disciples de Jésus sont troublés. Que s’est-il donc passé? L’évangéliste présente deux lectures de l’événement qui a jeté dans le désarroi. Il y a celle des gardes. C’est une lecture très terre à terre : le tombeau était vide, le corps avait disparu ; nous n’avons rien vu ni entendu. Les grands prêtres reprennent cette information et concluent que les disciples de Jésus ont simplement volé le corps de leur maître. Pour les grands prêtres, la nouvelle s’arrêtait là. Mais il en est allé tout autrement pour les femmes disciples de Jésus. Elles ont fait, elles, une « lecture de foi » qui allait bien au-delà de la nouvelle du tombeau vide.
De fait, ces femmes qui avaient suivi Jésus, qui avaient assisté à certains de ses miracles, qui avaient entendu son enseignement, étaient ouvertes à une réalité qui dépassait leur entendement. Surtout, elles croyaient que Jésus était un envoyé de Dieu. En présence de l’inimaginable et de l’inexplicable, elles ont accueilli le message de l’ange : « Il est ressuscité comme il l’avait dit ». (Mt 28,6) Elles ont donc cru que Dieu avait pu faire passer Jésus de la mort à la Vie. C’est donc avec une joie profonde qu’elles ont accueilli la manifestation de Jésus ressuscité. Et elles n’ont pas hésité à transmettre par la suite le message qu’il leur avait confié : « Soyez sans crainte, allez annoncer à mes frères qu’ils doivent se rendre en Galilée : c’est là qu’ils me verront ». (Mt 28, 10)
Aujourd’hui, en rappelant l’expérience spirituelle unique de ces femmes, nous venons reconnaître, dans un premier temps, toute l’importance de leur témoignage. Nous venons aussi reconnaître que des hommes et des femmes d’aujourd’hui vivent une expérience spirituelle semblable à la leur : celle d’accueillir Jésus, le Christ ressuscité, comme celui qui mène à la vie en plénitude. À ce propos, il est opportun de rappeler un phénomène paradoxal observé dans les communautés catholiques d’Occident. Depuis quelques décennies, alors que nous assistons à une descente vertigineuse des baptêmes d’enfants, nous observons une croissance du nombre de baptêmes d’adultes. Des hommes et des femmes choisissent, parfois tardivement, de se faire baptiser, et ce, après avoir réfléchi sur les questions existentielles liées au sens de la vie et s’être engagés dans une démarche catéchuménale. Ces adultes en viennent, à leur tour, à faire une « lecture de foi » du parcours historique de Jésus. N’est-ce pas ce à quoi nous assistons dans plusieurs pays d’Europe et au Canada? Depuis au moins deux décennies, on assiste à l’augmentation progressive du nombre de baptêmes d’adultes. Phénomène qui demeure encore marginal mais qui intrigue. Il intrigue d’autant plus que ce phénomène est observé dans des pays qui expérimentent depuis quelques décennies une déchristianisation prononcée. En effet, l’engagement à suivre le Christ n’est pas du tout encouragé, socialement parlant, dans plusieurs pays occidentaux. Et pourtant. Au cours de la nuit pascale de cette année, 515 adultes, de 18 à 70 ans, ont été baptisés dans le diocèse de Paris et un peu plus de 7000 dans l’Église de France. Dans le diocèse de Montréal, on enregistre, à l’occasion de la veillée pascale, entre 150 et 200 baptêmes d’adultes depuis quelques années.
En cette période pascale, nous sommes invités à nous réjouir – comme les femmes accourues au tombeau – de la révélation extraordinaire qu’est la résurrection de Jésus. Cette résurrection fait saisir que nos vies sont appelées à une destinée qui dépasse tout à fait notre imagination. Nous réalisons de la sorte que nous sommes faits pour partager, à la suite de Jésus, la vie de Dieu. Et c’est ce qu’ont compris tous les adultes qui se sont engagés dans une démarche catéchuménale les menant à la célébration de leur baptême à Pâques.
Que l’eucharistie que nous allons partager nous donne la soif de vivre de manière toujours plus intime avec le Christ vivant !
Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.
PRIÈRE
Seigneur Dieu,
tu fais grandir sans cesse ton Église
en lui donnant de nouveaux enfants ;
accorde-leur de te servir
et d’être fidèles par toute leur vie
au sacrement qu’ils ont reçu dans la foi.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.