3 février 2025
Un salut pour tous !
Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous raconte les péripéties et les surprises que les disciples vivent alors que Jésus les mènes dans un territoire hostile et païen, ainsi que les leçons à en tirer.
LETTRE AUX HÉBREUX (11, 32-40)
Frères, sur la puissance de la foi, que dire encore ? Le temps me manquerait pour rappeler l’histoire de Gédéon, Baraq, Samson, Jephté, David, Samuel et les prophètes. Par leur foi, ils ont conquis des royaumes, pratiqué la justice, obtenu la réalisation de certaines promesses. Ils ont fermé la gueule des lions, éteint la flamme des brasiers, échappé au tranchant de l’épée, retrouvé leurs forces après la maladie, montré du courage à la guerre, mis en fuite des armées étrangères. Des femmes dont les enfants étaient morts les ont retrouvés ressuscités.
Mais certains autres ont été torturés et n’ont pas accepté la libération qui leur était proposée, car ils voulaient obtenir une meilleure résurrection. D’autres ont subi l’épreuve des moqueries et des coups de fouet, des chaînes et de la prison. Ils furent lapidés, sciés en deux, massacrés à coups d’épée. Ils allèrent çà et là, vêtus de peaux de moutons ou de toisons de chèvres, manquant de tout, harcelés et maltraités — mais en fait, c’est le monde qui n’était pas digne d’eux ! Ils menaient une vie errante dans les déserts et les montagnes, dans les grottes et les cavernes de la terre.
Et, bien que, par leur foi, ils aient tous reçu le témoignage de Dieu, ils n’ont pas obtenu la réalisation de la promesse. En effet, pour nous Dieu avait prévu mieux encore, et il ne voulait pas les mener sans nous à la perfection.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT MARC (5, 1-20)
En ce temps-là, Jésus et ses disciples arrivèrent sur l’autre rive, de l’autre côté de la mer de Galilée, dans le pays des Géraséniens. Comme Jésus sortait de la barque, aussitôt un homme possédé d’un esprit impur s’avança depuis les tombes à sa rencontre ; il habitait dans les tombeaux et personne ne pouvait plus l’attacher, même avec une chaîne ; en effet on l’avait souvent attaché avec des fers aux pieds et des chaînes, mais il avait rompu les chaînes, brisé les fers, et personne ne pouvait le maîtriser. Sans arrêt, nuit et jour, il était parmi les tombeaux et sur les collines, à crier, et à se blesser avec des pierres.
Voyant Jésus de loin, il accourut, se prosterna devant lui et cria d’une voix forte : « Que me veux-tu, Jésus, Fils du Dieu Très-Haut ? Je t’adjure par Dieu, ne me tourmente pas ! » Jésus lui disait en effet : « Esprit impur, sors de cet homme ! » Et il lui demandait : « Quel est ton nom ? » L’homme lui dit : « Mon nom est Légion, car nous sommes beaucoup. » Et ils suppliaient Jésus avec insistance de ne pas les chasser en dehors du pays.
Or, il y avait là, du côté de la colline, un grand troupeau de porcs qui cherchait sa nourriture. Alors, les esprits impurs supplièrent Jésus : « Envoie-nous vers ces porcs, et nous entrerons en eux. » Il le leur permit. Ils sortirent alors de l’homme et entrèrent dans les porcs. Du haut de la falaise, le troupeau se précipita dans la mer : il y avait environ deux mille porcs, et ils se noyaient dans la mer.
Ceux qui les gardaient prirent la fuite, ils annoncèrent la nouvelle dans la ville et dans la campagne, et les gens vinrent voir ce qui s’était passé. Ils arrivent auprès de Jésus, ils voient le possédé assis, habillé, et revenu à la raison, lui qui avait eu la légion de démons, et ils furent saisis de crainte. Ceux qui avaient vu tout cela leur racontèrent l’histoire du possédé et ce qui était arrivé aux porcs. Alors ils se mirent à supplier Jésus de quitter leur territoire.
Comme Jésus remontait dans la barque, le possédé le suppliait de pouvoir être avec lui. Il n’y consentit pas, mais il lui dit : « Rentre à la maison, auprès des tiens, annonce-leur tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde. »
Alors l’homme s’en alla, il se mit à proclamer dans la région de la Décapole ce que Jésus avait fait pour lui, et tout le monde était dans l’admiration.
Homélie
La visite de Jésus dans le pays des Géraséniens est remplie de surprises. La décision de Jésus de se rendre dans cette région située en dehors de la Galilée et de la Judée a sûrement étonné ses disciples, car c’était un territoire ouvertement païen. Les habitants devaient probablement avoir adopté la religion officielle de l’Empire romain. Mais il y avait davantage : rapidement après leur arrivée dans la région de Gérasa, les disciples ont constaté qu’un bon nombre de propriétaires terriens étaient engagés dans la production et le commerce de la viande de porc. Production même fort généreuse pour un petit village : 2000 porcs ont plongé dans la mer, nous dit le récit. Et comme le porc était une nourriture impure pour des juifs, ce milieu rural était à éviter, à fuir. Pourtant, Jésus y avait conduit les siens. Pourquoi ?
Autre surprise : Jésus et ses disciples ne sont pas accueillis de manière bienveillante. C’est plutôt le contraire. Celui qui vient au-devant d’eux est un homme violent qui n’a pas vraiment le contrôle de ses actes. Il est, selon le discours de l’époque, possédé par des esprits malins : « personne ne pouvait le contrôler ». Et là, par compassion, Jésus libère cet homme de ses esprits mauvais. En un instant, ce dernier redevient sociable. Il est même radicalement transformé : de « possédé » qu’il était par les forces du mal, il expérimente une libération profonde. Cette libération est si profonde qu’elle l’amène à demander à Jésus de le suivre et donc de devenir son disciple.
Ce renversement radical de situation impressionne sans doute les disciples. Ils s’en réjouissent, car, une fois de plus, Jésus a manifesté, en leur présence, qu’il avait le pouvoir de vaincre une maladie qui devait être perçue comme inguérissable. Sauf que le miracle de Jésus a été mal accueilli par les propriétaires des porcs. Ces producteurs ont eu peur, car, à leurs yeux, Jésus pouvait menacer leur gagne-pain. Pour cette raison, ils l’invitent à quitter leur village. Ils ne tiennent pas compte du bien que Jésus leur a apporté en guérissant l’un des leurs d’une maladie qui perturbait la vie communautaire du milieu.
Autre étonnement : Jésus se permet de confier à l’homme nouvellement libéré de ses chaînes de devenir un évangélisateur dans sa région. Aux yeux des disciples, ce choix était sans doute trop risqué. Il reste que cet homme pouvait raconter la transformation que Jésus avait provoquée dans sa vie. En ce faisant, il annonçait une portion de la Bonne Nouvelle du salut et interpellait ses proches.
Ce récit est chargé. Il est clair que le choix de Jésus d’amener ses disciples en terre païenne visait à leur faire reconnaître que sa puissance de salut ne se limitait pas à la seule terre d’Israël. Le salut de Dieu devait être offert à tous les peuples, quels que soient les « esclavages culturels et moraux » qui pouvaient étouffer la vie de leurs habitants. Il se manifestait ainsi comme le sauveur des païens et des juifs. Autre leçon que Jésus donnait aux disciples : il faut oser se rendre présent dans des milieux qui, au premier abord, sont imperméables à toute nouveauté aux plans religieux et moral. Il faut le faire pour que la compassion de Dieu puisse se manifester auprès de diverses catégories de personnes. Cette leçon, elle a été très bien retenue par les centaines de milliers de missionnaires, hommes et femmes, qui, au cours des siècles, ont pris le risque de proposer le Christ et son Évangile dans presque toutes les régions du monde.
Retenons que l’accueil que Jésus a réservé au démoniaque de Gérasa peut être un guide pour nous aujourd’hui qui avons à vivre dans un milieu pluraliste, à mentalité matérialiste et qui nous semble sérieusement fermé à toute entreprise évangélisatrice. Retenons que c’est Dieu qui ouvre les cœurs.
Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.
PRIÈRE
Seigneur,
exauce la supplication de ton peuple
qui se confie à la protection du bienheureux Blaise ton martyr ;
donne-nous la joie de vivre aujourd’hui dans la paix
et de trouver les secours pour atteindre la vie éternelle.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.