Homélie, mardi, 4ème semaine du Carême

21 mars 2023

Veux-tu être guéri?

Aujourd’hui, le frère André Descôteaux, O.P., adresse ce qui peut sembler être une contradiction dans l’attitude de Jésus lors de deux guérisons récentes dans l’évangile Jean, qui finalement se résout grâce à un texte de guérison dans l’évangile de Marc.
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Homélie

L’évangile de dimanche dernier commençait par cette question des disciples à la vue de l’aveugle de naissance « Qui a péché, est-ce lui ou ses parents pour qu’il soit né aveugle ? » La réponse de Jésus était claire : « Ni lui, ni ses parents n’ont péché »! Pourtant l’évangile de ce jour se termine par cette terrible injonction de Jésus au paralytique qu’il a lui-même guéri : « Te voilà guéri. Ne pèche plus, il pourrait t’arriver quelque chose de pire ».

Quel est ce pire? Jésus se contredit-il en associant la maladie à une conséquence du péché, comme un châtiment? Pour répondre à cette question, je me permettrais de faire appel à la guérison d’un paralytique par Jésus tel que rapporté par l’évangéliste Marc. Il y a tellement de monde dans la maison que pour rejoindre Jésus il faut le descendre par le toit. Que fait Jésus, en premier? Il le guérit? Non. Il lui dit : « Tes péchés sont pardonnés ». C’est par la suite, pour convaincre son auditoire qu’il pouvait remettre les péchés, qu’il ordonne au paralytique : « Lève-toi, prends ton grabat et marche! » La guérison devient le signe d’une guérison plus profonde, plus extraordinaire. Il peut se relever, car il est ressuscité à la vie nouvelle!

N’en serait-il pas de même pour le paralytique de notre Évangile? Jésus, comme dit un savant exégète, s’intéresserait au nouvel état de l’être-devenu-sain du paralysé. Il souhaite que la vie qu’il lui a donnée soit conservée. Ainsi, Jésus se situerait à un autre plan que celui de la santé physique, mais à celui de la relation entre le paralytique guéri et Dieu. Cette relation connaît un nouveau départ grâce à l’intervention miraculeuse de Jésus. Quelque chose de nouveau est advenu chez cet homme. Il marche maintenant, mais c’est toute une vie nouvelle qu’il lui reste à construire.

Cette vie nouvelle, c’est la vie en plénitude promise par le Christ Jésus. Plus besoin d’être plongé dans une piscine car du Christ coule cette eau qui guérit comme celle que le prophète Ézéchiel voit jaillissant du Temple. « En tout lieu où parvient cette eau, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Elle assainit tout ce qu’elle pénètre et la vie apparaît en tout lieu où elle passe ». Comment ne pas penser à l’eau du baptême qui fait revivre et qui continue encore à engendrer à la vie nouvelle tous ceux et toutes celles qui y sont plongés ?

Oui, il y a pire que vivre, seul dans son handicap, pendant 38 ans : c’est vivre loin de la source de vie, et, petit à petit, mourir asséché de la deuxième mort.

La question de Jésus au paralysé au début du récit, « Veux-tu être guéri? », peut paraître surprenante. Comment ne pas vouloir être guéri après avoir essayé pendant 38 ans de recouvrer la santé en se plongeant dans la piscine, sans succès, parce qu’arrivé trop tard? Pourtant, Jésus veut s’en assurer comme il nous demande à nous, ce matin, voulez-vous être guéris? Voulez-vous être sauvés? Voulez-vous être assainis par cette eau de la vie qui coule de moi, le nouveau Temple? Voulez-vous prendre le chemin de la vie nouvelle à ma suite en renonçant à vous-mêmes et en vous ouvrant au mystère d’amour de Dieu et de l’autre?

Combien de personnes vivent misérablement mais préfèrent leur misère à un changement aboutissant à une meilleure vie, à une libération?

C’est donc fort à propos qu’avant la profession de foi du baptême, le futur baptisé est invité à renoncer au péché et à vivre dans l’égoïsme. « Pour vivre dans la liberté des enfants de Dieu, rejettes-tu le péché? » En d’autres mots, « veux-tu être guéri »? Veux-tu être sauvé?

Reprenant une prière que certains attribuent à saint Augustin, je conclus.

« Seigneur, tu connais le désespoir qui ronge mon cœur.
Je voudrais tellement déverrouiller la porte
de ma prison dont je serre moi-même la clef!
Donne-moi le courage de sortir de moi-même.
Dis-moi que tout est possible à celui qui croit.
Dis-moi que je peux encore guérir,
dans la lumière de ton regard et de ta parole. »

Fr. André Descôteaux, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur, en ce temps de pénitence,
donne à tes fidèles de te servir d’un cœur généreux,
pour être bien disposés à accueillir le mystère pascal
et proclamer l’annonce de ton salut.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi, dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.