14 octobre 2025
La puissance de l'Évangile
En cet anniversaire du Prix Nobel de la Paix remis à Martin Lutherking Jr. en 1964, Dominique Laperle, laïque dominicain, nous invite à le prendre en exemple, lui ainsi que saint Paul et la Vierge Marie, dans leur confiance en Dieu, en la justice et en la puissance de l’Évangile.
LETTRE DE SAINT PAUL APÔTRE AUX ROMAINS (1, 16-25)
Frères, je n’ai pas honte de l’Évangile, car il est puissance de Dieu pour le salut de quiconque est devenu croyant, le Juif d’abord, et le païen. Dans cet Évangile se révèle la justice donnée par Dieu, celle qui vient de la foi et conduit à la foi, comme il est écrit : Celui qui est juste par la foi, vivra.
Or la colère de Dieu se révèle du haut du ciel contre toute impiété et contre toute injustice des hommes qui, par leur injustice, font obstacle à la vérité. En effet, ce que l’on peut connaître de Dieu est clair pour eux, car Dieu le leur a montré clairement. Depuis la création du monde, on peut voir avec l’intelligence, à travers les œuvres de Dieu, ce qui de lui est invisible : sa puissance éternelle et sa divinité.
Ils n’ont donc pas d’excuse, puisque, malgré leur connaissance de Dieu, ils ne lui ont pas rendu la gloire et l’action de grâce que l’on doit à Dieu. Ils se sont laissé aller à des raisonnements sans valeur, et les ténèbres ont rempli leurs cœurs privés d’intelligence. Ces soi-disant sages sont devenus fous ; ils ont échangé la gloire du Dieu impérissable contre des idoles représentant l’être humain périssable ou bien des volatiles, des quadrupèdes et des reptiles.
Voilà pourquoi, à cause des convoitises de leurs cœurs, Dieu les a livrés à l’impureté, de sorte qu’ils déshonorent eux-mêmes leur corps. Ils ont échangé la vérité de Dieu contre le mensonge ; ils ont vénéré la création et lui ont rendu un culte plutôt qu’à son Créateur, lui qui est béni éternellement. Amen.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT LUC (11, 37-41)
En ce temps-là, pendant que Jésus parlait, un pharisien l’invita pour le repas de midi. Jésus entra chez lui et prit place. Le pharisien fut étonné en voyant qu’il n’avait pas fait d’abord les ablutions précédant le repas.
Le Seigneur lui dit : « Bien sûr, vous les pharisiens, vous purifiez l’extérieur de la coupe et du plat, mais à l’intérieur de vous-mêmes vous êtes remplis de cupidité et de méchanceté. Insensés ! Celui qui a fait l’extérieur n’a-t-il pas fait aussi l’intérieur ? Donnez plutôt en aumône ce que vous avez, et alors tout sera pur pour vous. »
Prédication
Le 14 octobre 1964, le monde entier apprenait que Martin Luther King Jr. recevait le Prix Nobel de la Paix pour son combat non violent en faveur des droits civiques et de la dignité humaine. Ce jour-là, l’Évangile prenait chair dans l’histoire contemporaine. Un homme, animé par sa foi chrétienne, osait croire que l’amour pouvait vaincre la haine, que la justice pouvait triompher de l’oppression et que la paix pouvait naître au cœur du conflit construit sur la différence de la couleur de peau.
Cette foi, Martin Luther King ne l’a pas gardée pour lui. Elle était, comme le dit saint Paul, « une force de Dieu pour le salut ». Il n’avait pas honte de l’Évangile, même quand cela lui valait l’humiliation, la prison, les menaces. Il croyait que l’Évangile n’est pas seulement une parole à méditer, mais une puissance à vivre, à incarner dans les choix concrets, dans les luttes pour la dignité, dans les gestes de réconciliation.
Dans l’Évangile de Luc, nous entendons l’ange dire à Marie : « Rien n’est impossible à Dieu. » Cette parole, Marie l’a accueillie dans l’humilité et la confiance. Elle a cru que Dieu pouvait faire naître la vie là où tout semblait stérile. Elle a cru que l’histoire humaine pouvait être transformée par l’intervention divine.
Martin Luther King, lui aussi, a cru que rien n’est impossible à Dieu. Il a cru que les murs de la ségrégation pouvaient tomber, que les cœurs endurcis pouvaient être touchés, que la justice pouvait jaillir comme un fleuve. Sa foi n’était pas naïve, mais radicalement espérante. Elle s’enracinait dans la certitude que Dieu agit dans l’histoire, à travers ceux qui se mettent à son service.
Saint Paul, dans sa lettre aux Romains, nous met en garde contre le refus de reconnaître Dieu, contre l’idolâtrie qui détourne l’homme de sa vocation. Il parle de ceux qui ont préféré adorer des créatures plutôt que le Créateur. Cette parole résonne aujourd’hui : quelles sont nos idoles modernes ? Le pouvoir, l’argent, l’image, le confort ? Sommes-nous prêts à laisser l’Évangile déranger nos certitudes, nos habitudes, nos sécurités ? Encore ici, comme la lettre aux Romains le dit : « ils se sont laissé aller à des raisonnements sans valeur, et les ténèbres ont rempli leurs cœurs privés d’intelligence ». On peut lier ce passage à celui de Luc qui disait : « vous purifiez l’extérieur de la coupe et du plat, mais à l’intérieur de vous-mêmes vous êtes remplis de cupidité et de méchanceté »… Quatre ans plus tard, le pasteur Luther King tombait sous les balles d’un assassin qui justement, s’était laissé aveuglé par le mal.
Frères et sœurs, en ce 14 octobre, nous sommes invités à une foi active, une foi qui transforme. Comme Marie, croyons que rien n’est impossible à Dieu. Comme Paul, n’ayons pas honte de l’Évangile. Et comme le disait Martin Luther King en 1963, mettons notre foi au service de la justice, de la paix, et de la dignité humaine. Comme lui, nous rêvons « qu’un jour toute vallée sera relevée, toute colline et toute montagne seront rabaissées, les endroits escarpés seront aplanis et les chemins tortueux redressés, la gloire du Seigneur sera révélée à tout être fait de chair ». Ne cherchons pas à satisfaire notre soif de liberté en buvant à la coupe de l’amertume et de la haine. Nous devons toujours mener notre lutte sur les hauts plateaux de la dignité et de la discipline. Nous ne devons pas laisser nos revendications créatrices dégénérer en violence physique. Sans cesse, nous devons nous élever jusqu’aux hauteurs majestueuses où la force de l’âme s’unit à la force physique. Rêvons de la paix entre les nations de ce monde qui sont en guerre, rêvons de dignité pour les Premières Nations et les personnes qui font face aux indignités de l’itinérance, des dépendances et du rejet. Que l’Eucharistie ravive en nous le courage de croire, d’agir, et d’aimer. Car l’Évangile n’est pas une idée : c’est une force. Une force qui peut changer le monde. Amen.
Dominique Laperle, L.O.P.
PRIÈRE
Dieu de puissance et de miséricorde,
éloigne de nous, dans ta bonté,
tout ce qui nous arrête,
afin que sans aucune entrave,
ni d’esprit ni de corps,
nous accomplissions d’un cœur libre ce qui vient de toi.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.
