Homélie, lundi, 3e semaine de l’Avent

Dans la foi, nous croyons que Dieu compte sur les croyants et croyantes pour réaliser son plan de salut. La bible est d’ailleurs remplie de récits où des hommes et des femmes ont été appelés à devenir ses collaborateurs et collaboratrices. Force est de constater cependant que, le plus souvent, il prend par surprise les personnes à qui il veut confier une mission particulière. Ses demandes surprennent, dérangent, déstabilisent les personnes appelées. Nous le voyons bien avec les figures prophétiques. Mais cela se vérifie aussi avec des croyants et croyantes qui ont des rôles plus discrets.

Pensons ici à Joseph, l’époux de Marie. La liturgie du jour nous présente le récit du désarroi que la demande du Seigneur a provoqué dans son projet de vie. Il est facile d’imaginer que Joseph, avant d’apprendre que Marie était enceinte, se voyait mener une vie discrète à Nazareth. Tout devait paraître assez simple : avec Marie, il bâtirait une famille et il continuerait d’être au service des gens du milieu par le biais de son travail d’artisan. Or, tout a basculé quand il a appris que sa fiancée était enceinte. Le drame, c’est qu’il n’était pas impliqué dans la conception de l’enfant. Surprise et déception pour lui. D’où sa décision de répudier en secret sa fiancée. Cette information concernant la situation de Marie le bousculait vraiment. Et c’est au cœur de cette situation de crise intérieure que Dieu l’a rejoint. Dans un rêve, un ange lui a appris que Dieu avait besoin de lui pour accomplir son dessein de salut. Il ne lui a pas demandé de disparaître de la scène, mais plutôt de s’engager carrément dans le projet divin en prenant Marie chez lui. De la sorte, Joseph offrirait à l’enfant-à-venir un statut légal ainsi que l’appartenance à la lignée de David, celle de la Promesse.

Nous constatons ici que Dieu invite Joseph à opérer un véritable retournement dans sa vie, à la fois un retournement affectif et spirituel. Dans la foi, il doit d’abord consentir à croire que l’enfant que porte Marie vient bien de l’Esprit Saint; ensuite il doit accueillir publiquement Marie comme son épouse. Projet qui se révélerait fort exigeant. Cela signifiait qu’il aurait à vivre dans le mystère jusqu’à la fin de ses jours : « Marie enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » Cet enfant qu’il allait accueillir avec sa mère, il était, selon le contenu de son rêve, destiné à sauver le peuple. Mais Joseph n’aura pas de signe, par la suite, pour l’assurer que cette promesse se réaliserait. Selon la tradition, il est mort avant même que Jésus commence son ministère. C’est dire que Dieu a demandé à Joseph d’entrer dans une aventure qui le dépassait totalement. Il se devait de plonger dans la foi sans exiger de voir le résultat de la promesse entendue.

Que de chrétiens et chrétiennes ont vécu des engagements qui peuvent ressembler, d’une certaine façon, à celui de Joseph. Je pense en particulier ici aux couples chrétiens qui ont pris au sérieux la mission d’être des signes de l’amour de Dieu pour leurs enfants. Ils ont cherché à être des témoins de cet amour qui sait soutenir, qui sait écouter, qui sait faire miséricorde. Les résultats qu’ils ont observés au long des années n’ont pas toujours été ceux qu’ils espéraient. Des réussites, il y en a eu. Ils ont ainsi pu se réjouir de voir que certains de leurs enfants se laissaient habiter par le souffle de l’Évangile. Dans d’autres cas, ils n’ont pas eu la possibilité de voir des signes manifestant que leurs missions avaient porté les fruits espérés. Pour une part, ils ont marché dans la pénombre de la foi.

Tout comme Joseph, nous sommes nous aussi appelés, à travers les méandres de la vie, à accueillir les appels de retournement que Dieu nous fait entendre à travers les événements de la vie. Nous sommes appelés à accepter de ne pas toujours voir les résultats de nos collaborations au plan du salut de Dieu. Malgré ce fait, que le Seigneur nous donne la force de toujours lui faire confiance !

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

PRIÈRE

Nous t’en prions, Dieu tout-puissant :
nous ployons sous le joug du péché
qui depuis longtemps nous réduit en esclavage,
accorde-nous d’être délivrés,
nous qui attendons la naissance incomparable de ton Fils unique.
Lui qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.