Homélie, mardi, 1ère semaine du Carême

20 février 2024

Notre Père ...

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., adresse la question délicate des prières que Dieu n’exauce pas et nous fait remarquer que même Jésus s’est un jour vu refuser une requête.
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Homélie

La réponse que Jésus donne à ses disciples à propos de la prière ne vise pas seulement le « comment prier » mais le « pourquoi prier ». Jésus invite d’abord les siens à ne pas prier à la manière des païens qui accumulent, à répétition, des prières. Et pour justifier cette consigne, il ajoute : « Votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant même que vous l’ayez demandé ». Cette consigne est toutefois déroutante pour nous. Car si Dieu connaît à l’avance nos besoins et nos aspirations, pourquoi alors le prier ? Ne perdons-nous pas notre temps à le faire? Et Dieu, pourquoi ne s’empresse-t-il pas de répondre rapidement à nos appels, à nos prières lorsque nous nous tournons vers lui ? Notre expérience de croyants et croyantes nous montrent bien que la plupart de nos demandes ne reçoivent pas les réponses positives souhaitées. De là nos déceptions dans notre expérience de la prière. Et pourtant, malgré la consigne que Jésus a donnée, nous continuons habituellement de nous tourner vers Dieu. Nous le faisons d’autant plus souvent que les situations dans lesquelles nous sommes plongés sont porteuses de souffrances physiques, psychiques et spirituelles. Le sentiment d’écrasement nous habite alors. Pleinement conscients de notre faiblesse, nous nous tournons vers Dieu avec confiance même si nous ne sommes pas du tout assurés que nos prières seront exaucées.

Remarquons ici que Jésus, après avoir dit que le Père connaissait nos besoins, s’est empressé de proposer à ses disciples la prière du « Notre Père ». Cela peut surprendre, car Jésus, en ce faisant, ne semble pas avoir agi de manière cohérente, logique. Pour comprendre son invitation à la prière, il peut être éclairant ici de revenir à sa propre prière alors qu’il se trouvait à Gethsémani, tout juste avant que Judas le trahisse et le livre aux autorités religieuses : « Père, si tu veux, écarte de moi cette coupe ! Pourtant, que ce ne soit pas ma volonté, mais la tienne qui se fasse ! » (Lc 22, 42). Nous le savons, la prière de Jésus n’a pas été exaucée. Il a dû emprunter le chemin de la croix qui l’a mené à une mort violente et dégradante. Sur la croix, il s’est d’ailleurs écrié : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27, 46) Ses paroles nous révèlent bien le désarroi profond qu’il a alors connu dans sa relation au Père. Que de chrétiens et chrétiennes, dans l’histoire de l’Église, sont passées par de telles expériences extrêmes. Non pas parce qu’ils l’avaient cherché, mais parce que les adversaires de la foi au Christ ont voulu se débarrasser d’eux en tant que témoins jugés indésirables.

Aujourd’hui, nous sommes invités à continuer de prier, mais pas d’abord dans l’espoir de voir nos besoins personnels être comblés, mais plutôt dans l’espérance que le Règne de Dieu prenne davantage racine dans le terreau de notre histoire humaine. En nous attachant au Christ Jésus, en l’imitant dans sa prière, nous saurons dire à Dieu: que ta volonté soit faite et non pas la nôtre. Ainsi serons-nous des collaborateurs et collaboratrices fidèles et efficaces dans l’avènement du Règne de Dieu. Le chemin à parcourir ne sera pas toujours consolant. Il sera même dépouillant à certains moments. Mais c’est ainsi qu’à la suite de Jésus nous marcherons vers la lumière éblouissante de la résurrection. Nos prières seront alors exaucées d’une manière bien plus impressionnante que celle que nous aurions pu imaginer.

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Regarde ta famille, Seigneur ;
et fais que notre esprit,
affiné par la discipline imposée à notre corps,
resplendisse à tes yeux du désir de te trouver.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.