Homélie, jeudi, 6ème Semaine du Temps Ordinaire

16 FÉVRIER 2023

Penser autrement ?

Aujourd’hui, Gustavo Adolfo Garay Ortega nous invite à nous identifier à l’apôtre Pierre et à réaliser que, bien que les pensées de Jésus et de Dieu peuvent nous dérouter, elles sont empreintes d’une sagesse et d’une intention pas toujours faciles à déceler au premier abord.
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Commentaire

Le passage de l’évangile selon Marc (8, 27-33) que la liturgie nous propose aujourd’hui est considéré comme le noyau du ministère de Jésus. Après avoir prêché et enseigné à la foule, fait des guérisons et d’autres signes du Règne et fait beaucoup de chemin avec ses disciples, Jésus interpelle ces derniers afin de connaître l’impact de sa prédication et de son ministère sur les gens. C’est comme une sorte de sondage de mi-mandat. Mais la question de Jésus a un objectif plus profond que le seul fait de savoir ce que les autres pensent de sa personne et de sa prédication.

À première vue, la question est simple et n’engage les disciples qu’à dire ce qu’ils ont entendu à propos de Jésus : « Au dire des gens, qui suis-je ? ». Cependant, la réponse est très importante, car les gens identifient Jésus à deux prophètes clés de l’histoire d’Israël : Jean le Baptiste et Élie. Tous deux proclament haut et fort le besoin de conversion. La vie de ces deux prophètes est marquée par la cohérence et la fidélité à Dieu dans leur mission. Son impact et son influence sur les foules sont donc non-négligeables, intense même ; nous pouvons supposer que cette ouverture aux enseignements de Jésus résulte d’un besoin intense de vivre un changement ou de la réalisation qu’avec Jésus, ce changement tant attendu est arrivé.

Maintenant, est-ce que ce dire des gens interpelle les disciples? Voilà, la raison de la deuxième question de Jésus : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? ». Cette question peut être vraiment compromettante pour les disciples, car ils doivent se prononcer sur l’identité de Jésus et, par conséquent, son impact dans leur vie et leur relation avec lui. Ce qui me laisse à penser que ce deuxième questionnement de Jésus a probablement provoqué un silence gêné chez les disciples, avant que Pierre, l’impulsif du groupe, ne réponde au nom des Douze : « Tu es le Christ. »

Attribuer le titre de Christ à Jésus est synonyme de dire qu’il est l’envoyé de Dieu, c’est-à-dire, le Messie. Il faut mentionner qu’à l’époque, c’était très difficile pour un juif de reconnaître Jésus comme le Messie parce qu’il fallait déjà reconnaître comme vrai qu’il était de la lignée de David (2Sa, 7) et, en plus, le libérateur promis par Dieu. De plus, le messianisme de Jésus ne répondait pas aux attentes des autorités juives, celles d’un libérateur politique ou guerrier face à l’Empire romain qui dominait la région.

Malgré l’exactitude de la réponse de Pierre, il reste dans une vision humaine et dans les préjugés de la société juive à propos du messianisme de Jésus, car, même si Jésus leur a expliqué les raisons qui le mèneront à souffrir sa passion, sa mort et sa résurrection, il cherche tout de même à le dissuader. En effet, les explications de Jésus ne sont faciles à comprendre pour personne. Pourquoi fallait-il qu’il donne sa vie pour la recevoir à nouveau? Pourquoi l’accomplissement de sa mission requérait-il sa mort sur la croix? Pourquoi faudrait-il perdre pour vraiment gagner? Jésus lui répond donc vigoureusement et de façon à interpeler tous les disciples : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. »

Pierre, comme chaque croyant au cours de l’histoire, a besoin de se débarrasser des images préconçues et fausses pour s’ouvrir à la nouveauté de l’amour de Dieu que Jésus révèle dans sa personne et à travers sa mission. À ce moment-ci de l’évangile, Jésus confronte ses disciples afin que ce qui est en train de se réaliser, l’instauration du Royaume de Dieu, soit bien compris : il faut penser, regarder, accueillir, donner comme Dieu le fait; il faut aimer comme Dieu nous aime, sans réserves, sans limites, sans conditions.

Voilà la mission du Christ : amener l’être humain à une rencontre profonde avec Dieu, que l’être humain (être en devenir) apprenne à vivre dans une dynamique d’amour. La libération offerte par le Christ brise nos préjugés, rompt avec toute image préconçue. Il s’agit d’amener notre humanité à un autre niveau : celui de l’amour de Dieu, où nos pensées sont orientées vers les autres et en leur faveur, où il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux et celle qu’on aime (cf. Jn 15,13).

Gustavo Adolfo Garay Ortega

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu, par toi nous vient la rédemption,
par toi nous est donnée l’adoption filiale ;
dans ta bonté, regarde avec amour tes enfants ;
à ceux qui croient au Christ,
accorde la vraie liberté et la vie éternelle en héritage.
Par Jésus Christ, ton Fils et notre Seigneur
qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.