21 AOÛT 2022
Porte étroite mais porte ouverte!
Aujourd’hui, le frère André Descôteaux, O.P. nous invite à nous confier à la miséricorde du Seigneur, car la porte du salut est toujours ouverte, même si elle est étroite.
LIVRE DU PROPHÈTE ISAÏE (66, 18-21)
Ainsi parle le Seigneur : connaissant leurs actions et leurs pensées, moi, je viens rassembler toutes les nations, de toute langue. Elles viendront et verront ma gloire : je mettrai chez elles un signe ! Et, du milieu d’elles, j’enverrai des rescapés vers les nations les plus éloignées, vers les îles lointaines qui n’ont rien entendu de ma renommée, qui n’ont pas vu ma gloire ; ma gloire, ces rescapés l’annonceront parmi les nations. Et, de toutes les nations, ils ramèneront tous vos frères, en offrande au Seigneur, sur des chevaux et des chariots, en litière, à dos de mulets et de dromadaires, jusqu’à ma montagne sainte, à Jérusalem, – dit le Seigneur. On les portera comme l’offrande qu’apportent les fils d’Israël, dans des vases purs, à la maison du Seigneur. Je prendrai même des prêtres et des lévites parmi eux, – dit le Seigneur.
LETTRE AUX HÉBREUX (12, 5-7.11-13)
Frères, vous avez oublié cette parole de réconfort, qui vous est adressée comme à des fils : Mon fils, ne néglige pas les leçons du Seigneur, ne te décourage pas quand il te fait des reproches. Quand le Seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons ; il corrige tous ceux qu’il accueille comme ses fils. Ce que vous endurez est une leçon. Dieu se comporte envers vous comme envers des fils ; et quel est le fils auquel son père ne donne pas des leçons ?
Quand on vient de recevoir une leçon, on n’éprouve pas de la joie mais plutôt de la tristesse. Mais plus tard, quand on s’est repris grâce à la leçon, celle-ci produit un fruit de paix et de justice. C’est pourquoi, redressez les mains inertes et les genoux qui fléchissent, et rendez droits pour vos pieds les sentiers tortueux. Ainsi, celui qui boite ne se fera pas d’entorse ; bien plus, il sera guéri.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT LUC (13, 22-30)
En ce temps-là, tandis qu’il faisait route vers Jérusalem, Jésus traversait villes et villages en enseignant. Quelqu’un lui demanda : « Seigneur, n’y a-t-il que peu de gens qui soient sauvés ? » Jésus leur dit : « Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et n’y parviendront pas. Lorsque le maître de maison se sera levé pour fermer la porte, si vous, du dehors, vous vous mettez à frapper à la porte, en disant : ‘Seigneur, ouvre-nous’, il vous répondra : ‘Je ne sais pas d’où vous êtes.’
Alors vous vous mettrez à dire : ‘Nous avons mangé et bu en ta présence, et tu as enseigné sur nos places.’ Il vous répondra : ‘Je ne sais pas d’où vous êtes. Éloignez-vous de moi, vous tous qui commettez l’injustice.’ Là, il y aura des pleurs et des grincements de dents, quand vous verrez Abraham, Isaac et Jacob, et tous les prophètes dans le royaume de Dieu, et que vous-mêmes, vous serez jetés dehors. Alors on viendra de l’orient et de l’occident, du nord et du midi, prendre place au festin dans le royaume de Dieu. Oui, il y a des derniers qui seront premiers, et des premiers qui seront derniers. »
Homélie
Sans minimiser l’appel du Seigneur à prendre au sérieux notre engagement à sa suite, deux lectures de la porte étroite s’offrent à nous comme l’histoire du fameux verre. Est-il à moitié vide ou à moitié plein?
En effet, s’il faut reconnaître que la porte est étroite, elle est tout de même ouverte. Nous ne retrouvons pas devant une immense porte fermée avec un tout aussi immense écriteau : « Attention, chien méchant » ou encore avec une affiche indiquant l’installation d’un système d’alarme qui se déclencherait si nous avions l’intention d’entrer. Non, la porte est ouverte. D’ailleurs pour que tant de personnes venant de l’orient, de l’occident, du Nord et du Midi soient présentes au banquet, il faut quand même que la porte soit ouverte.
Il ne s’agit pas non plus de trouver par une série d’indices, ou encore de gagner par nos efforts, les clés ouvrant la porte. Elle est ouverte. Si nous nous intéressons à notre salut comme l’interlocuteur de Jésus, il faut prendre conscience que c’est le Christ qui nous sauve par son amour ‘manifesté tout au long de sa vie, par ses gestes, ses paroles’ culminant dans le don de lui-même sur la croix. Le salut ne se gagne pas, il s’accueille parce que donné. Jésus a les clés de la porte du Royaume et c’est lui qui l’a ouverte.
Mais vous me direz ‘la porte est quand même étroite’. Et franchir une porte étroite peut être difficile. Il y a plusieurs années, j’étais allé visiter à Pointe-au-Père près de Rimouski, avec quelques étudiants dominicains mexicains qui étudiaient ici, le sous-marin Onondoga. Si vous voulez vivre l’expérience de franchir des portes étroites, allez-y. Et il y en avait plusieurs. Essayez de m’imaginer avec ma taille. J’ai quand même réussi à compléter la visite sans m’être cogné la tête. Je pense que cela ne serait plus possible aujourd’hui. S’abaisser, se pencher, être souple! Pas évident!
Quel sens alors trouver à l’étroitesse de cette porte? Je ne sais si vous êtes allés voir ou avez vu, durant nos confinements, sur Netflix, le film Downton Abbey, produit en 2019. L’intrigue se situe autour de la visite du roi George V et de son épouse la reine Mary au château. Si vous vous souvenez, quand leurs majestés arrivent à Dawton Abbey, toute la famille Crowley et tout le personnel se trouvent de chaque côté de la porte. Sur leur passage, tous s’inclinent et leurs majestés entrent par la grande porte d’apparat, évidemment ouverte.
Mais, il y a une autre porte qui donne accès au château : c’est la porte de service, beaucoup plus étroite. Quand se présenteront le chef de la cuisine du roi et le ‘page of the backstairs’, le responsable de tous les pages au service du roi, pas question qu’ils passent par la porte de service. Ils se considèrent trop importants pour entrer par la porte de service. Qu’on leur ouvre la porte principale, la belle porte, la porte large!
La porte de service, quant à elle, dans le jour, est toujours ouverte. Elle est réservée aux employés, aux cuisiniers, aux serviteurs et servantes. Elle est la porte de la discrétion, de l’humilité, du service. En nous demandant de passer par la porte étroite, ne serait-ce pas une manière pour le Seigneur de nous suggérer tout d’abord de ne pas nous ‘comporter en VIP de ce monde qui empruntent la large porte de la façade, mais comme les serviteurs de l’humanité qui passent par la porte étroite de l’humble service et de la charité’ . Comme je le disais : s’abaisser, se pencher vers l’autre, faire preuve de souplesse et aimer, n’est pas toujours simple. En somme, il s’agit de nous laisser transformer par le salut reçu de Dieu, lui qui, en Jésus, a franchi la porte étroite de sa passion et de la mort par amour pour nous afin que nous ayons la vie en plénitude.
Ainsi, à la fin des temps, seront reconnus par le Seigneur non pas ceux qui auront mangé ou bu avec lui ou même auront prêché en son nom, mais ceux qui l’auront servi dans leurs frères et sœurs. ‘Quand j’avais faim, vous m’avez nourri. Quand j’avais soif, vous m’avez abreuvé. Quand j’étais nu, vous m’avez habillé. Quand j’étais en prison, vous êtes venus me visiter’.
Rendons grâces pour cette invitation qui, au premier regard, peut nous surprendre, un peut comme les corrections de la vie dont parle la lettre aux Hébreux, mais qui constitue, en fait, un appel pressant à franchir une porte, sans doute étroite, mais une porte de salut, une porte débordante de vie, de charité et de don de soi. Amen.
Fr. André Descôteaux, O.P.
PRIÈRE
toi qui unis les cœurs des fidèles dans une seule volonté :
donne à ton peuple d’aimer ce que tu commandes
et de désirer ce que tu promets,
pour qu’au milieu des changements de ce monde,
nos cœurs s’établissent fermement
là où se trouvent les vraies joies.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur et notre Dieu,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.