Homélie, mercredi, 18ème semaine du Temps Ordinaire

9 août 2023

Le pain des enfants

Aujourd’hui, le frère Gustave Nsengiyumva, O.P., nous explique une réaction surprenante et quelque peu malaisante de Jésus en nous rappelant qu’il n’est pas un « distributeur » de miracles, mais un chercheur de relations vraies et profondes.
le-pain-des-enfants

Homélie

Nous avons ce matin un des passages des évangiles qui mettent plutôt mal à l’aise. Il y a dans l’attitude spontanée de Jésus un ‘‘je-ne-sais-quoi’’ qui ne cadre pas, qui crée un malaise, un peu comme si on ne reconnaissait pas ‘‘notre Jésus’’, celui qui guérit spontanément les lépreux, qui vole au secours de la femme surprise en flagrant délit d’adultère et qui est menacée de lapidation. Nous avons un Jésus qui se détourne d’une misère humaine, qui pourrait même à première vue déployer une certaine condescendance en parlant du pain des enfants à ne pas jeter aux petits chiens !

La réaction de Jésus n’est pas la seule à nous décoiffer! Avouons aussi que la réponse de cette femme étrangère, identifiée comme païenne, étonne autant que l’attitude de Jésus. Elle garde son sang-froid, n’en démord pas et va jusqu’à infliger à Jésus une riposte presque impertinente. Nous sommes en présence d’une femme qui n’a manifestement rien à perdre.

« Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël. » En fait, la réponse de Jésus signe surtout un refus d’une certaine toute-puissance qui consisterait à faire tout, partout, tout le temps comme un super-héros, sans aucun vis-à-vis personnel qui soit le ou la bénéficiaire de la mise en œuvre de sa puissance. L’attitude de Jésus donne plutôt place à l’autre : annoncer la bonne nouvelle du Royaume de Dieu de telle manière que les gens puissent répondre eux-mêmes.

La mission d’annonce du Royaume est reçue de Dieu son Père, Jésus ne se la donne pas. Il n’en dispose pas non plus à sa guise, à l’inverse des disciples prêts, pour ainsi dire, à se l’approprier et, aussi, à s’en défaire pour leur propre confort. « Donne-lui satisfaction » disent-ils à Jésus. Cela va, peut-être, contre notre image d’un Jésus qui donne presque tout le temps, un peu mécaniquement, ‘‘magiquement’’. Et ceci commande une véritable réflexion. Que serait une personne qui répondrait tout le temps, à tout, parfaitement, automatiquement. Aurions-nous envie de la rencontrer, de la découvrir, de comprendre ce qui l’anime. Aurait-elle-même quelque chose à nous dire ?

Jésus fait son chemin, en Israël comme en pays païens, en dialogue avec le Père, cherchant seulement à nouer de vraies et justes relations avec les autres, laissant surgir la liberté en lui et en l’autre. Son style montre la manière dont le Royaume peut avancer. Le Royaume de Dieu est ouvert à de vraies rencontres qui doivent donner à chacun de progresser, aussi bien Jésus que ceux qu’il rencontre.

Oui, Jésus oppose certes un silence à cette brave femme, dans un premier temps. Le silence de Dieu nous tourmente et nous mortifie parfois. Combien de fois nous sommes-nous plaints de ce silence! La Cananéenne, quant à elle, nous offre une belle leçon ainsi qu’un modèle: La foi de cette femme est grande car humainement située, pleinement ouverte vers l’autre, respectueuse, reconnaissante. Étant ainsi justement située, le miracle peut s’opérer de lui-même : « Que tout se fasse pour toi comme tu le veux ! ». Car la volonté juste de la femme, pourtant païenne, a le pouvoir de déplacer celle de Jésus.

Non, Jésus n’est pas indifférent à nos misères. Il désire simplement une rencontre vraie entre Son cœur et le nôtre, une rencontre dont jaillit le miracle de la guérison. À nous de montrer notre détermination toute humble à entrer dans le Royaume que Jésus offre aux ‘‘enfants de la maison’’ comme à ceux ‘‘du dehors’’, miracle d’amour et d’accueil pour toute l’humanité. Amen!

Fr. Gustave Nsengiyumva, O.P.

 

PRIÈRE

Dieu de nos pères,
tu as conduit la sainte martyre Thérèse-Bénédicte
à connaître ton Fils crucifié et à l’imiter jusque dans la mort ; par son intercession, accorde à tous de reconnaître
dans le Christ leur Sauveur et, grâce à lui,
de parvenir à te contempler pour l’éternité. Lui qui.
Lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.