3 novembre 2023
Laisser l'Évangile façonner la vie
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LETTRE DE SAINT PAUL APÔTRE AUX ROMAINS (9, 1-5)
Frères, c’est la vérité que je dis dans le Christ, je ne mens pas, ma conscience m’en rend témoignage dans l’Esprit Saint : j’ai dans le cœur une grande tristesse, une douleur incessante. Moi-même, pour les Juifs, mes frères de race, je souhaiterais être anathème, séparé du Christ : ils sont en effet Israélites, ils ont l’adoption, la gloire, les alliances, la législation, le culte, les promesses de Dieu ; ils ont les patriarches, et c’est de leur race que le Christ est né, lui qui est au-dessus de tout, Dieu béni pour les siècles. Amen.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT MATTHIEU (11, 25-30)
En ce temps-là, Jésus prit la parole et dit : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. Oui, Père, tu l’as voulu ainsi dans ta bienveillance.
Tout m’a été remis par mon Père ; personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler. « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme. Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. »
Homélie
En faisant mémoire aujourd’hui du frère coopérateur Martin de Porrès, nous pouvons affirmer qu’il a progressivement fait sienne la parole de Jésus : « Mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger ». En rappelant qu’il est entré chez les Dominicains, à Lima au Pérou, en 1602, à l’âge de 23 ans, on peut cependant imaginer que son parcours a connu des périodes humainement difficiles. Voici pourquoi : il était un métis, un fils naturel né d’un chevalier espagnol et d’une ancienne esclave noire. Au départ, il était donc socialement marginalisé. Mais cette situation personnelle lui a permis de comprendre en profondeur les souffrances des gens de son milieu. Parmi les souffrants de cette ville alors prospère grâce au commerce de l’or et de l’argent, il faut d’abord retenir les autochtones incas. Ils constituaient alors, au tournant de l’an 1600, la majorité de la population de la ville. Il faut aussi prendre en compte la population métissée, composée de descendants de soldats espagnols et de femmes incas. Tout ce monde des non-reconnus et des non-valorisés au plan social était sensiblement à part : les Incas étaient toujours vus comme des « vaincus » au regard des autorités politiques et économiques et traités comme tels. Les métis, eux, n’étaient que partiellement intégrés dans la société, car la population d’origine espagnole avait tendance à les mépriser.
C’est dans cet univers pluraliste, raciste, marqué par des inégalités sociales très prononcées que Martin de Porrès va progressivement apprendre à laisser l’Évangile façonner sa vie et ses engagements. Il a tenu à faire sien le joug du Christ Jésus. En faisant cette option, il a non seulement fait l’expérience de la croix, mais il a surtout connu la fécondité extraordinaire de l’Évangile. Si sa vie personnelle a été marquée par la souffrance, son engagement en faveur des méprisés et des marginalisés lui a fait expérimenter la joie liée au service des autres. Le pape Jean XXIII, dans son homélie prononcée lors de la canonisation du frère Martin de Porrès en 1962, s’est exprimé ainsi : « Il pardonnait les plus violentes injures ». Et le pape ajouta, faisant allusion cette fois à la période de rayonnement évangélique du frère Martin dans sa ville : « Aux plus pauvres, il fournissait nourriture, vêtements, remèdes. Aux paysans et aux hommes de couleur (…) considérés alors comme une masse d’esclaves méprisables, il apportait le réconfort de tous les secours et de toutes les attentions dont il était capable. C’est au point qu’il mérita d’être appelé couramment ‘Martin de la charité’ ».
Martin de Porrès a laissé un témoignage de vie et d’engagement que les chrétiens et chrétiennes de Lima n’ont pas oublié. Leur admiration à son endroit les conduit encore à célébrer en grande pompe, tous les ans, l’anniversaire de sa mort. Ils reconnaissent qu’il a très bien incarné dans sa vie active et contemplative la confiance mise dans le Christ Jésus. Lui, il a non seulement entendu la parole de Jésus, mais il a amené des milliers de personnes à accueillir cette même parole : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos ».
Que l’Eucharistie que nous allons partager nous soutienne dans notre volonté de faire fidèlement confiance à l’Esprit de Jésus!
Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.
PRIÈRE
Dieu qui as conduit saint Martin de Porrès
jusqu’à la gloire du ciel
par les chemins de l’humilité ;
donne-nous de suivre son exemple,
pour être admis avec lui près de toi.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.