Homélie, mardi, 18ème semaine du Temps Ordinaire

Ainsi se termine l’Évangile selon saint Matthieu. La scène est grandiose, car il ne s’agit plus du rabbi méprisé, condamné et crucifié, mais du Seigneur glorifié. « Tout pouvoir m’a été maintenant donné ». Il est entouré par ses disciples en vue d’une mission qu’il est sur le point de leur confier. Ils sont en Galilée, en cette Galilée des nations, où Jésus avait débuté sa mission. Aujourd’hui, ce sont les disciples qui débuteront la leur. Alors qu’avant sa résurrection, le Maître avait interdit aux Douze d’aller vers les païens, aujourd’hui ils reçoivent la mission d’aller vers toutes les nations pour qu’elles deviennent des disciples et pour que, par le baptême, elles deviennent fils et filles de l’unique famille de Dieu. Bien qu’il ne soit plus visible, il leur promet d’être toujours avec eux, jusqu’à la fin des temps.

C’est la fin de l’Évangile de Mathieu, mais c’est le début de la proclamation de la Bonne Nouvelle au monde entier. Depuis ce jour, cet appel du Seigneur n’a cessé de retentir. Parmi les grands messagers de la Parole, nous célébrons aujourd’hui saint Dominique. Lui aussi s’est senti appelé et il est parti proclamer la Bonne Nouvelle du salut.

Dans la vie des saints, nous aimons nous imaginer des interventions divines directes les mettant sur le bon chemin ou encore leur indiquant ce qu’était la volonté de Dieu. Pensons à Saint François qui reçoit les stigmates ou encore qui, à l’église de Saint-Damien, entend la voix du Crucifié lui demandant de reconstruire son église. Était-ce le cas pour saint Dominique? D’entrée de jeu, je vous dirai que je n’en suis pas convaincu.

Commençons par nous demander pourquoi il s’est retrouvé chez les cathares. Parce qu’il a entendu une Parole l’enjoignant de les convertir ou parce qu’il a eu une vision? Il est là tout simplement parce qu’il accompagne son évêque, Diègue, alors que lui est chanoine de son chapitre. Une mission a été confiée à l’évêque Diègue en vue de la conclusion d’un mariage entre le fils du roi avec une princesse du Danemark. Dès qu’ils eurent traversé les Pyrénées, les deux hommes de Dieu prennent conscience du grand nombre de chrétiens qui s’étaient détournés de la vraie foi. Leur ambassade complétée, ils souhaitent revenir dans la région de Toulouse. Ils sont habités par le feu de la mission. Devant les insuccès des légats envoyés officiellement par le pape, encombrés par leurs biens et leur suite, ils comprennent qu’ils devront parcourir ce pays en apôtres pauvres, partageant la vie des habitants du pays.

Et voilà que tous les deux arpenteront leur pays. Un jour, l’évêque devra quitter. Il laissera seul Dominique. Ce sera le moment du désert où l’endurance de Dominique sera mise à l’épreuve, mais ce sera éventuellement le moment où finalement l’intuition de son évêque Diego se réalisera : former une communauté, reprenant l’idéal de la vie des apôtres, pour annoncer la Bonne Nouvelle et baptiser toutes les nations.

Tout un cheminement a conduit Dominique vers la fondation de cette communauté de prêcheurs. Dominique a toujours été un homme d’Évangile. Il a été toujours été touché par la misère humaine. N’avait-il pas déjà vendu tous ses livres pour soulager son prochain de la famine? Dominique a toujours été un homme habité par le sens de la mission, par la nécessité de proclamer la Parole de Dieu qui veut être entendue et reçue. Parole de Dieu qu’il faisait sienne, la méditant jour et nuit. Il portait sur lui l’Évangile de Matthieu et les lettres de Paul. Dominique a toujours été un homme de prière qui, la nuit, ouvrait son cœur à l’amour et à la miséricorde de Dieu pour toutes les personnes qu’il avait rencontrées et qu’ils rencontreraient sur son chemin. Un homme compatissant de la compassion même de Dieu.

Saint Dominique n’a pas eu besoin d’illumination, car son regard était illuminé par l’Évangile et par la foi sur la réalité dans laquelle il était immergé. Il n’avait pas besoin de vision parce qu’il voyait avec les yeux du Christ. Ainsi, se retrouve-t-il avec des frères. Au moment où il commence à connaître le succès par le grand nombre de frères qui se joignent à lui, il prend le risque de les disperser, de les envoyer, comme le Seigneur, sur les routes du monde.

La célébration d’ouverture des JMJ de Lisbonne s’est terminée par des messages en très grosses lettres pour être vus par les centaines de milliers de jeunes présents. Le premier était très simple : GO! Non pas pour signifier ‘Gentil organisateur’ mais GO pour va, pars, proclame!

GO, voilà ce que le Seigneur nous demande. Voilà ce que Dominique a réalisé. Voilà ce qu’il souhaite pour ses frères et ses sœurs. GO! Nous avons nos doutes, comme certains apôtres du Seigneur, tel que le rappelle saint Matthieu. Nous pouvons être découragés, nous pouvons être désarçonnés par les changements dans la société, mais il nous est demandé de contempler, comme Dominique, l’Évangile, de voir le monde avec les yeux de Dieu et de l’aimer comme Dieu l’aime.

Oui, soyons habités par l’Évangile comme Dominique, soyons des hommes et des femmes priant comme lui pour que, comme lui, nous sachions oser une parole qui interpelle, une parole de vie. Ne l’oublions pas : le Seigneur est avec nous, jusqu’à la fin du monde. Amen.

Fr. André Descôteaux, O.P.

PRIÈRE

Permets, Seigneur,
éloigne de nous, dans ta bonté, tout ce qui nous arrête,
que ton Église trouve secours dans les mérites
et les enseignements de saint Dominique notre père :
qu’il intercède pour nous avec toute sa tendresse,
après avoir été un prédicateur éminent de ta vérité.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.