Homélie, lundi, 2ème semaine de Pâques

17 avril 2023

Fière de son choix !

Aujourd’hui, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., nous raconte comment sainte Kateri Tékakwhitha, comme Jésus, s’est distinguée de son groupe d’appartenance pour prioriser sa foi et le Royaume de Dieu.
homelie

Homélie

À l’époque de Jésus, en Palestine, aller poser la question « Qui est ma mère, et qui sont mes frères? » constituait une insulte.

Car, dans le Proche Orient ancien, l’identité première de tout individu lui venait de sa famille. Se séparer de sa famille ou prendre ses distances par rapport à elle, c’était une option quasi impensable. Et quelqu’un qui osait le faire était assuré que les membres de sa famille allaient tout entreprendre pour le ramener à bon port. Chaque membre d’une famille (étroite ou élargie) devait défendre les intérêts sociaux et économiques des siens. L’individu avait l’obligation de manifester une solidarité à toute épreuve de façon à ce que sa famille le protège et qu’en retour il s’engage à œuvrer pour assurer l’avenir de cette dernière.

Or Jésus s’est fait provoquant quand il est allé affirmer : « Celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère ». (Mt 12, 50) Par ces paroles, il indiquait avec force que le critère premier des solidarités, ce n’était pas d’abord celui du sang, celui de la famille naturelle, mais bien plutôt celui de l’engagement à collaborer à la venue du Règne de Dieu. En d’autres mots, si les intérêts de la famille naturelle venaient à s’opposer à ceux de la nouvelle famille spirituelle regroupée autour de Jésus, c’était les intérêts de cette nouvelle famille qu’il fallait choisir et privilégier.

De fait, au long des siècles, on constate que l’Église s’est construite grâce à des hommes et à des femmes qui se sont montrés libres face aux pressions familiales, libres face aux intérêts des groupes auxquels ils appartenaient naturellement. Sainte Kateri Tékakwhitha est de ce nombre. Cette jeune femme Mohawk avait 18 ans, en 1674, quand elle demanda au père jésuite Jacques de Lambertville, de recevoir le baptême. Peu de temps après son baptême, ses proches exigèrent d’elle qu’elle se marie. Elle refusa, donnant comme motif qu’elle était l’épouse de Dieu et qu’aucun homme ne pouvait prendre, dans son cœur, la place du Seigneur. Son attitude engendra hostilité et railleries non seulement de la part de ses parents adoptifs (ils étaient non chrétiens) mais aussi de la part d’une portion significative des habitants de son village. À ce point qu’elle décida, en 1677, de tenter de s’échapper du village en comptant sur des Mohawks qui l’amenèrent du nord de l’État de New York à Kanawake, non loin de Montréal. Là, elle le savait, elle pourrait vivre ouvertement sa foi. Elle y fit d’ailleurs sa première communion le jour de Noël 1677. Une fois à Kanawake, les chrétiens et chrétiennes de la place remarquèrent non seulement l’intensité de sa dévotion mais l’aide qu’elle apportait généreusement aux personnes malades et aux vieillards. Puis, à l’âge de 24 ans, en avril 1680, elle fut emportée par la tuberculose. Son choix d’avoir voulu faire la volonté de Dieu l’avait obligée à rompre avec ses proches et à manifester pleinement sa solidarité avec la grande famille du Christ Jésus.

Aujourd’hui encore, que de chrétiens et chrétiennes font des choix qui paraissent illogiques, anormaux aux yeux de leur entourage. Dans les milieux déchristianisés, ce choix de suivre Jésus comporte un prix à payer, car il engendre une marginalisation sociale, et même un rejet. Seule la conviction que la vie véritable se situe du côté du Christ et de son Évangile permet aux chrétiens et chrétiennes d’assumer les ruptures engendrées.

Puisse l’Esprit du Seigneur nous rendre capables de suivre les traces de Jésus. De la sorte, tout comme Kateri Tékakwhitha, nous serons des baptisés fiers de travailler à l’avènement du Règne de Dieu dans notre monde.

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu,
tu as appelé Kateri Tekakwhitha
à vivre la virginité consacrée au milieu de son peuple;
fais que, par l’intercession de celle
que l’on a appelée le Lys des Agniers,
les gens de toute tribu, langue ou nation
rassemblés dan ton Église,
te glorifient par un chant unanime de louange.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.