Homélie, lundi, Semaine sainte B

25 mars 2024

La dignité de son corps

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous explique comment le geste inhabituel et anticulturel d’une amie de Jésus nous mène tous à entrevoir la dignité de son corps et préfigure sa glorification à venir.
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Homélie

Avec l’évangile d’aujourd’hui, nous plongeons dans les derniers jours de la vie de Jésus. Nous sommes à Béthanie, aux portes de Jérusalem. Marie, Marthe et Lazare reçoivent en grand Jésus et ses disciples. C’est une famille aisée. Elle peut se permettre d’accueillir à la fois plusieurs convives et de dépenser généreusement. C’est à l’occasion de cette réception que Marie va poser un geste qui va déranger les personnes présentes et, en même temps, révéler la profondeur de son attachement à Jésus. Cette dernière, sans même dire un mot, va tenir un discours fort éloquent. Elle va verser un parfum très précieux sur les pieds de Jésus et oser ensuite les essuyer avec ses cheveux. Geste extravagant, inconvenant même. Un tel geste révélait une intimité peu commune. Bien sûr, selon les coutumes de l’hospitalité de l’époque, un hôte devait fournir de l’eau à ses invités qui avaient voyagé sur les routes poussiéreuses afin qu’ils puissent se laver eux-mêmes les pieds; parfois on demandait à un serviteur ou à un esclave de se charger de cette tâche. Mais ici, le geste de Marie dépasse de beaucoup les règles de l’hospitalité coutumière. C’est non seulement un geste d’admiration et d’affection profonde qu’elle pose, mais un véritable geste de vénération. Il fait ressortir la dignité incomparable du corps de Jésus. Pour poser un tel geste, on laisse entendre que Marie voyait au-delà des apparences. C’est comme si elle avait eu le privilège d’assister à l’épisode de la Transfiguration sur la montagne et qu’elle pouvait voir le corps de Jésus enveloppé de lumière. Son geste a sans doute forcé les convives à aller au-delà des apparences à leur tour et à s’interroger en conséquence sur la véritable identité de Jésus.

Notre frère Philippe Lefebvre, o.p., exégète, nous invite à lire ce passage en parallèle avec le récit du lavement des pieds des disciples par Jésus. À la lumière du geste de Marie, ce dernier laisse entendre que Jésus « lave les pieds des siens afin qu’ils aient part (Jn 13,8) à sa dignité qu’elle a manifestée. (…). Une femme nous emmène vers un homme, qui est le Fils de l’Homme, et celui-ci associe des hommes à sa gloire (Jn 12-13). » Déjà, par anticipation, à travers le geste de Marie, c’est la glorification de Jésus qui se laisse entrevoir à l’horizon.

En relisant aujourd’hui ce récit, comment ne pas reconnaître la dignité du corps de Jésus, mais en particulier la dignité à laquelle il a fait participer ses disciples. À notre tour, nous participons à cette dignité, car elle nous est accordée, par grâce, à travers toute la vie sacramentelle de l’Église. À nous de la reconnaître, cette dignité, dans nos relations avec les personnes qui nous entourent. C’est en épousant le regard de Jésus – et de Marie pour une part – qu’il est possible d’entrer dans cette dynamique qui construit la communion entre les êtres humains.

Dans la foi, la figure de Marie de Béthanie devient inspirante. Elle conduit au corps comblé de lumière et de Vie de Jésus. En cette fin de carême, sachons exprimer, tout comme Marie, notre reconnaissance pour tout ce que le Christ Jésus ne cesse de nous apporter, à nous et à notre monde.

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Dieu tout-puissant, nous t’en supplions ;
dans notre faiblesse, nous ne pouvons tenir ;
donne-nous de reprendre souffle,
grâce à la passion de ton Fils unique.
Lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.