Homélie, jeudi, 2ème Semaine de l’Avent

8 DÉCEMBRE 2022

Comblée de grâces

En cette fête de l’Immaculée-Conception, le frère Raymond Latour, O.P., nous rappelle que notre dévotion à Marie ne vise pas à la distinguer de nous au point de l’éloigner, mais surtout à célébrer la grâce que Dieu accorde à tout ceux qui participent à l’avènement du Royaume de l’Amour.

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Homélie

L’Immaculée-Conception a d’abord été une dévotion en faveur dans le peuple de Dieu. L’Église l’a prise à son compte avec une déclaration dogmatique du Pape Pie IX, en décembre 1854. Non seulement Marie est-elle l’immaculée, non seulement célèbre-t-on sa conception, mais en adjoignant les deux termes, Immaculée-conception, l’Église affirme que Marie a été conçue et est née préservée, exempte de toute souillure de la faute originelle.

Depuis le Moyen-Âge, la doctrine liée à l’Immaculée Conception a fait l’objet de vifs débats, opposant surtout les théologiens Franciscains (en faveur) et Dominicains (très réticents). Alphonse de Liguori a rassemblé dans « ses gloires de Marie », classique de la piété mariale, les principaux arguments d’où il ressort que les trois personnes de la Trinité, Père, Fils et Esprit Saint concouraient à accorder à Marie ce titre d’Immaculée-Conception. Il nous précise comment les dominicains se répartissaient dans la controverse : 92 contre et 136 pour.

L’Immaculée-Conception est-elle une fête de dévotion ou une fête dogmatique ? De nos jours, l’une et l’autre rencontrent des résistances. Pour d’aucuns, la dévotion n’est pas assez en prise avec la réalité quotidienne tandis que pour d’autres –et parfois les mêmes- le dogme est trop tributaire de la tradition théologique sur le péché originel, évocateur d’une Église autoritaire.

Dans la tradition chrétienne, Marie détient une puissance d’intercession, puissance que la dévotion attribue à sa compassion. À distinguer la Mère de Dieu de notre condition commune, à insister sur ses privilèges ne risque-t-on pas de l’éloigner de nous ? Entre distance et proximité, Marie, la vierge de Nazareth, doit bien afficher une certaine perplexité, elle qui s’en tiendrait volontiers à l’hommage « comblée de grâces ».

En ce temps de l’Avent, cette célébration de l’Immaculée-Conception nous amène à donner à nouveau notre acquiescement au choix de Dieu pour faire une demeure à son Fils. Toute l’Église y souscrit, avec humilité, sachant bien que personne mieux que Marie pouvait s’acquitter d’une telle mission.

Toutefois, l’accomplissement de cette mission résidait dans la grâce de Dieu. Le « rien n’est impossible à Dieu » affirmé par l’ange Gabriel, vaut pour toute l’œuvre de Dieu. Marie elle-même a accusé la disproportion entre son humble personne et la mission qui lui a été confiée, devenir la Mère de celui qui sera appelé « Fils du Très-Haut », le Messie siégeant sur le trône de David.

Marie est une figure d’exception. Avec l’Ange, nous la saluons comme « comblée de grâces », nous admirons combien Dieu a fait en elle des merveilles. Nous célébrons son humilité, sa force, son obéissance, son écoute de l’Esprit. Ce n’est certainement pas pour la tenir en distance mais pour en faire un modèle pour notre parcours de foi. Comme elle, nous avons été choisis par Dieu, comme elle, nous sommes appelés à une mission, comme elle, nous recevons la grâce qui à la fois nous façonne et nous permet d’accomplir la volonté de Dieu.

Si la fête de l’Immaculée-Conception doit avoir pour nous une actualité, c’est bien celle-là, le rappel de la grâce de Dieu aussi bien envers Marie qu’à notre endroit. Elle n’a pas fait défaut à Marie, elle ne nous fera pas défaut non plus. Tous, nous sommes renouvelés, recréés par cette grâce. Nouvel Adam, nouvelle Ève, nouvelle humanité ! Création, re-création, rien n’est impossible à Dieu !

Fr. Raymond Latour, O.P.

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
tu as manifesté jusqu’aux extrémités de la terre
celui qui apporte ton salut ;
nous t’en prions,
accorde-nous d’attendre dans la joie
le jour glorieux de sa naissance.
Lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.