1er janvier 2024
Le plus beau est au devant de nous!
LIVRE DES NOMBRES (6, 22-27)
Le Seigneur parla à Moïse. Il dit : « Parle à Aaron et à ses fils. Tu leur diras : Voici en quels termes vous bénirez les fils d’Israël : “Que le Seigneur te bénisse et te garde ! Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il te prenne en grâce ! Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix !” Ils invoqueront ainsi mon nom sur les fils d’Israël, et moi, je les bénirai. »
LETTRE DE SAINT PAUL APÔTRE AUX GALATES (4, 4-7)
Frères, lorsqu’est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme et soumis à la loi de Moïse, afin de racheter ceux qui étaient soumis à la Loi et pour que nous soyons adoptés comme fils. Et voici la preuve que vous êtes des fils : Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, et cet Esprit crie « Abba! », c’est-à-dire : Père ! Ainsi tu n’es plus esclave, mais fils, et puisque tu es fils, tu es aussi héritier : c’est l’œuvre de Dieu.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT LUC (2, 16-21)
En ce temps-là, les bergers se hâtèrent d’aller à Bethléem, et ils découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire. Après avoir vu, ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé au sujet de cet enfant. Et tous ceux qui entendirent s’étonnaient de ce que leur racontaient les bergers. Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur. Les bergers repartirent; ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, selon ce qui leur avait été annoncé.
Quand fut arrivé le huitième jour, celui de la circoncision, l’enfant reçut le nom de Jésus, le nom que l’ange lui avait donné avant sa conception.
Homélie
Depuis 6 heures, hier matin, nous voyons des images des festivités du Nouvel An, le tout débutant en Nouvelle-Zélande. De fuseau horaire en fuseau horaire, des foules se rassemblent pour accueillir l’An nouveau. Ainsi, à Montréal, les gens se sont réunis dans le Vieux-Montréal. Même si nous n’étions pas parmi les fêtards, cela ne nous a peut-être pas empêchés d’écouter le Bye Bye et de partager un réveillon avec des proches. Depuis quelques jours, nous sommes dans l’ambiance de la fête, nous souhaitant la bonne année avec généralement des vœux de bonheur et de santé.
Ces coutumes peuvent surprendre. En effet, à part d’un changement de calendrier, qu’y a-t-il de vraiment nouveau? La vie se poursuit avec son lot de joies et d’épreuves. « Rien de neuf sous le soleil » dirait Ben Sirac le Sage. Pourtant nous persistions d’année en année. Même quotidiennement par nos « bonjours », « bonne soirée » ou « bonne nuit », nous ne cessons de nous souhaiter du bien. Ne sommes-nous pas un peu prétentieux, car contrôlons-nous l’avenir? Nous pouvons prévoir certains événements, mais il y a tellement d’imprévus que nos souhaits traduisent, en réalité, une ambition beaucoup plus modeste « pourvu que rien de trop grave ne t’arrive ».
Nous ne savons que trop que l’avenir rêvé s’accomplit rarement comme nous l’avions espéré. Combien d’espoirs réalisés pour combien d’espoirs frustrés? L’espoir se révèle souvent comme une immense illusion que ce soit sur le plan personnel ou social et politique. Nous savons bien que les belles promesses des politiciens ne sont souvent que pure fumisterie! Que reste-t-il de nos idéaux de paix, de justice, d’une planète propre où chaque citoyen responsable viserait le bien de la maison commune? Malgré tous les beaux discours sur les progrès de la technique et les promesses de l’Intelligence artificielle, l’injustice est toujours là. Si la guerre change de forme avec la nouvelle technologie, elle ne perd rien en violence et en cruauté. Au contraire!
Et pourtant, au plus profond de nous-mêmes, nous sommes convaincus qu’un « monde sans espoir est irrespirable », comme le disait le grand écrivain Malraux. Ne dit-on pas que « tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir » ? L’espoir est vital pour l’être humain. Et voilà que nous, chrétiens et chrétiennes, sommes porteurs d’une grande et magnifique espérance. Malgré nos épreuves, malgré l’état souvent affligeant de notre planète, nous avons l’audace d’espérer. Car notre raison d’espérer n’est pas en nous. Elle est en cet enfant de la crèche, cet enfant né de la femme, pour reprendre saint Paul. Si tout enfant est source d’espérance, plus encore cet enfant qui s’appelle Jésus dont le nom signifie : Dieu sauve.
Nous savons que Dieu existe, mais, en Jésus, nous savons que nous existons pour Dieu. Dieu s’approche de nous pour se donner à nous au point d’être notre Père et de nous adopter comme ses enfants. « Lorsque vint la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils pour nous adopter comme fils. Il a envoyé son Esprit qui crie en nous Abba pour faire de nous des héritiers avec le Christ ».
C’est la foi en cette présence et cet engagement vital de Dieu en Jésus qui nous permet d’espérer. Notre histoire et celle de notre monde progressent sur la ligne du temps vers un but, vers la communion de Dieu qui sera « tout en tous ». Ce que nous appelons le salut se réalise dans le temps. Il s’est fait passé, présent et avenir. Le passé est donné par le gage irréversible de l’envoi de Jésus qui meurt sous Ponce Pilate et ressuscite. Le présent est habité par le don de l’Esprit qui nous fait vivre jour après jour dans l’amitié et la communion divine. L’avenir est ouvert grâce à la promesse du retour du Christ à la fin des temps, de la résurrection des morts et de la vie éternelle.
Nous voyons bien que l’espérance est une vertu théologale qui se fonde en Dieu et qui nous conduit vers notre bonheur en lui. Ce n’est pas une raison pour rester les bras croisés comme si rien ne dépendait de nous. Nous sommes appelés, au nom même de cette espérance, à travailler à l’avenir de ce monde. Nous pourrons en souffrir, le monde étant ce qu’il est, mais comme le rappelait, dans une récente entrevue, le frère Timothy Radcliffe, « Oui, nous serons blessés, mais le Seigneur ressuscité est apparu aux disciples et leur a montré ses blessures. Nous sommes les frères et sœurs de notre Seigneur blessé, et nos blessures sont le signe que nous avons osé vivre et partager son espérance. »
L’espérance n’est pas que pour nous, elle doit briller dans le monde plein de contradictions. Nous devons être des signes d’espérance. Le père Michel Proulx, qui a enseigné l’exégèse à l’Institut de Pastorale, et qui, dans quelques jours, sera ordonné évêque du diocèse de Bathurst, rapportait une rencontre avec un frère, atteint de la maladie de Parkinson. Celui-ci était déprimé, sa maladie ayant malheureusement progressé. Le père Michel se demandait bien quoi lui dire pour l’encourager. Les « ne vous en faites pas, ça ira mieux demain » n’avaient aucun sens. Inspiré, il lui parle de la condition de ressuscité qui l’attendait. Je laisse ici la parole à Mgr Proulx : « C’est alors que j’ai vu une grosse larme couler sur sa joue. Et me serrant la main avec toute l’énergie dont il était encore capable, il me dit : ‘Merci, Père Michel. Mes souffrances avaient tellement accaparé mon attention que j’en avais complètement oublié mon avenir de ressuscité. Ma situation présente m’avait rendu aveugle par rapport à l’espérance que nous apporte la résurrection de notre Seigneur Jésus.’ Ensemble, nous venions de passer ce qui semblait, à vue humaine, une voie sans issue. Oui, le plus beau est en avant ».
Dans ce chemin vers l’avant, rayonne, dans notre nuit, une étoile, Marie, que nous célébrons aujourd’hui. Souvent elle est invoquée comme l’Étoile de la Mer, Stella Maris, étoile qui guide, la nuit, les marins pour qu’ils arrivent à bon port. Concluant son encyclique sur l’espérance, Benoît XVI écrivait : « par ton oui, Marie, l’espérance des millénaires devenait réalité et entrait dans ce monde et dans notre histoire. Par ta course joyeuse chez ta cousine Élisabeth, tu devenais l’image de l’Église à venir qui porte l’espérance dans son sein. Au pied de la Croix, alors que tu entendais ton Fils te dire : ‘Femme, voici ton Fils’, dans la foi, résonnaient ces paroles de l’Ange : ‘Sois sans crainte, Marie’ et encore ‘son règne n’aura pas de fin’. Dans cette foi, dans l’obscurité du Samedi Saint, tu étais habitée par la certitude de l’espérance. Au jour de la Pentecôte, tu étais au milieu des disciples, comme leur Mère, comme Mère de l’espérance. Sainte Marie, Mère de Dieu, notre Mère, enseigne-nous à croire, à espérer et à aimer avec toi. Indique-nous le chemin vers son règne. Étoile de la mer, brille sur nous et conduis-nous sur notre route ». Amen.
Fr. André Descôteaux, O.P.
PRIÈRE
Dieu tout-puissant,
par la maternité virginale de la bienheureuse Marie,
tu as offert au genre humain les trésors du salut éternel ;
accorde-nous de sentir qu’intervient en notre faveur celle
qui nous permit d’accueillir l’auteur de la vie,
Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur.
Lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.