Homélie, mardi, 6e semaine du Temps Ordinaire

13 février 2024

Un seul pain dans la barque

En ce mardi gras, le frère Yvon Pomerleau, O.P., nous explique que, face à l’adversité, Jésus fait réfléchir ses disciples sur leurs capacités d’observation, de commémoration et de compréhension pour leur faire reprendre confiance.
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Homélie

Pour un mardi gras, l’évangile d’aujourd’hui nous présente une situation inquiétante chez les disciples de Jésus : ils « avaient oublié d’emporter des pains : ils n’avaient qu’un seul pain avec eux dans la barque ». Espérons qu’il n’en sera pas de même à la table des Dominicains même si l’un ou l’autre frère végétarien ne rêve pas de viandes grasses pour fêter le mardi gras! L’intérêt de notre évangile me paraît être dans les multiples questions que Jésus adresse à ses disciples. J’ai relevé huit points d’interrogation dans le texte. Devant une situation difficile, une pénurie de pain, un manque de nourriture, Jésus interpelle les disciples sur leur manque de confiance. La confiance, pour un chrétien encore plus que pour un non croyant, repose sur trois piliers : l’observation, la commémoration et la compréhension. Encore une fois, le chiffre magique de trois!

Commençons par l’observation. « Vous avez des yeux et vous ne voyez pas, vous avez des oreilles et vous n’entendez pas! » Tout débute avec les sens, aussi bien dans l’évangile que dans la vie de tous les jours. Est-ce que nous sommes attentifs à ce qui se passe autour de nous, dans notre monde? Savons-nous voir la beauté de la nature en toutes saisons, même hivernale, entendre les cris de joie des enfants dans la cour d’école, voir les gestes de bonté et de générosité de nos proches? … Savons-nous aussi voir les misères de notre monde, entendre les pleurs des enfants malades et les cris des victimes de la guerre? … Savons-nous reconnaître les merveilles que Dieu accomplit, le pain qu’il multiplie chaque jour dans nos propres vies?

La commémoration est aussi une étape importante dans notre démarche de confiance. « Vous ne vous rappelez pas? » dit Jésus à ses disciples. « Quand j’ai rompu les cinq pains pour cinq mille personnes, combien avez-vous ramassé de paniers pleins de morceaux? » Se souvenir des événements heureux est une façon d’affronter les défis et les malheurs du présent. A plusieurs reprises, Dieu invite le peuple juif à se souvenir de ses interventions libératrices. En cherchant sur internet, j’ai trouvé plus d’une soixantaine de versets sur la pertinence du souvenir dans la vie. Notre célébration eucharistique est elle-même un mémorial de ce qui est pour nous la source principale de notre espérance, de notre confiance, la victoire de Jésus sur le mal et sur la mort.

Enfin, Jésus appelle ses disciples à la compréhension. « Vous ne comprenez pas encore? », leur dit-il à deux reprises. Il ne suffit pas d’avoir des yeux et des oreilles pour comprendre, il faut encore être attentif et chercher à comprendre. La compréhension est plus qu’une affaire des sens, elle relève d’un cœur sensible. « Vous avez le cœur endurci ». Jésus multiplie les signes de sa bienveillance. La générosité de Dieu est sans mesure. Il rompt les pains pour nourrir cinq mille personnes. Sommes-nous capables d’interpréter les signes d’amour, de générosité, de tendresse et de miséricorde de Dieu dans le quotidien de nos vies?

Gardons en tête les interpellations de Jésus à ses disciples : « Vous ne comprenez pas encore? », « Vous avez le cœur endurci », « Vous ne vous rappelez-pas? » … Ne nous inquiétons pas trop du seul pain que nous avons dans la barque et réjouissons-nous des sept corbeilles pleines! Bon mardi gras!

Fr. Yvon Pomerleau, O.P.

 

PRIÈRE

Dieu de l’univers,
de qui vient tout don parfait,
enracine en nos cœurs l’amour de ton nom ;
augmente notre foi pour développer ce qui est bon en nous ;
veille sur nous avec sollicitude
pour protéger ce que tu as fait grandir.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.