Homélie, lundi, 1ère semaine du Carême

27 FÉVRIER 2023

Espérer la vie éternelle!

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous invite à continuer d’espérer en l’amour et la miséricorde de Dieu alors que l’évangile du jour adresse le sujet épineux du Jugement dernier.
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Homélie

Le récit du Jugement dernier a toujours impressionné. Car c’est l’humanité tout entière qui est reçue par le Fils de l’homme et pas seulement les chrétiens et chrétiennes. Et ce qui frappe aussi, c’est le fait que les appartenances religieuses ne servent pas de critère dans l’évaluation de la fidélité à Dieu, et pas davantage les appartenances sociales. Le critère central qui va permettre aux êtres humains d’être accueillis dans le Royaume, ce sera le suivant : « Venez les bénis de mon Père, recevez en partage le Royaume. (… ). J’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire; j’étais étranger, et vous m’avez accueilli. » (Mt 25, 34-35) Auront donc accès à la vie bienheureuse auprès de Dieu toutes les personnes qui auront su aimer de façon large et généreuse, qu’elles aient été chrétiennes ou non. Aucune nécessité ici d’avoir posé des gestes extraordinaires. C’est l’exercice, au quotidien, de l’amour du prochain ou du refus de cet amour qui déterminera le sort des sauvés ou des condamnés.

Le plus souvent, dans les communautés chrétiennes d’aujourd’hui, nous retenons avant tout la section positive du discours de Jésus. Nous privilégions spontanément l’expression de la bonté et de la générosité du Seigneur à l’endroit de l’humanité. Par contre, nous nous faisons beaucoup plus discrets à propos de l’affirmation suivante : « Allez-vous-en loin de moi, vous les maudits, dans le feu éternel préparé pour le diable et ses anges. Car j’avais faim, et vous ne m’avez pas donné à manger, j’avais soif, et vous ne m’avez pas donné à boire, (…). (Mt 25, 41-42) La radicalité brutale de cette affirmation nous déstabilise et nous gêne. Elle n’est pas nuancée. Elle nous renvoie à la vision traditionnelle de l’enfer.

À propos de ce jugement radical de Jésus, des interprétations diverses ont été proposées tout au long de l’histoire de l’Église. Parmi ces interprétations, en parallèle avec celle de la vision dramatique de l’enfer, il y a celle d’une punition relative des condamnés. Des exégètes et des théologiens, tant du passé que d’aujourd’hui, ont affirmé et affirment avec force que Dieu n’est pas un être sadique, qu’il ne peut pas se plaire à faire souffrir éternellement des êtres humains pour des actes posés dans de courtes vies terrestres. Une telle vision ne peut pas, à leurs yeux, s’accorder avec la bonté fondamentale du Seigneur. Ils rappellent aussi que ce petit segment de l’Évangile n’est pas à séparer de l’ensemble de l’enseignement de Jésus. S’inspirant de la pensée de saint Irénée de Lyon qui a vécu de l’an 140 à l’an 200, des théologiens contemporains comme Michel Fromaget et Henri Lessiat, entre autres, proposent l’interprétation suivante : toutes les personnes condamnées mourront définitivement au moment de leur mort naturelle. La damnation ne consistera donc pas en un tourment sans fin, mais en un anéantissement définitif de leur être. Leur punition, ce sera avant tout celle de ne pas partager la vie de Dieu pour l’éternité. Avec la mort physique, toute espérance disparaîtra. Ainsi que toute souffrance, bien sûr.

Cette vision, il va sans dire, est rejetée par les défenseurs de la doctrine traditionnelle de l’Église, tout comme celle d’un salut universel accordé sans condition à tout être humain. Nous réalisons ainsi qu’il est bien difficile d’imaginer comment s’exerce et s’exercera la justice de Dieu. Ce qu’il faut toutefois maintenir, c’est que l’amour de Dieu est toujours miséricordieux. C’est cet amour qui nous permet d’espérer la vie éternelle, et ce, tant pour nous que pour toute personne de bonne volonté. Sachons donc miser, pour notre part, sur cette parole de Jésus : « Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la fondation du monde. » (Mt 25, 34)

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Fais-nous revenir à toi, Dieu notre Sauveur,
et pour que ce Carême nous soit profitable,
forme nos esprits par l’enseignement qui vient du ciel.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi, dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.