Homélie, jeudi dans l’octave de Pâques C

24 avril 2025

Il n'était pas un fantôme !

Aujourd’hui, le frère Raymond Latour, O.P., nous explique comment Jésus utilise l’humilité de son humanité pour dissiper les doutes de ses disciples et ainsi les préparer à son départ vers le ciel.

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Homélie

« Le Seigneur fit pour nous des merveilles, alléluia ! » C’est ce que le peuple croyant chante tout au long de cette octave pascale. « Ce jour que fit pour nous le Seigneur est un jour de joie, alléluia ! ».

Pourtant, la plupart des récits évangéliques commencent sur une note plutôt sombre : c’est Marie-Madeleine toute en pleurs au tombeau, ce sont les disciples d’Emmaüs que la mort de Jésus a plongé dans l’errance et le désespoir. Tous ces cœurs lourds rencontreront la figure bouleversante d’un étranger qui se révèlera être le Ressuscité : le Vivant, tout à la fois connu, méconnu et reconnu, qui surgit et dont la présence s’affirme et en même temps se dérobe. L’évangile d’aujourd’hui nous rassure : il ne s’agit pas d’un fantôme !

Pour confirmer le fait de la résurrection, ou du moins pour aider les disciples à considérer cet événement comme la plus grande merveille du dessein de salut, Jésus se manifeste tout bonnement à un groupe de disciples. Il est là, en chair et en os. Sans éclat. Sans la gloire attachée au Ressuscité. Le récit insiste sur la réalité de cette présence. Jésus pousse le réalisme jusqu’à inviter les disciples à le toucher. Il leur montre aussi ses mains et ses pieds. Pudiquement, il n’est pas indiqué si la marque de ses blessures en croix étaient visibles ou non. Le fait de la résurrection était tellement invraisemblable que le cœur des disciples restait partagé entre joie et étonnement. Pour achever de les convaincre, dans l’ordre inverse de l’épisode d’Emmaüs, Jésus leur propose de casser la croute avec eux, puis, il y va d’une catéchèse pour leur ouvrir l’intelligence au mystère qui les confond. Il leur rappelle alors les paroles qu’il avait lui-même prononcées ainsi que le témoignage de l’Écriture.

Au cours de son ministère en Galilée, Jésus, par des paroles et des signes, avait guidé les siens vers son identité profonde. Il les a amenés à reconnaître, ou à soupçonner, en lui l’envoyé de Dieu, le Fils du Père. Dans son humanité, Jésus révélait le Père et la mission dont il avait été investi.

Par sa résurrection, il a été élevé à la droite du Père qui l’a glorifié et établi Seigneur sur tout l’univers. Paradoxalement, Jésus ressuscité offre aujourd’hui à ses disciples de le rencontrer dans toute son humanité, dans toute sa proximité. Sa présence n’a rien de fantomatique. Il est là, humain, bien vivant au milieu d’eux !

Mais il est différent. Son apparence pouvait être la même, mais il surgissait d’on ne sait où, lui dont la mort avait eu chez ceux qui le suivaient une si grande force de conviction. Les disciples, bien raisonnables, refusaient de croire le témoignage de leurs yeux. Seul un regard de foi pouvait leur donner accès à cette présence inouïe. Un corps spirituel, voilà qui n’est pas perceptible à l’œil charnel.

Cette brève période de formation située entre la résurrection et l’ascension servira à fonder la foi des disciples aussi bien qu’à les établir dans une nouvelle relation avec celui qu’ils avaient côtoyé. La communion s’intensifiera, ira en s’élargissant. Le Ressuscité les envoie comme témoins dans toutes les nations.

Le Vivant s’adresse à ses disciples, et à nous aussi. Comme eux, nous le rencontrons avec nos corps charnels, mais la foi nous introduit à une vue nouvelle. Lui qui, par son incarnation, s’était manifesté dans la chair, lui en qui habite toute la plénitude de la divinité, corporellement, voici qu’il nous appelle à la même vie que la sienne, à la même communion avec Dieu, son Père. Jésus glorifié dans son corps garde encore toute l’humilité de son humanité, mais son esprit vivifiant nous transforme. Nous qui avons part à sa résurrection, nous sommes promis à la résurrection de la chair. C’est à cette réalité de foi que nous adhérons en participant à l’eucharistie. La nourriture offerte nous est présentée comme « Corps du Christ ». Nous l’accueillons en disant « Amen ». Nous pourrions la recevoir aujourd’hui en disant « Alléluia ! ».

Fr. Raymond Latour, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
tu as uni des peuples divers dans la confession de ton nom ;
accorde à ceux qui renaissent à la fontaine baptismale
d’avoir au cœur la même foi
et dans leurs actes le même amour.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.