Homélie, dimanche, 28ème semaine du Temps Ordinaire

15 octobre 2023

Un vrai repas

En ce dimanche soir, le frère José Apolinário Kahombo, O.P., nous explique que la parabole du jour vise à nous faire réaliser l’universalité de l’invitation au Royaume de Dieu.
un-repas-pour-tous

Homélie

En ce vingt-huitième dimanche du temps ordinaire, les lectures qui nous sont proposées, directement ou indirectement, nous placent au cœur de l’un des thèmes les plus récurrents dans l’enseignement de Jésus : le Royaume des Cieux. Mais au lieu de nous présenter le Royaume par moyen de la vigne comme ce fut le cas dans d’autres paraboles, c’est par le truchement d’un festin nuptial. Ainsi, pour faire écho à l’Évangile, la première lecture, tirée du livre du prophète Isaïe, nous parle aussi d’un festin. Essayons donc de comprendre cette analogie du Royaume que Jésus fait avec le festin nuptial.

Il faut remarquer que cette parabole est précédée par deux autres paraboles que nous avons lues ces deux derniers dimanches, à savoir la parabole des deux enfants et la parabole des vignerons homicides. Mais contrairement aux deux paraboles antérieures, la parabole du festin nuptial ne porte pas sur le fils. Elle met plutôt l’accent sur le refus de l’invitation par les premiers invités et sur l’extension de cette même invitation à un groupe plus large et hétérogène pour ne pas dire éclectique.

Pour comprendre ou saisir la portée de cette parabole, il nous faut revenir sur l’ordre des événements tels qu’ils nous sont rapportés par l’évangéliste Matthieu : à qui Jésus s’adresse-t-il ? Aux grands prêtres et aux pharisiens. Et qui sont les pharisiens et les grands prêtres ? Ce sont des gens qui dans le judaïsme ancien avaient affaire à l’application et à l’accomplissement de la loi. Au départ, ce sont donc des gens qui avaient une idée très légaliste du Salut. C’est précisément pour cette raison que Jésus leur a très souvent reproché de ne pas voir à quel point leurs excès de zèle, leurs abus de pouvoir, leur observance stricte ne laissaient aucune place à la miséricorde et faisaient d’eux des pécheurs. Et pour cette même raison aujourd’hui Jésus se trouve à nouveau en position d’opposition avec eux, d’où la parabole du festin nuptial.

Il parait donc clair qu’avec la parabole du festin nuptial, Jésus cherche à éclairer d’un jour nouveau la question de la félicité messianique, c’est-à-dire le salut et ses destinataires. Pour ce faire, Jésus compare le Royaume des cieux à un roi qui a organisé un festin de noce pour son fils.

Si l’on situe chacun des intervenants et des moments de cette fête nuptiale dans la perspective d’une théologie sotériologique, on comprend dès lors que le roi (l’hôte du festin) préfigure l’image de Dieu ; le festin de noces, la félicité messianique, est le Royaume de Dieu ; le fils du roi, c’est Jésus le Messie ; les envoyés, quant à eux, sont les prophètes, les apôtres et tous leurs successeurs ; les invités qui les négligent ou les outragent sont les Juifs ; et finalement, ceux qu’on appelle de la rue et des carrefours sont les pécheurs et les païens.

Je disais ci-dessus que, contrairement aux paraboles des deux derniers dimanches, dans la parabole d’aujourd’hui, l’accent ne porte pas sur le fils, mais plutôt sur le refus de l’invitation par les premiers invités et surtout sur l’extension de cette invitation à un groupe plus large et hétérogène. C’est précisément sur cette dernière catégorie d’invités que l’évangéliste Matthieu veut attirer notre attention, car au détriment de ceux à qui l’invitation était destinée en premier lieu, Jésus étend cette même invitation à un groupe de personnes complètement inattendu à la cérémonie : « Allez donc [dit-il] aux croisées des chemins : tous ceux que vous trouverez, invitez-les à la noce [les mauvais comme les bons]. »

Il est à remarquer que cette catégorie d’invités s’aligne parfaitement avec ces autres invités au Royaume dont Jésus nous faisait part il y a deux semaines, lorsqu’il disait : “[…] les publicains et les prostituées vous précèdent dans le Royaume de Dieu”.

Le message de Jésus est donc un message que se veut non seulement inclusif, mais surtout d’une portée universelle.

L’inclusion et la solidarité universelle sont tout ce dont notre monde a besoin aujourd’hui. Nous vivons dans des sociétés extrêmement compartimentées, polarisées et cloisonnées, où les catégories socioculturelle, politique, spirituelle ou religieuse, morale et éthique, font de nous de véritables étrangers au message de Christ. Or, c’est justement pour briser le mur de la haine (comme l’affirme l’épître aux Éphésiens 2, 14) que Christ est venu.

En tant qu’Église, nous sommes invités, dit le pape François, « à rejoindre les carrefours d’aujourd’hui, c’est-à-dire les périphéries géographiques et existentielles de l’humanité, ces lieux en marge, ces situations où campent et vivent des lambeaux d’humanité sans espérance. Il s’agit de ne pas se contenter des voies confortables et habituelles de l’évangélisation et du témoignage de charité, mais d’ouvrir les portes de nos cœurs et de nos communautés à tous ». Voilà la mission qui nous incombe, celui de porter le Royaume des Cieux aux périphéries.

Comment parvenons-nous à ce stade de notre devoir de baptisés? Comment pouvons-nous franchir les frontières non seulement physiques, mais aussi intérieures de nos vies individuelles et collectives ? Comment abreuvons-nous notre soif d’espérance et d’amour? Où allons chercher du réconfort lorsque la tristesse nous envahit ?
Saint Paul dans l’épître aux

Éphésiens nous en donne la formule : « Je peux tout en celui qui me donne la force. » Cet élan de foi, de grâce et du don total de soi s’inscrit dans le prolongement de ce que Jésus disait ailleurs : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire. » (Jn 15, 5)

Fr. José Apolinário Kahombo, O.P.

 

PRIÈRE

Nous t’en prions, Seigneur,
que ta grâce nous devance
et qu’elle nous accompagne toujours,
pour nous rendre attentifs à faire le bien sans relâche.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.