Homélie, lundi, 29ème semaine du Temps Ordinaire

23 octobre 2023

Une perspective élargie, une vie riche de sens

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous dit que Jésus cherche à nous rendre service, à élargir notre perspective sur l’avenir et à ne pas concevoir nos plans de vie d’un point de vue strictement matériel ou économique.
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Homélie

Donner sens à sa vie, c’est là un souci que porte normalement toute personne adulte. Ce sens donné à sa vie, s’il n’est pas toujours formulé explicitement, se manifeste cependant à travers les projets qu’une personne met de l’avant. On peut penser ici au projet de vivre en couple ou non, au projet de s’engager professionnellement dans tel ou tel champ d’activité. Entrent aussi en ligne de compte les aspirations matérielles et humaines qui motivent la personne dans sa façon de se projeter dans l’avenir. En d’autres termes, chacun et chacune se donne une représentation d’une vie qui sera réussie selon ses critères personnels. Cette vie projetée se veut habituellement féconde et heureuse.

Dans le récit évangélique du jour, l’homme qui s’adresse à Jésus était explicitement engagé dans l’élaboration de son projet de vie. Et ce projet de vie semblait étroitement rattaché à sa part d’héritage. On peut penser que cet homme était le fils cadet d’un grand propriétaire terrien. Il n’avait donc droit, selon la Loi appliquée en Israël, qu’à la moitié de la part du fils aîné. Mais là, par sa demande d’intervention faite à Jésus, il a manifesté qu’il était inquiet. Avait-il peur de manquer de ressources financières pour réaliser son projet de vie? Peut-être bien. Chose certaine, il semblait centré sur la dimension matérielle de son rêve d’avenir. Et Jésus a dû le désappointer, le décevoir, car il n’a pas voulu répondre à sa requête immédiate. Il l’a plutôt invité, grâce à sa parabole de l’homme riche dont les greniers débordaient, à élargir la perspective de son avenir, à prendre du recul par rapport aux aspirations économiques qui semblaient prioritaires à ses yeux.

Remarquons ici que Jésus ne lui a pas proposé d’abandonner sa part d’héritage et d’en faire don aux pauvres. Non. Il n’a d’ailleurs pas mis en question le droit de cet homme, déjà favorisé économiquement, d’avoir une vie respectable et respectée. Par-contre, il l’a mis en garde. Le danger auquel il était confronté, c’est celui de l’aveuglement spirituel illustré par le comportement du riche propriétaire. Ce dernier en était venu à oublier sa fragilité en ne pensant pas à sa mort plus ou moins prochaine. En effet, ce riche s’était orgueilleusement enfermé dans son petit univers égoïste. Il avait non seulement fermé les yeux sur sa condition d’être mortel, mais en plus il n’avait pas tenu compte de la présence de Dieu dans sa vie. Pas un mot de reconnaissance de sa part pour les biens dont il avait profité au cours de son existence. On constate en plus qu’il ne tenait pas compte des besoins des gens de son entourage. Tout était centré sur sa personne. Il se disait à lui-même : « Je vais démolir mes greniers, j’en construirai de plus grands et j’y mettrai tout mon blé et tous mes biens. (…). Puis il a ajouté: « Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence. » Et Jésus de conclure : « Cette nuit même, on va te redemander ta vie. (…). Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu. »

Le service que Jésus a voulu rendre à ce fils cadet peut constituer une interpellation pour nous, chrétiens et chrétiennes d’aujourd’hui. Nous vivons dans une société moderne économiquement favorisée, dans un monde où l’accumulation de biens matériels est fortement encouragée, dans un monde où il n’y a guère de référence à Dieu dans l’élaboration des projets de vie. C’est d’ailleurs ce que nous observons chez les « sans-religion » de chez nous. La tentation est là : celle de s’installer le mieux possible dans le monde immédiat et de chercher à y trouver son bonheur, même de manière individualiste et égoïste. Le défi, pour nous d’abord, c’est de demeurer lucides et de savoir prendre en compte le grand projet de salut de Dieu. La mesure de la réussite d’une vie doit donc retenir des critères qui débordent le monde présent pour s’enraciner dans la promesse du Royaume de Dieu. Un autre défi à porter, c’est celui de rendre un service de lucidité et de vérité aux gens qui nous entourent, et ce, à la manière de Jésus.

Que notre Eucharistie affermisse notre confiance en l’Esprit qui, lui, peut nous rendre capables d’assumer cette mission!

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Dieu tout-puissant, nous t’en prions :
Accorde-nous de conformer à ta volonté nos paroles
et nos actes dans une inlassable recherche
des biens spirituels.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.