Homélie, 23ème jeudi du Temps Ordinaire

Il y a deux ans, j’ai entendu parler d’une dame qui, atteinte d’un cancer aux ovaires, avait subi une hystérectomie. Après l’opération, le choix du traitement qu’elle devait entreprendre reposait sur une analyse de son code génétique. En effet, la tumeur a été analysée pour détecter ou non la présence de deux gènes susceptibles de prédisposer à une reprise du cancer. Dans le cas de cette dame, un des deux gènes ayant été décelé, elle devra prendre durant toute sa vie un médicament inhibant l’action de celui-ci.

Guérir par les gènes, guérir par l’histoire. Ces gènes viennent des parents, des grands-parents, des ancêtres. Si nous savons que beaucoup de maladies sont d’origine génétique, maintenant il est possible de guérir par nos gènes. La science fait des pas de géants.

Aujourd’hui, en la fête de la Nativité de Marie, l’évangile nous propose de jeter un coup d’œil au bagage génétique du Christ Jésus. Avant d’expliquer comment Jésus a été engendré de Marie, Matthieu retrace son arbre généalogique. Ni Jésus ni Marie ne sont des météorites venant d’on ne sait où.

Au Québec, quand nous faisons un arbre généalogique, nous aimons bien partir du premier ancêtre qui est arrivé en Nouvelle-France. Matthieu, lui, a décidé de remonter jusqu’à Abraham. Luc, plus ambitieux, commence avec Adam! Ce faisant Matthieu montre que la vie de Jésus s’inscrit dans l’histoire d’Israël. Il est fils d’Abraham, porteur de la promesse selon laquelle toutes les nations seront bénies en sa descendance.

Cette histoire ne se déroule pas linéairement. On y retrouve quatre femmes qui surprennent dans cette série d’hommes. Alors que Matthieu aurait pu choisir Sara ou Rébecca, de vraies israélites, il se plaît à inclure des demi-étrangères, montrant l’universalité du projet de Dieu et que toute cette histoire dépend ultimement de lui-même.

Si Dieu, déjà, par ces femmes, était intervenu pour infléchir le cours des choses selon son projet, en Marie, Dieu agit personnellement pour qu’aboutisse son projet comme et au moment où il le décide.

Plus encore, grâce à son Esprit, en Marie, une humanité nouvelle est engendrée, récapitulant tout l’héritage que le Christ assume. Dans l’enfant que donnera Marie, un être humain nouveau naît, celui qui deviendra, comme le dit Paul, le frère aîné d’une multitude.

En Marie, s’est réalisé bien plus qu’une mutation génétique, c’est le cœur même de l’être humain qui est transformé et son esprit, car habités par l’Esprit. Tous et toutes, nous sommes appelés à reproduire l’image même du Fils bien-aimé.

Alors que certains, à travers les qualificatifs de destinés, d’appelés, de justifiés et de glorifiés, utilisés par saint Paul, voient des signes de la prédestination où le sort de chacun serait joué d’avance, je préfère m’émerveiller devant la présence toujours agissante de Dieu pour que son projet se réalise, pour que sa gloire soit manifestée en chacun de ses enfants et pour que son Règne vienne.

Marie aura son rôle à jouer dans ce projet, un rôle très important. Anne et Joachim ne peuvent soupçonner l’apport de leur petite fille au projet de Dieu. Marie, même, le découvrira tout au long de sa vie.

Ainsi, en est-il pour nous. Nous ne sommes pas Marie, mais nous sommes tous appelés à entrer dans cette grande histoire sainte. Nos gènes sont déjà ceux de la vie éternelle!

Fr. André Descôteaux, O.P.

PRIÈRE