Homélie, 1er dimanche du Carême

26 FÉVRIER 2023

Oser l'idéal du Christ : aimer comme le Père!

En ce premier dimanche du Carême, le frère Henri de Longchamp, O.P., nous rappelle l’importance de dépendre de Dieu pour faire face à ce qui se met dans notre chemin lorsque nous faisons des efforts pour être la meilleure version de nous-même.
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Homélie

Mercredi nous avons débuté notre montée vers Pâques, nous sommes sur un chemin de conversion et c’est exigeant.

Lorsque nous entrons dans cette église nous voyons de la saleté partout, sur les planchers, les bancs, le mobilier. Au début du carême j’aimerais utiliser la saleté comme porte d’entrée à ce que vivent Jésus, Satan, Adam, ainsi que chacun.e de nous.

Une fois baptisé par Jean, Jésus se rend au désert où de la poussière il y en a suffisamment pour se salir. Pourquoi Jésus s’est-il rendu dans le désert pour une retraite de quarante jours après son baptême ? C’est pour la même raison que les gens font une retraite : pour se recentrer sur qui ils sont, où ils vont et comment y arriver. La perspective de la vie est brouillée par tout le bruit et l’hyperactivité de la vie. Jésus, le charpentier du village, a eu besoin de temps pour comprendre la révélation de son identité donnée par la voix de son Père lors de son baptême : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, celui qu’il m’a plu de choisir » (Mt 3,17).

Le désert c’est aussi le lieu où Satan va rencontrer Jésus.

En rejetant les tentations du diable, Jésus refuse de rejeter l’identité que Dieu lui a donnée à son baptême. Nous réalisons que Jésus a été tenté comme tous les baptisés le sont. Les tentations ne sont pas mauvaises en soi, mais c’est ce que nous en faisons qui peut nous aider à nous tourner vers Dieu ou à nous en éloigner. Voyons-nous les tentations comme des moyens de nous tourner vers Dieu et la Parole de Dieu plutôt que de compter d’abord sur nos propres ressources ? Dans le désert, Jésus se trouve au début d’une route qui le conduira à la mort sur la croix et à la résurrection. Mais il résiste aux offres de raccourcis en écoutant Dieu. L’épisode des tentations de Jésus trouve de profondes résonances dans notre réalité, dans nos déserts intérieurs. Les tentations de Jésus semblent différentes de celles que nous subissons mais y a-t-il des similitudes ?

Derrière les différentes tentations de Jésus, il y a l’invitation de Satan à renier son identité de Fils de Dieu. Nos tentations ne sont-elles pas une invitation à renier le genre de personne que nous voulons être ? En résistant aux tentations, Jésus a choisi de dépendre de son Père pour satisfaire sa faim la plus profonde d’entrer en relation avec les autres de manière ordinaire et de ne pas s’appuyer sur la réputation, le pouvoir et les possessions. Comment satisfaisons-nous nos faims les plus profondes ? Dépendons-nous du prestige et du pouvoir pour nous rendre acceptables aux yeux des autres ? Regardons-nous nos pieds sales marcher dans la poussière ou tournons-nous notre regard vers le ciel?

Le parallèle entre Adam, le premier homme, et Jésus le premier ressuscité peut nous fournir des indices intéressants.

Adam fut placé par Dieu dans un jardin. Jésus est poussé par l’Esprit Saint dans un désert. Adam a tout reçu de Dieu et rien ne lui manque. Mais Satan réussit à le distraire, il a faim d’autre chose et il ne sait pas résister à ce désir insatiable. Jésus n’a rien. Il jeûne, il a faim et soif, mais il résiste à la tentation qui pourrait le détourner d’attendre de Dieu ce dont il pourrait avoir de besoin. Adam succombe et se retrouve nu, c’est-à-dire que désormais son horizon se limite à lui-même. Jésus se tourne vers son Père, qui le revêt de gloire, c’est-à-dire que désormais son corps glorieux est source de salut pour tous. Adam dominait sur toutes les créatures (Gn 1,28-30) mais par sa faute le sol est maudit et il ne mangera qu’à la sueur de son front (Gn 3,17-18). Jésus transpire au soleil du désert, mais il refuse une sournoise domination sur le monde. Il s’en remet au Père. Un jour, Il recevra de Lui tout pouvoir (Mt 26,18).

Aujourd’hui, l’Église nous avertit gravement, et nous rappelle, que le diable existe, qu’il est notre ennemi, et qu’il ne dort pas.

Parfois, il nous laisse plus ou moins tranquilles, parfois il nous assaille férocement. Parfois, avec beaucoup de subtilité, il nous invite à commettre de petites infidélités. Parfois, plus ouvertement, il nous pousse à la trahison totale. Mais nous ne sommes jamais obligés de consentir. Par nous-mêmes, nous sommes faibles et susceptibles de tomber. Mais nous ne sommes jamais seuls. Nous nous tenons dans la puissance de l’Esprit Saint, et nous nous tenons dans la puissance de Jésus qui ne cesse de nous nourrir de sa parole, de nous nourrir de lui-même, surtout dans les sacrements. Avec la puissance de Jésus que nous choisissons, Satan ne peut nous distraire, par exemple, de la messe dominicale au profit des sports du dimanche matin.

Se convertir est exigeant. Chacun et chacune de nous, qu’est-ce qui peut nous distraire de la Bonne Nouvelle du Seigneur Jésus ?

Fr. Henri de Longchamp, O.P.

 

PRIÈRE

Nous te bénissons, Dieu d’amour ;
ton Fils s’est fait l’un de nous
jusqu’à partager nos luttes et notre solitude.
Il a connu la tentation,
il a appris l’obéissance.
Donne-nous de combattre avec lui
et de sortir vainqueurs de l’épreuve
par la puissance de l’Esprit Saint.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur
qui règne avec toi et le Saint Esprit
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.