Homélie, lundi, 1ère semaine de l’Avent

4 décembre 2023

Pas de frontière

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous rappelle de prendre exemple sur Jésus qui défie les conventions sociales pour honorer l’espérance, l’humilité et la compassion d’un païen, quelqu’un qui, au premier abord, n’est pas en alliance avec Dieu le Père.
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Homélie

Nous savons qu’il y a toujours des frontières à respecter entre les collectivités qui sont différentes aux plans ethnique, religieux et politique. Ce respect des frontières permet de maintenir des relations non-conflictuelles entre groupes et individus appartenant à l’une ou l’autre de ces collectivités. Au temps de Jésus, de telles frontières existaient. Pensons par exemple aux frontières politiques et culturelles, à l’intérieur de l’empire romain, entre les vrais citoyens romains et les étrangers qui profitaient, eux, de droits limités. Relevons aussi les frontières religieuses entre les pratiquants de la religion impériale officielle et les gens des régions militairement conquises qui tenaient à se rattacher à des traditions religieuses propres à leur région. Ces diverses frontières étaient cependant source d’incompréhension et de tension dans les rapports entre les collectivités.

Or, dans le récit évangélique du jour, nous constatons – avec surprise – que ces frontières n’ont pas été respectées, ni par le centurion romain ni par Jésus. Et de fait, c’est le centurion romain qui a pris l’initiative de rompre ces frontières. Lui, un homme qui représentait le pouvoir politique et militaire de Rome et qui, selon toute probabilité, reconnaissait son empereur comme un être divin, s’est permis de faire une demande démesurée, extravagante même, au thaumaturge juif qu’était Jésus : celle de guérir à distance son serviteur gravement malade. En contrepartie, notons que Jésus, lui, n’a pas rejeté la demande de ce païen. Les pharisiens et les scribes auraient refusé une telle demande provenant d’un païen. Jésus, au contraire, a répondu positivement à cette dernière. Il l’a fait même si l’officier de l’armée impériale avait des croyances qui ne correspondaient pas du tout aux siennes. Quelle distance en effet entre la vision du Royaume de Dieu portée par Jésus et la vision religieuse du centurion ! Une telle distance manifestait bien que Jésus et l’officier romain étaient des étrangers l’un pour l’autre. Pourtant, une réelle solidarité s’est manifestée chez l’un et l’autre. Devant le mal, devant la maladie, Jésus a très bien perçu la compassion que cet homme avait à l’endroit de son serviteur malade. Il a été touché par cette compassion ainsi que par l’humilité exprimée. Ce centurion n’a-t-il pas dit: « Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais dis seulement une parole et mon serviteur sera guéri. »

Par son comportement, Jésus a remis ouvertement en question les frontières sociale et religieuse existantes entre lui, le juif, et l’officier païen. Il a clairement indiqué que la bienveillance de Dieu était universelle : « Beaucoup viendront de l’Orient et de l’Occident et prendront place avec Abraham, Isaac et Jacob au festin du Royaume des cieux » (Mt 8,11). En d’autres mots, devant le mal, devant la souffrance, Jésus a rappelé à ses disciples qu’ils devaient toujours être des témoins d’un amour du prochain qui n’a pas de frontière. Ils devaient en conséquence s’opposer à l’érection de murs ou de barrières dans leurs rapports avec des personnes et des groupes qui ne partageaient pas leur vision du monde.

L’évangile du jour vient donc nous inciter à favoriser, dans notre société, la collaboration avec des non-chrétiens et des non-croyants. De cette façon, il sera possible de goûter à la solidarité et à la fraternité dans la lutte contre le mal. C’est ainsi que l’espérance du Royaume de Dieu en gestation prendra consistance.

Puisse notre Eucharistie nous aider à adopter les attitudes rencontrées tant chez le centurion que chez Jésus!

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur notre Dieu,
nous t’en prions :
accorde-nous d’attendre sans faiblir la venue de ton Fils,
pour qu’au jour où il viendra frapper à notre porte,
il nous trouve vigilants dans la prière,
joyeux de chanter sa louange.
Lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.