Homélie, lundi de l’Octave de Noël

30 décembre 2024

De la curiosité à l'aventure spirituelle

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous explique comment il faut accueillir spirituellement Jésus dans nos vies et le reconnaître à l’exemple d’Anne et Syméon.

De la curiosité à l'aventure spirituelle

Homélie

Le récit de la présentation de Jésus au Temple comporte des surprises. La première surprise, c’est que les prêtres responsables des rites de purification n’ont rien remarqué de particulier quand l’enfant Jésus fut présenté au Temple. Jésus était simplement un enfant parmi d’autres. Apparemment, rien ne le distinguait des autres enfants. Mais cette lecture superficielle de la réalité sera corrigée par deux personnes âgées, deux personnes sans statut social particulier, Syméon et Anne la femme prophète. Ces dernières vont porter sur Jésus un regard qui dépassait de beaucoup les apparences physiques. Dans l’enfant Jésus, elles ont vu celui qui était un envoyé de Dieu, celui qui allait apporter la délivrance au peuple. L’évangéliste dit clairement : « Elle (Anne) proclamait les louanges de Dieu et parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem ». Éclairés par l’Esprit Saint, Anne et Syméon ont été capables de porter un regard de foi sur l’événement auquel ils participaient. C’est d’ailleurs dans cette perspective que Syméon a pu affirmer (dans un passage précédent) : « Maintenant, Souverain Maître, tu peux, selon ta parole, laisser ton serviteur s’en aller en paix; car mes yeux ont vu ton salut ». (Lc 2, 29-30)

La deuxième surprise rencontrée dans ce récit, c’est le silence qui suit le retour de Jésus à Nazareth. L’évangéliste se contente de dire : « L’enfant, lui, grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui ». À part le petit récit où Jésus, à l’âge de 12 ans, accompagne ses parents à la fête de Pâques à Jérusalem, nous n’avons rien sur la trentaine d’années qu’il a vécue à Nazareth et en Galilée. C’est là un silence de la part des évangélistes qui a été source de frustration pour bien des chrétiens et chrétiennes. En effet, pourquoi les évangélistes n’ont-ils pas retenu certains événements qui ont marqué, par exemple, l’enfance de Jésus ou sa vie d’adulte comme artisan menuisier ? Pourquoi n’ont-ils pas parlé de l’utilisation qu’il a peut-être faite de ses pouvoirs paranormaux ? La réponse donnée par les autorités ecclésiales à la curiosité de ces baptisés a souvent été jugée insuffisante. En effet, se faire dire que la vie familiale et professionnelle de Jésus pendant la trentaine d’années vécues à Nazareth n’avait pas d’importance était plutôt déprimant. L’important, leur disait-on, c’était l’annonce du Royaume de Dieu et l’événement de la Passion-Résurrection. Réponse rationnelle, bien sûr, mais elle ne comblait pas du tout la curiosité religieuse des personnes qui désiraient en savoir plus sur le parcours historique de Jésus. Aussi n’est-on pas surpris de constater que dès la fin du 1er siècle et jusqu’au VIe siècle, des évangiles apocryphes ont été écrits : pensons aux évangiles de Thomas, de Jacques, de Philippe et de Marie-Madeleine. Même si les autorités de l’Église n’ont pas accordé de crédit à ces récits non-officiels, il reste qu’ils ont répondu à une aspiration : celle d’alimenter l’imagination de baptisés désireux de connaître quelque peu la vie secrète de Jésus.

Une telle curiosité religieuse n’est pas disparue dans notre monde moderne. À preuve : Maria Valtorta, avec son long récit L’Évangile tel qu’il m’a été révélé a été, à partir des années 1960, publié et traduit en plusieurs langues. De son côté, le romancier français Gérald Messadié a fait paraître, en 1988, un livre imposant intitulé : L’homme qui devint Dieu. Ce livre a connu trois éditions. L’auteur a tenté d’y reconstituer ce qu’avait pu être la vie de Jésus. En utilisant certains évangiles apocryphes et des données de la recherche historique, il a tenté de clarifier plusieurs éléments restés obscurs dans les évangiles. Son œuvre romancée a été critiquée, mais bon nombre de chrétiens et chrétiennes y ont trouvé des réponses satisfaisantes.

Aujourd’hui, nous sommes invités à nous laisser interpeller par le témoignage de foi d’Anne et de Syméon, à saisir aussi que c’est l’Esprit Saint avant tout qui éclaire nos regards de croyants et croyantes. Retenons en plus que la curiosité religieuse peut mener bien au-delà des faits divers et conduire, elle aussi, à une aventure tout à fait spirituelle.

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Nous t’en prions, Dieu tout-puissant :
nous ployons sous le joug du péché
qui depuis longtemps nous tient en esclavage :
donne-nous la délivrance
par l’incomparable naissance en notre chair
de ton Fils unique, Jésus Christ.
Lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.