23 septembre 2023
Un frère coopérateur, un vrai!
LIVRE DU PROPHÈTE ISAÏE (25, 6a. 7-9)
Le Seigneur de l’univers préparera pour tous les peuples, sur sa montagne, un festin de viandes grasses et de vins capiteux, un festin de viandes succulentes et de vins décantés. Sur cette montagne, il fera disparaître le voile de deuil qui enveloppe tous les peuples et le linceul qui couvre toutes les nations. Il fera disparaître la mort pour toujours. Le Seigneur Dieu essuiera les larmes sur tous les visages, et par toute la terre il effacera l’humiliation de son peuple. Le Seigneur a parlé.
Et ce jour-là, on dira : « Voici notre Dieu, en lui nous espérions, et il nous a sauvés ; c’est lui le Seigneur, en lui nous espérions ; exultons, réjouissons-nous : il nous a sauvés ! »
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT JEAN (3, 16-17)
En ce temps-là, Jésus parlait avec Nicodème en disant : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. »
Homélie
Ces dernières années, surtout depuis son entrée à Basile-Moreau, j’ai pu beaucoup échanger avec le frère Fernand. Nous nous parlions plusieurs fois au téléphone par semaine.
Fernand était un homme direct et qui à l’occasion ne se privait pas d’une remarque ou d’une interpellation. Quand je suis arrivé après mon élection comme prieur de ce couvent il y a quelques années, il m’a souhaité la bienvenue et m’a dit : « mets-toi au blanc ». Comme j’étais habillé en laïc. Je croyais qu’il voulait me dire « met ta tunique ». Je me suis dit : ça commence bien ! Je me fais parler !
Pour ceux et celles qui connaissent moins bien le couvent, il faut savoir que près de la porterie il y a un tableau qui indique après votre nom si nous sommes présents au couvent, en blanc, si nous sommes dans la ville, en jaune, ou en dehors de la ville en rouge. Mets-toi au blanc, ça voulait tout simplement dire : indique que tu es dans le couvent. Pour sa part, le frère Fernand était le plus souvent au blanc, assidu à la prière et aux activités communautaires. Il était vraiment présent. Malgré son grand attachement au couvent de Saint-Albert-le-Grand, c’est en toute liberté qu’il a pris la décision de le quitter pour la résidence Basile-Moreau. La proximité d’avec le couvent lui a permis d’y faire de fréquentes visites. Il s’est aussi rendu utile au provincialat, déchiquetant des monceaux de documents au moment où nous faisions le ménage dans les archives.
On pouvait rire de Fernand et avec Fernand. Le jour où il a atteint ses 75 ans j’ai fait une intention de prière pour lui. J’ai dit : « prions pour Fernand qui dans 10 ans aura 85 ans. » Éclat de rire communautaire et Fernand aussi l’a trouvé bonne.
Durant les dernières années, Fernand prenait ses vacances annuelles au chalet du lac de l’Achigan avec son grand ami le frère Bernard Fortin et le frère Luc Hamel. Durant leurs vacances, j’allais chaque année les visiter. Fernand que j’appelais le frère supérieur organisait tout et dans le moindre détail. Il pouvait m’appeler et me dire : « pourrais-tu acheter des côtelettes d’agneaux du Québec (pas de l’Australie pu de la Nouvelle-Zélande) et nous les faire cuire sur le BBQ ? » Je le faisais et c’était tout un défi de les faire cuire devant le grand chef cuisinier qu’était Bernard Fortin.
Il avait déjà 90 ans et était responsable du chalet provincial. Il prévoyait tout : quand il faudrait repeindre le chalet, l’extérieur et l’intérieur, faire déneiger le toit, nettoyer la cheminée du feu de foyer. Il sollicitait des membres de sa famille pour faire installer des barres de soutien dans la chambre des toilettes, etc….
Fernand se préoccupait des membres de sa famille et des frères mais peu de lui-même. On ne l’entendait pas se plaindre.
Des frères, dont Gilles Simard, m’ont confié que Fernand avait été un important soutien pour eux dans leur vocation. Est-ce que le frère Mathieu Vézina a obtenu le travail qu’il convoitait à Toronto, m’a-t-il demandé il y a une quinzaine de jours ?
Fernand aimait savoir ce qui se passait dans la province dominicaine. Il était généralement au courant de tout et s’intéressait à l’actualité des frères, leur santé, leur ministère. Il avait le souci de la communauté. Indifférent à rien, attentif à tous y compris les plus jeunes.
Fernand était un organisateur d’élections. Au couvent où il était assigné et où il fallait élire un prieur, il faisait le tour des frères et leur demandait « Que penses-tu d’un tel comme prieur. S’il ne passe pas, penses-tu que tel autre frère nous ferait un bon prieur ? » Il était aussi très intéressé par les élections priorales des autres couvents.
Fernand savait reconnaître et avouer ses erreurs. Alors que le chalet appartenait à la maison de la rue Saint-Denis où j’étais le supérieur, Fernand, mon cher Fernand avait coupé un petit arbre sur le terrain que j’aimais bien et que lui ne trouvait pas à place. Vous savez la vie communautaire a ses charmes ! Je lui avais demandé : « Fernand, le petit arbre qui était là n’y est plus. » et lui simplement d’avouer : « je l’ai coupé. »
Fernand a été portier dans plusieurs couvents ici au pays et même au États-Unis. Le portier est très important. C’est la première image que nous donnons. Le frère Fernand était un modèle de portier. Très allumé, de service, prompt, efficace et affable.
Fernand a vécu les dernières années de sa vie à la Maison Basile-Moreau et il y a été heureux. La belle coopération entre nous les Dominicains et les religieux CSC y est pour quelque chose. Cette collaboration s’exerce à plusieurs niveaux.
Fernand était un homme de prière, fidèle tant à la prière commune qu’à la prière individuelle. Il croyait en Dieu et comme nous l’avons entendu dans l’Évangile de ce jour ‘tout homme qui croit en lui, ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle`. Et aussi comme nous le dit Isaïe : ‘en lui espérons, exultons, réjouissons-nous : car il nous a sauvés`.
François Pouliot m’écrivait en réaction à son décès : « Fernand Sénécal, toute une légende ». Oui, Fernand Sénécal : toute une légende pour notre province qui perd un grand collaborateur ici-bas, et en gagne sans doute un au ciel. Amen.
Fr. Bernard East, O.P.
PRIÈRE
Nous te prions, Dieu tout-puissant,
pour ton serviteur,
qui s’était engagé par amour du Christ
sur le chemin de la parfaite charité :
qu’il puisse exulter de joie au jour où tu révéleras ta gloire;
qu’il prenne part au bonheur éternel de ton Règne
en compagnie de tous ses frères.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur et notre Dieu,
qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.