Prédication, 31ème lundi du temps ordinaire

3 novembre 2025

Don de soi, don gratuit !

Aujourd’hui, Christine Husson, de la Fraternité laïque dominicaine fra Angelico, nous pousse à voir, à travers des exemples de l’actualité, le travail qu’il reste à faire en ce monde pour que la logique de gratuité et de don de Dieu prenne toute sa place.

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Prédication

Les textes d’aujourd’hui nous parlent de dons et de gratuité, c’est-à-dire de gestes concrets que nous posons, sans attendre rien en retour. Nous sommes invités à réfléchir sur l’intention du don et sur le mouvement intérieur qui nous amène à poser un geste de solidarité envers un malade, une personne démunie, une cause qui nous tient à cœur, etc. Comment pouvons-nous regarder le monde qui nous entoure à la lumière de la gratuité infinie du don, lorsqu’il est inspiré par une logique d’amour inconditionnel ?

En lisant les textes de notre liturgie de ce jour, la première idée qui m’est venue est reliée à notre actualité récente au Québec. Quelle est la valeur que nous accordons dans notre société au don de soi de tous les médecins qui prennent soin de nous ? La nouvelle loi qui va couper leurs salaires et changer leurs conditions de travail les touche non seulement financièrement, mais touche également leurs valeurs et leur vocation. Cet espace qui, justement, transforme l’acte médical en véritable don de soi. Le gouvernement ne reconnaît pas ce don de soi qu’ils mettent au service de la population, le temps qu’ils donnent aux patients plus vulnérables, le souci de l’être humain souffrant qu’ils ou elles rencontrent. On le sait lorsqu’on consulte un médecin qui possède cette vocation et qui prend le temps de nous écouter et nous comprendre quelle différence cela fait pour nous. Nous vivons l’accueil de nos problèmes, de la compassion et de l’espérance, ce qui demande du temps. Demander aux médecins de voir plus de monde est une logique mathématique qui peut rapporter de l’argent, mais qui risque de mettre nos soignants en contradictions avec leurs valeurs de dons de soi. Au lieu de donner de l’espace pour la gratuité et la compassion, le risque est de le réduire.

Un 2ème exemple qui me vient est celui des conflits que nous vivons, comme ce qui se passe à Gaza ou en Ukraine. Nous donnons des armes, nous envoyons de l’aide humanitaire, mais est-ce vraiment un don inspiré par la gratuité ? En fait, si l’on regardait tous les conflits, famines ou désastres climatiques dans le monde, nous verrions certainement que nous intervenons surtout lorsque cela nous rapporte quelque chose. Même les guerres sont extrêmement lucratives pour nos pays développés et les reconstructions qui viennent après les destructions le sont tout autant. Avec quelle facilité nous invitons nos amis à notre table en oubliant les plus vulnérables de notre planète ! N’est-ce pas exactement le contraire de ce que le texte de saint Luc nous dit : « N’invite pas tes amis ; invite des pauvres, des estropiés… » ? Si nous intervenions sans attendre de retour, en pensant aux plus pauvres en premier, combien plus juste serait notre monde ?

Par ces exemples, nous voyons que la gratuité, telle que décrite dans l’Évangile, est toute autre. Elle n’obéit pas à une loi économique ou de réciprocité. Elle nous amène à regarder le monde avec la seule logique de l’amour inconditionnel qui n’exige pas de retour sur l’investissement. Un peu comme le feraient un père ou une mère qui accueillent un enfant. Pensent-ils à l’argent qu’ils vont dépenser pour lui, à s’assurer d’une présence à leur côté pour leurs vieux jours, au temps qu’ils vont consacrer à son éducation ? La plupart des parents vous diront que non, sinon ils ne s’engageraient jamais dans cette aventure. C’est l’amour et la gratuité qui tout naturellement vont être le cœur de leur vie familiale. C’est la patience et la miséricorde, comme celle décrite dans la première lecture, qui va les aider à prendre soin et à éduquer leurs enfants. L’amour les pousse vers cette gratuité du don, vers ce mouvement intérieur qui permet d’aimer véritablement, comme Dieu le fait pour nous, sans rien attendre en retour.

Christine Husson, L.O.P., Fraternité laïque dominicaine fra Angelico

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
toi qui unis les cœurs des fidèles dans une seule volonté :
donne à ton peuple d’aimer ce que tu commandes
et de désirer ce que tu promets,
pour qu’au milieu des changements de ce monde,
nos cœurs s’établissent fermement
là où se trouvent les vraies joies.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.