6 mai 2025
Bon pasteur du Québec
En cette fête dédiée à saint François de Laval, le frère André Descôteaux, O.P., nous raconte l’histoire vocationnelle de cet évêque originaire de Normandie qui brava le froid du Québec pour y faire grandir l’Église du Christ et guider son troupeau à l’image du Bon Pasteur.

DEUXIÈME LETTRE DE SAINT PAUL APÔTRE À TIMOTHÉE (4, 1-5)
Bien-aimé, devant Dieu, et devant le Christ Jésus qui va juger les vivants et les morts, je t’en conjure, au nom de sa Manifestation et de son Règne : proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des reproches, encourage, toujours avec patience et souci d’instruire.
Un temps viendra où les gens ne supporteront plus l’enseignement de la saine doctrine ; mais, au gré de leurs caprices, ils iront se chercher une foule de maîtres pour calmer leur démangeaison d’entendre du nouveau. Ils refuseront d’entendre la vérité pour se tourner vers des récits mythologiques.
Mais toi, en toute chose garde la mesure, supporte la souffrance, fais ton travail d’évangélisateur, accomplis jusqu’au bout ton ministère.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT JEAN (10, 11-16)
En ce temps-là, Jésus disait : « Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. Le berger mercenaire n’est pas le pasteur, les brebis ne sont pas à lui : s’il voit venir un loup, il abandonne les brebis et s’enfuit ; le loup s’en empare et les disperse. Ce berger n’est qu’un mercenaire, et les brebis ne comptent pas vraiment sur lui.
« Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour les brebis.
« J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. »
Homélie
Les textes qui ont été retenus pour célébrer la mémoire de Saint François de Laval nous permettent d’entrer dans la vie de ce bon pasteur. Avant d’élaborer sur les qualités du pasteur qu’il a été, j’aimerais débuter par la fin de l’évangile de ce jour. « J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise ». En écoutant ce texte, nous pensons spontanément à ce premier évêque de la Nouvelle-France qui parcourait en canot ou en raquette son immense diocèse, soutenant la foi des premiers habitants et proclamant la Bonne Nouvelle aux populations autochtones vivant en ce pays.
C’est oublié qu’il portait en lui un désir missionnaire depuis longtemps. Fils d’une grande famille de France, jeune, il se sent appelé au sacerdoce. Alors que ses frères plus âgés décèdent, à l’appel de sa mère, qui aurait bien souhaité qu’il se marie, il interrompt ses études pour redresser la situation du patrimoine familial. Une fois rétabli, il poursuit sa formation et sera ordonné par l’évêque d’Évreux, son oncle. La plus brillante carrière ecclésiastique lui est assurée. Mais, lui voit les choses autrement. En 1654, le Saint-Siège est à la recherche de missionnaires pour être envoyés en Indochine. Il se rend disponible en vendant ses biens et en renonçant à son droit d’aînesse. Il part pour Rome. Malheureusement, le projet tourne court et François revient en France, en Normandie, où il vit modestement dans la prière et le service des pauvres.
Saint François de Laval est missionnaire dans l’âme. Il le sera quand la cour de France le propose au Saint-Siège comme évêque pour la Nouvelle-France. Encore une fois, des opposants se manifestent, car il n’est pas l’ami des jansénistes. L’archevêque de Rouen devenu archevêque de Paris réussit par décret de justice à empêcher son ordination épiscopale. Il sera finalement ordonné à Saint-Germain-des-Prés le 8 décembre 1658. On retrouve d’ailleurs dans cette abbaye une plaque rappelant cet événement.
Enfin, il sera proche de toutes les brebis qui lui seront confiées : celles qui appartiennent déjà au troupeau et toutes les autres qui pourront, grâce à sa voix, entendre celle de l’unique et bon pasteur.
Tout au long de sa vie, il sera impliqué dans des controverses en particulier avec les gouverneurs, car il a à cœur le sort des populations autochtones. Il s’est élevé contre la vente de l’eau-de-vie chez ces dernières. Par ses effets enivrants, cette eau-de-vie facilitait le commerce de la fourrure à l’avantage des marchands français. À temps et à contretemps il n’a cessé de dénoncer le mal, d’encourager avec patience et avec le souci d’instruire (2 Tm 4).
Tout est à faire. Il sera un bâtisseur habité par une passion, celle d’étendre et de raffermir le règne du Christ. Il ouvre à Québec un Séminaire qui s’inspirera de celui des Missions étrangères de Paris. Il met en place les institutions propres à un diocèse. Il visite son diocèse en tous sens et en tout temps. L’hiver ne l’a jamais arrêté.
Quand il remet sa démission pour raison de santé, le diocèse de Québec compte 25 paroisses, 102 prêtres et 97 religieuses pour une population de 12 000 colons. Son successeur nommé, Mgr de Saint-Vallier, on lui interdira de revenir à Québec. Il en souffre profondément, mais il s’en remettra à la divine Providence qui, jamais, ne se trompe en ses desseins.
Finalement, il regagnera Québec pour voir son œuvre en partie démantelée par son successeur. Il connaîtra encore deux épreuves : le 15 novembre 1701, le Séminaire, sa chapelle et le presbytère sont détruits par les flammes. La reconstruction à peine achevée, le feu ravage de nouveau l’institution. Mais lui, comme il est écrit, « ne perdit pas un instant sa paix, sa joie, ni sa tranquillité, parce que ces accidents n’étaient pas des sujets capables d’attaquer sa patience et sa vertu qui étaient bien au-dessus de tout cela. Les seuls intérêts de Dieu, de la vertu et de la religion étaient capables de l’émouvoir. »
Dans cette eucharistie, rendons grâce à Dieu pour ce saint évêque, pour ce bâtisseur, pour ce bon pasteur qui montre encore une fois la profondeur des racines religieuses de notre peuple. Puissions-nous être habités de sa passion pour l’Évangile, de sa créativité et de son énergie pour qu’il n’y ait plus qu’un seul troupeau et un seul pasteur.
Fr. André Descôteaux, O.P.
PRIÈRE
Seigneur Dieu,
tu as envoyé le saint évêque François de Laval
pour étendre le règne du Christ au Canada ;
accorde-nous, à son intercession,
d’accomplir l’œuvre missionnaire
à laquelle nous sommes appelés
comme disciples de ton Fils, Jésus Christ, notre Seigneur.
Lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.