Homélie, dimanche de la 26ème semaine du Temps ordinaire

29 septembre 2024

Enlever des obstacles

En ce dimanche, le frère Daniel Cadrin, O.P., nous invite à reconnaître que le bien vient parfois de là où on l’attend le moins et de plonger dans nos communautés et dans nos cœurs pour aller à la source de ce qui nous empêche d’être patients, compatissants et plein d’amour pour certaines personnes.

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Homélie

Nous voulons marcher à la suite de Jésus, être ses disciples. Pour nous guider sur ce chemin, nous avons des témoins d’hier et d’aujourd’hui, des groupes et communautés, et nous avons la Parole, une lumière sur notre route. Aujourd’hui, à quoi la Parole nous invite-t-elle ? Au livre des Nombres, Moïse reconnaît l’action de l’Esprit chez des prophètes non prévus au programme. Un appel à nous ouvrir à d’autres actions de l’Esprit, en dehors de notre cercle. Dans sa Lettre, Jacques critique vivement l’exploitation des travailleurs, le culte de l’argent et la violence. Cela fait partie de la vie chrétienne et le pape François nous le rappelle souvent. Dans l’Évangile de Marc, les disciples font route avec Jésus. En même temps, ils cheminent dans leur suite de Jésus. Et Marc aborde divers défis qui se posent quand on s’engage sérieusement pour une œuvre, pour des personnes ou pour une cause.

S’engager. En premier lieu, comment éviter d’être tellement conscients de notre rôle que nous en arrivions à nous considérer comme les seuls dépositaires authentiques de cette mission ? Quand on est convaincu de la justesse de ses convictions, comment éviter le sectarisme ? Les disciples sont passés par ce risque (v. 38-40). En tant que collaborateurs privilégiés de Jésus, le Maître, ils se sentent investis d’une importante mission et ils aimeraient bien contrôler tout ce qui concerne Jésus. Cela les amène à vouloir empêcher ceux qui ne font pas partie de leur groupe, qui n’ont pas leur carte du parti. Le bien ne peut venir que d’eux seuls, les vrais disciples.

Jésus les invite à briser ce cercle où ils s’enferment et à s’ouvrir aux autres. Le bien peut venir aussi de groupes hors de nos frontières. Jésus ne s’enferme pas dans une approche sectaire : il reconnaît la valeur d’autres groupes et les alliances possibles. De plus, Jésus mentionne les gestes d’accueil envers ses disciples (v. 41) : ces gestes ne sont pas perdus, quels que soient ceux qui les font. Il y a de la place pour d’autres groupes ou sympathisants dans les perspectives de Jésus.

Quand on s’engage à fond, un autre défi qui se pose, c’est notre attitude envers ceux qui sont plus fragiles, plus lents, plus vulnérables : ces petits qui croient en moi (v. 42). On risque de les bousculer, de les mépriser, de ne pas leur accorder d’attention. Jésus invite à ne pas devenir pour eux, par nos attitudes et nos exigences, des scandales, i.e. des obstacles sur le chemin de leur expérience croyante, et ainsi de les empêcher d’accéder à lui. Qu’ils soient des croyants qui ne sentent pas qu’ils ont une place dans l’Église, ou qui sont choqués par des changements trop rapides ou trop lents à venir, ils ont droit à une attention qui les fasse grandir.

Enfin, pas d’engagement sans accepter des renoncements et une transformation de soi qui nous touche intérieurement (v. 43-48). Ce travail sur soi implique d’aller à la racine de ce qui, en nous, fait obstacle au Royaume de Dieu. C’est cette dimension radicale qui est évoquée par l’appel à couper et arracher, i.e. aller à la racine du mal. Ce que les disciples de Jésus ont bien compris : ils ne se sont pas arraché un œil, coupé un pied ou une main ! Ils n’ont pas fait une lecture fondamentaliste de ces paroles de Jésus.

Et nous, dans notre charité, dans nos actions et nos relations, qu’est-ce qui empêche nos mains de s’ouvrir et de bâtir ? Dans notre espérance, dans nos déplacements, qu’est-ce qui empêche nos pieds d’avancer, de faire les pas nécessaires pour aller plus loin ? Dans notre foi, dans notre regard sur Dieu, sur autrui, sur la création, sur nous-mêmes, qu’est-ce qui nous rend aveugles et empêche nos yeux de reconnaître la présence de Dieu ? L’enjeu est d’entrer dans la vie : cela vaut la peine d’enlever ces poids qui sont en nous sources de mort.

Dans ce passage de Marc, nous sommes ainsi appelés à reconnaître et à enlever des obstacles. Ils sont présents dans nos relations aux autres groupes chrétiens et aux croyants plus faibles. Ils sont présents en nous-mêmes, paralysant nos actions, bloquant notre cheminement ou aveuglant notre regard. Travailler sur ces obstacles donne plus de liberté pour marcher à la suite de Jésus. La qualité et la fidélité de nos engagements en seront affermies. Nous pouvons nous demander : parmi tous ces défis de l’engagement, lequel m’interpelle davantage ? Et quel pas en avant pourrais-je faire pour grandir en liberté ?

Rendons grâce à Dieu pour tous les témoins de cet engagement ouvert et libre, personnel et profond. Et rendons grâce pour Celui qui en est la plénitude et l’inspiration, Jésus le vivant, présent avec nous en cette eucharistie. Amen.

Fr. Daniel Cadrin, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
quand tu pardonnes et prends pitié,
tu manifestes au plus haut point ta toute-puissance ;
multiplie pour nous les dons de ta grâce :
alors, en nous hâtant vers les biens que tu promets,
nous aurons part au bonheur du ciel.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
lui qui vit et règne avec toi,
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.