Homélie, mardi, 6ème Semaine du Temps Ordinaire

Ai-je besoin de m’appesantir sur la méchanceté humaine qui semble ne connaître aucune limite? Rien de nouveau sous le soleil. Des peuples s’affrontent encore et toujours dans des conflits sanglants. Lors du récent voyage du pape en RDC, des victimes de violences inouïes ont témoigné devant lui de ce qu’elles avaient subi. Dans les médias, hier, on faisait état de torture, de viol et d’humiliation lors d’initiation de hockeyeurs dans les ligues juniors du Canada. Hier, encore, on pouvait lire un témoignage poignant de parents qui ont perdu leur petite fille à Laval, la semaine dernière. Hier, toujours, débutait l’enquête publique sur l’assassinat de deux petites filles par leur père survenu à Saint-Apollinaire en 2020. En cette fête de la Saint-Valentin, pensons à ces couples qui, sans aller au meurtre, s’entredéchirent rendant leurs vies et celles de leurs enfants impossibles.

Déluge de la violence, mais aussi terre polluée, de plus en plus inhospitalière pour des milliers d’espèces animales et végétales qui disparaissent les unes après les autres. Deviendra-t-elle un désert? Nous subissons déjà les conséquences des changements climatiques sans parler de toutes les maladies favorisées par un environnement malsain.

« Le Seigneur se repentit d’avoir fait l’être humain. Il s’irrita en son cœur et il dit : ‘Je vais effacer de la surface du sol les hommes que j’ai créés’. »

Dieu a-t-il vraiment besoin de détruire sa création? Qu’il la laisse aller! Les êtres humains vont s’en charger. Que Dieu, comme on dit, veuille ‘tirer la plug’ ne devrait pas nous surprendre. Il y aurait longtemps que nous aurions mis fin à cette horreur. Regardons-nous agir quand une personne nous déplaît. Il y a bien des manières de ‘tirer sur la plug’.

Mais il y a un hic. Dieu n’est pas un être humain. C’est nous qui avons été créés à son image et non pas lui qui est à notre image même si nous aimons bien le ramener à ce que nous sommes.

En effet, la première lecture montre que la résolution de Dieu de détruire sa création n’est pas totale, car il y a Noé, un homme juste au milieu d’un monde corrompu. Littéralement, le texte nous dit de Noé qu’il allait et marchait avec le Seigneur. À cause de lui, Dieu ne détruira pas toute son œuvre, mais sauvera Noé et quelques animaux en vue d’une nouvelle alliance.

Comme nous l’entendrons demain, même si Dieu sait « que le cœur de l’homme est enclin au mal dès sa jeunesse », il s’engage à ne plus détruire son œuvre. Que l’humanité ne s’imagine pas échappée à la volonté de Dieu en construisant une tour aussi élevée soit-elle! Dieu a un autre plan. Et ce sera toute l’histoire, cette histoire que nous appelons sainte, qui nous amènera à découvrir que si Dieu est destructeur c’est non pas de l’être humain, mais du mal dont il est le prisonnier et qui le conduit vers le malheur et finalement vers la mort.  

Cette histoire atteindra son sommet avec la venue parmi nous de son Fils, le Juste par excellence, qui, au lieu de détruire le monde, subira la violence du monde au point de mourir rejeté comme un exclu sur le bois de la croix. Le monde sera alors inondé non d’une pluie destructrice, mais de la rosée de la miséricorde et de l’Esprit qui recrée toute chose, l’Esprit qui change nos cœurs de pierre en cœurs de chair et qui inscrit au plus profond de nous-mêmes la loi nouvelle de l’amour.

Non! Dieu n’est pas le Dieu destructeur et vengeur! Bien humblement, je dois dire que j’éprouve de sérieuses difficultés avec les discours sur le bras vengeur du Christ. J’aime mieux contempler ses bras étendus sur la croix dressant le signe de l’alliance nouvelle et éternelle.

Ainsi, entrons donc avec confiance dans l’arche de vie, en suivant le Christ Jésus qui, par les eaux du baptême, nous purifie de tout péché et nous entraîne à sa suite vers une humanité réconciliée et en paix. Dans cette eucharistie, unissons-nous à son offrande pour que Dieu se réjouisse, en nous voyant, de nous avoir créés et sauvés!  Amen.

Fr. André Descôteaux, O.P.

PRIÈRE