24 février 2025
Du scepticisme à la foi : une libération du regard
Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous explique la transformation miraculeuse d’un père qui sauvera son enfant et nous rappelle qu’accepter pleinement Jésus dans sa vie comme Sauveur prend du temps.

LIVRE DE BEN SIRA LE SAGE (1, 1-10)
Toute sagesse vient du Seigneur, et demeure auprès de lui pour toujours. Le sable des mers, les gouttes de la pluie, et les jours de l’éternité, qui pourra en faire le compte ? La hauteur du ciel, l’étendue de la terre, la profondeur de l’abîme, qui pourra les évaluer ? Avant toute chose fut créée la sagesse ; et depuis toujours, la profondeur de l’intelligence.
La source de la sagesse, c’est la parole de Dieu au plus haut des cieux. Ses chemins sont les commandements éternels. La racine de la sagesse, qui en a eu la révélation, et ses subtilités, qui en a eu la connaissance ? La science de la sagesse, à qui fut-elle manifestée, et qui a profité de sa grande expérience ? Il n’y a qu’un seul être sage et très redoutable, celui qui siège sur son trône. C’est le Seigneur, lui qui a créé la sagesse ; il l’a vue et mesurée, il l’a répandue sur toutes ses œuvres, parmi tous les vivants, dans la diversité de ses dons, et ceux qui aiment Dieu en ont été comblés.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT MARC (9, 14-29)
En ce temps-là, Jésus, ainsi que Pierre, Jacques et Jean, descendirent de la montagne ; en rejoignant les autres disciples, ils virent une grande foule qui les entourait, et des scribes qui discutaient avec eux. Aussitôt qu’elle vit Jésus, toute la foule fut stupéfaite, et les gens accouraient pour le saluer. Il leur demanda : « De quoi discutez-vous avec eux ? »
Quelqu’un dans la foule lui répondit : « Maître, je t’ai amené mon fils, il est possédé par un esprit qui le rend muet ; cet esprit s’empare de lui n’importe où, il le jette par terre, l’enfant écume, grince des dents et devient tout raide. J’ai demandé à tes disciples d’expulser cet esprit, mais ils n’en ont pas été capables. » Prenant la parole, Jésus leur dit : « Génération incroyante, combien de temps resterai-je auprès de vous ? Combien de temps devrai-je vous supporter ? Amenez-le-moi. »
On le lui amena. Dès qu’il vit Jésus, l’esprit fit entrer l’enfant en convulsions ; l’enfant tomba et se roulait par terre en écumant. Jésus interrogea le père : « Depuis combien de temps cela lui arrive-t-il ? » Il répondit : « Depuis sa petite enfance. Et souvent il l’a même jeté dans le feu ou dans l’eau pour le faire périr. Mais si tu peux quelque chose, viens à notre secours, par compassion envers nous ! » Jésus lui déclara : « Pourquoi dire : “Si tu peux”… ? Tout est possible pour celui qui croit. » Aussitôt le père de l’enfant s’écria : « Je crois ! Viens au secours de mon manque de foi ! »
Jésus vit que la foule s’attroupait ; il menaça l’esprit impur, en lui disant : « Esprit qui rends muet et sourd, je te l’ordonne, sors de cet enfant et n’y rentre plus jamais ! » Ayant poussé des cris et provoqué des convulsions, l’esprit sortit. L’enfant devint comme un cadavre, de sorte que tout le monde disait : « Il est mort. » Mais Jésus, lui saisissant la main, le releva, et il se mit debout.
Quand Jésus fut rentré à la maison, ses disciples l’interrogèrent en particulier : « Pourquoi est-ce que nous, nous n’avons pas réussi à l’expulser ? » Jésus leur répondit : « Cette espèce-là, rien ne peut la faire sortir, sauf la prière. »
Homélie
Le récit évangélique d’aujourd’hui nous fait rencontrer un père de famille éploré et inquiet. Son fils est atteint d’une maladie grave. S’appuyant sans doute sur la renommée de Jésus, il vient l’implorer de guérir son fils. Nous pouvons facilement imaginer que beaucoup de parents qui, de nos jours, se présentent dans les urgences de nos hôpitaux avec de jeunes enfants tiennent un discours semblable à celui de ce père. Ces derniers demandent aux médecins de sauver leur enfant. Ces parents, de toute évidence, croient que la vie vaut la peine d’être vécue. C’est pourquoi ils sont disposés à investir généreusement en temps et en énergie pour que leur enfant puisse, à son tour, goûter à la vie, goûter en particulier à celle où l’amour est nourrissant.
Dans le récit, nous constatons que le père est attaché à son fils. Il a su l’observer avec attention. Il sait d’ailleurs décrire dans le détail les manifestations de la maladie dont son garçon est atteint. Mais ce père doute de pouvoir obtenir la guérison souhaitée. Il doute, car les disciples de Jésus n’ont pas réussi à expulser l’esprit mauvais qui habitait son garçon. Et même si Jésus est précédée par une renommée de grand guérisseur, le père se permet de dire : « Si tu peux quelque chose, viens à notre secours, par compassion envers nous ! ».
« Si tu peux quelque chose » : parole qui amène Jésus à relancer le dialogue avec le père. De fait, Jésus profite en quelque sorte de l’incertitude et du scepticisme qui habitent le cœur de ce père pour l’amener à faire un grand pas sur le chemin de la foi. Il l’invite à voir en sa personne non pas seulement un guérisseur mais bien un envoyé de Dieu capable de manifester la bienveillance divine. Nous le constatons : le père parvient à exprimer sa foi, mais avec une hésitation certaine: « Je crois ! Viens au secours de mon manque de foi ! » Cet appel au secours est suffisant, aux yeux de Jésus, pour que la guérison du fils se produise. Le père est ainsi passé de la confiance relative à un guérisseur renommé à une foi en un Dieu qui se soucie la vie des humains. Il reste que nous sommes frappés ici par le déplacement de l’attention de Jésus. S’il fixe d’abord son attention sur l’état de l’enfant, c’est sur le père qu’elle se déplace ensuite. C’est lui, le père qui, en définitive, expérimente une transformation intérieure miraculeuse, car il passe du scepticisme à la foi.
Ce cheminement spirituel qui mène à une foi bien enracinée est habituellement un long processus. Les récits autobiographiques des grands convertis révèlent que la reconnaissance du Christ Jésus comme Sauveur de l’humanité exige du temps. Dans bien des cas, nous constatons que les personnes qui ont été engagées dans une véritable recherche spirituelle se sont approchées petit à petit du Seigneur. Leur attachement à Dieu s’est approfondi par étapes. Avec le père de l’enfant malade, ce cheminement est raconté de manière très synthétique par l’évangéliste. L’important à retenir, c’est que c’est Jésus lui-même qui est venu au secours de ce père éploré pour le faire entrer, à son tour, dans une communion avec Dieu qui mène à la vie en plénitude.
Nous pouvons remarquer ici que cet épisode évangélique s’enracine dans une expérience prononcée de la fragilité humaine. La menace de la mort est à l’arrière-plan, car la maladie de l’enfant est grave. Jésus vient donc répondre à la soif de vivre que le père exprime pour son enfant. Et, en même temps, il accompagne le père pour le mener vers une libération du regard, vers une vie qui déborde les conditions historiques de l’existence humaine. Puissions-nous rendre grâce pour le dévoilement de la générosité de Dieu réalisé par Jésus !
Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.
PRIÈRE
Dieu éternel et tout-puissant,
dans ta tendresse inépuisable,
tu combles ceux qui t’implorent,
bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs ;
répands sur nous ta miséricorde
en délivrant notre conscience de ce qui l’inquiète
et en donnant plus que nous n’osons demander.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.