Homélie, 30ème vendredi du Temps Ordinaire

De tous les saints, saint Jude est désigné comme le « saint de l’espoir », ou encore, plus traditionnellement, le « patron des causes désespérées ». Les récits et légendes, concourent sans doute à lui décerner un tel honneur, mais l’origine de cette attribution reste bien nébuleuse. 

Je serais aussi bien en mal d’expliquer l’une des prières à saint Jude dans le cours de la neuvaine qui nous fait nous adresser à lui comme au « plus humble des Apôtres ». Son entrée en bout de liste dans la mention des Douze lui a peut-être aussi valu ce superlatif. Jude, Thaddée, un des moins connus parmi les Douze est devenu l’un des plus populaires, c’est assez paradoxal. Et que le plus « humble des Apôtres » soit réputé comme le « saint de l’Espoir », cela ne manque pas d’étonner. Les « fils du Tonnerre » Jacques et Jean auraient sûrement offert leurs services, sachant qu’il y a un poste à combler. Ou Pierre, pour son impétuosité qui le rapproche toutefois davantage du caractère de l’optimiste plutôt que de l’espérant. Il y aurait eu de sérieux candidats à cette tâche d’intercesseur, de patron de l’espoir. Il en fallait un, et saint Jude est devenu celui-là. 

Je ne suis malheureusement pas certain de ce que je viens d’affirmer. Pas sûr, pas sûr du tout que le poste de « patron de l’espoir » ait vraiment été convoité par quelque autre disciple. Ce serait plutôt comme une « élection par acclamation », sans opposition. Mais c’est un choix éminemment démocratique, celui du peuple de Dieu qui lui a donné ses suffrages.

C’est le peuple de Dieu qui, mystérieusement, a institué saint Jude « saint de l’Espoir ». Et pour que sa réputation se maintienne, il a fallu qu’il soit efficace. De génération en génération, son mandat est renouvelé. Il ne déçoit pas. Dans un monde tourmenté, son intercession assure quiconque que mettre sa confiance en Dieu reste encore la meilleure option. Les puissances politiques ont toutes plus ou moins leur agenda caché. Ce n’est pas le cas de saint Jude, tout affairé à ce que chaque personne découvre dans sa réalité l’amour de Dieu, sa miséricorde prévenante, sa présence même aux jours les plus sombres. Notre saint Jude n’a pas renouvelé le discours sur Dieu. Dans son ministère, il nous en parle comme d’un Dieu fidèle, résolu à montrer son salut à qui s’abandonne à son écoute, à sa Providence, ou à sa promesse de vie.

Il fallait un saint de l’espoir. Un saint, oui, comme le pendant féminin de Jude, sainte Rita. Un saint, mais plus encore, un Apôtre. Aussi humble que soit saint Jude, il est au nombre des Douze. Le premier ou le dernier importe peu. L’Église, la conscience ecclésiale, lui a confié le portefeuille de ministre de l’espoir. Dieu aurait eu l’embarras du choix. Mais il se trouve que l’honneur est allé à saint Jude, l’un des Douze. N’est-ce pas une affirmation forte que l’espérance est une vertu apostolique ?

Aujourd’hui, en cette fête de saint Jude, Dieu s’adresse à son peuple pour réitérer son choix. Voici un extrait de son allocution : « Je voudrais remplacer la peur par l’audace et la fierté. J’entends les discours défaitistes, mais rien ne me paraît plus important que le ministère de l’espérance. Je considère que c’est un enjeu majeur quand tant de personnes connaissent la détresse et des situations humiliantes. Je suis persuadé qu’avec Jude, elles se sentiront écoutées, appuyées, soutenues dans leur recherche d’une vie meilleure. Pour bien marquer cette priorité, j’ai voulu créer un super ministère de l’intercession. Pour appuyer Jude dans sa mission, j’ai nommé Joseph, ministre du travail et des affaires familiales et la « petite Thérèse », ministre sans portefeuille mais partout très active pour redonner confiance et protéger la santé mentale des gens désemparés qui se sentent sans force et démunis. J’en profite pour demander à toute l’Église de s’engager dans cette voie de compassion pour que toutes et tous reconnaissent que mon gouvernement en est un de proximité. Plus que jamais, il importe de marcher ensemble, d’accompagner les plus fragilisés de nos sociétés et de témoigner de notre charte des valeurs telle qu’exprimée dans les évangiles ». 

Comme il convient, l’apôtre Jude a prêté serment d’allégeance : « Moi, Jude, apôtre par la grâce du Christ, je jure devant Dieu et devant son peuple, d’employer fidèlement toutes mes forces dans l’accomplissement de mon ministère. Que Dieu me soit en aide! ».

Fr. Raymond Latour, O.P.

PRIÈRE