Homélie, 29ème mardi du Temps Ordinaire

18 OCTOBRE 2022

Solidifier la foi!

Aujourd’hui, alors que nous lisons le tout début de l’évangile de Luc, le frère André Descôteaux, O.P., nous parle de cet évangéliste et de l’essence et le but de sa retranscription unique de la vie du Christ.
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Homélie

Ce début du troisième évangile est original. En effet, Marc débute en canon : ‘Commencement de l’Évangile de Jésus, Christ, Fils de Dieu’. Matthieu nous plonge dans la généalogie de Jésus à partir d’Abraham. Quant à Jean, il nous élève en nous faisant entrer dans les profondeurs de Dieu et de son Verbe. Rien de cela chez Luc. Celui-ci commence simplement par expliciter son propos. 

Ainsi, se propose-t-il de devenir comme plusieurs avant lui, serviteurs de la Parole même s’il n’a pas été un témoin oculaire des événements qu’il relatera. Peut-être était-il insatisfait de ce qu’il avait lu. Ainsi devient-il lui aussi un serviteur la Parole anonyme. En passant, Luc ne se somme jamais. Ce n’est qu’au IIe siècle que Luc, ce compagnon de Paul, sera identifié comme l’auteur du troisième évangile.

Il s’applique donc avec toute son intelligence et ses qualités à la recherche des informations pour produire un exposé suivi. Il faut dire qu’il est doué. Il maîtrise parfaitement le grec et la version grecque de la Bible. Il est un excellent écrivain. Avec tous ses talents, il se met à l’œuvre. Il part à la recherche d’informations. Il scrute et compose son récit. Nous sommes bien loin de la représentation d’un écrivain passif dont la main ne serait que guidée par l’Esprit Saint. 

Pourquoi le fait-il? Pour que le destinataire, cet excellent Théophile, ami de Dieu, se rende compte de la solidité des enseignements qu’il a reçus. Solidité des enseignements. Il n’est pas facile de croire en un Messie crucifié. Pas facile de croire que Dieu est miséricorde. Pas facile de croire qu’avec la venue du Christ un nouveau monde apparaît, celui « où les riches sont renvoyés les mains vides, et les affamés comblés », et qu’une nouvelle communauté voit le jour où tous et toutes sont d’un seul cœur, unanimes dans la prière et ayant mis en commun leurs biens.

Le récit des disciples d’Emmaüs m’apparaît être le plus bel exemple de la réalisation de ce projet de solidification de la foi. Il est d’ailleurs le seul à le rapporter. Les disciples sont découragés et désespérés. « Nous croyions que c’était lui qui allait apporter la libération à Israël ». Et voilà que le Christ les accompagne sur le chemin de leurs doutes, il les écoute et, aussi, les instruit longuement. « Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ». Finalement, ils le reconnaîtront au signe du pain rompu.

Ne sommes-nous pas, nous aussi, des Théophile, pour qui Luc aurait écrit ? N’avons-nous pas besoin de solidifier notre foi? J’entends encore le pape François commenter ce récit des disciples d’Emmaüs, au sanctuaire de Sainte-Anne-de-Beaupré. Alors que certains ne cherchaient que les mots pardon, excuse, le pape, lui, à la lumière de cet évangile a voulu ouvrir un chemin d’espérance et de réconciliation au cœur même des horreurs dont ont été victimes les peuples autochtones. Il cherchait à solidifier leur foi! Écoutons-le.

« Sur le chemin de la vie, et de la vie de foi, tandis que nous poursuivons les rêves, les projets, les attentes et les espérances qui habitent notre cœur, nous nous heurtons aussi à nos fragilités et faiblesses, nous expérimentons défaites et désillusions, et parfois nous restons prisonniers d’un sentiment d’échec qui nous paralyse. L’Évangile nous annonce que, précisément à ce moment-là, nous ne sommes pas seuls : le Seigneur vient à notre rencontre, se joint à nous, marche sur la même route que nous avec la discrétion d’un voyageur aimable qui veut rouvrir nos yeux et rembraser notre cœur. Et quand l’échec laisse place à la rencontre avec le Seigneur, la vie renaît à l’espérance et nous pouvons nous réconcilier : avec nous-mêmes, avec nos frères et avec Dieu ».

Aujourd’hui, ce fameux aujourd’hui qui résonne si souvent chez Luc, aujourd’hui, la Parole nous rejoint. Puissions-nous devenir à sa suite des ardents et laborieux serviteurs de la Parole, même anonymes, car « la conversion doit être encore proclamée en son nom, pour le pardon des péchés, à toutes les nations, en commençant par Jérusalem ». Amen.

Fr. André Descôteaux, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
tu as choisi le bienheureux Luc pour révéler,
par sa parole et ses écrits,
le mystère de ton amour envers les pauvres ;
accorde à ceux qui se réclament de ton Nom d’être,
dans la persévérance, un seul cœur et une seule âme,
et donne à tous les peuples la grâce de voir ton salut.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur et notre Dieu,
qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.