Homélie, mardi, 3ème Semaine du Temps Ordinaire

24 janvier 2023

Offrande d'amour

Aujourd’hui, le frère André Descôteaux, O.P., nous explique l’amour, la vocation et la dévotion selon les doux et joyeux enseignements de saint François de Sales.

homelie

Homélie

Les textes de cette journée conviennent tout à fait à la fête de Saint François de Sales. Le Seigneur Jésus, dans l’Évangile, englobe dans sa famille tous ceux et toutes celles qui font la volonté de Dieu. Il dépasse les limites de la chair. Tous et toutes peuvent devenir un frère, une sœur, voire une mère.

Dans l’extrait de la lettre aux Hébreux, il est clairement affirmé que ce n’est pas le culte ou les sacrifices répétés année après année qui nous purifient de tout péché, mais l’offrande du Christ. « Tu n’as pas voulu ni agréé les sacrifices et les offrandes. Alors il déclara : ‘Me voici, je suis venu pour faire ta volonté’. Et c’est grâce à cette volonté que nous sommes sanctifiés, une fois pour toutes ».

Nous touchons ici un thème fondamental de la pensée de Saint François de Sales. D’abord, tous et toutes, quel que soient leur état de vie sont appelés à devenir saints et peuvent, là où ils sont, aimés Dieu.

D’ailleurs s’il insiste fréquemment sur l’obéissance, celle-ci n’est jamais loin de l’amour. Il écrit « Il faut tout faire par amour et rien par force : il faut plus aimer l’obéissance que craindre la désobéissance ».

L’amour au cœur de la vie. Il écrira « le monde est né de l’amour, il est soutenu par l’amour, il va vers l’amour et il entre dans l’amour » et ailleurs « l’homme est la perfection de l’univers, l’esprit est la perfection de l’homme, l’amour est la perfection de l’esprit, et la charité est la perfection de l’amour ».

Cette charité trouve son accomplissement en Dieu, car Dieu, comme il le dit, « est dieu du cœur humain ». Ayant été créés à son image et à sa ressemblance « nous avons une extrême convenance avec sa divine majesté ». Il va plus loin en parlant de cette correspondance « sans pareille entre Dieu et l’homme pour leur réciproque perfection ». Saint François de Sales ne soutient pas que Dieu a besoin de l’être humain, mais si « l’un a grand besoin et grande capacité de recevoir du bien, l’autre a grande abondance et grande inclination pour en donner  […] C’est donc une douce et désirable rencontre, que celle de l’affluence et de l’indigence ».

Voilà pourquoi où que nous soyons, nous pouvons vivre unis à Dieu, telle est la vraie dévotion. Dans son Introduction à la vie dévote, Saint François de Sales nous invite à appartenir complètement à Dieu tout en vivant en plénitude notre présence dans le monde et les devoirs de notre propre état.

Il n’y a pas un ordre dans la sainteté : les contemplatifs ou contemplatives, les religieux ou les religieuses, les prêtres et finalement les fidèles. « La vraie dévotion, comme il le dit, n’est autre chose qu’une agilité et vivacité spirituelle par le moyen de laquelle la charité fait ses actions en nous, ou nous par elle, promptement, et affectionnément ».

Au début de l’Introduction à la vie dévote, il écrit :

« Dieu commanda en la création aux plantes de porter leurs fruits, chacune selon son genre : ainsi commande-t-il aux chrétiens, qui sont les plantes vivantes de son Église, qu’ils produisent des fruits de dévotion, en chacun selon sa qualité et occupation. La dévotion doit être différemment exercée par le gentilhomme, par l’artisan, par le prince, par la veuve, par la fille, par la mariée et non seulement cela, mais il faut accommoder la pratique de la dévotion aux forces, aux affaires et aux devoirs de chaque particulier. Serait-il à propos que l’évêque voulût être solitaire comme les Chartreux? Et si l’artisan était tout le jour à l’église comme le religieux, cette dévotion ne serait-elle pas ridicule? Cette faute néanmoins arrive bien souvent.

La dévotion ne gâte rien quand elle est vraie, mais elle perfectionne tout et lorsqu’elle se rend contraire à la légitime vocation de quelqu’un, elle est sans doute fausse.

C’est une erreur, une hérésie, de vouloir bannir la vie dévote de la compagnie des soldats, de la boutique des artisans, du ménage des gens mariés. […] Où que nous soyons, nous pouvons et devons aspirer à la vie parfaite ».

Pour lui, la vraie dévotion est comme le miel qui rend plus éclatantes les pierreries dans lequel elles sont jetées. Ainsi le « soin de la famille en est rendu paisible, l’amour du mari et de la femme plus sincère, le service du prince plus fidèle, et toutes sortes d’occupations plus suaves et amiables ».

J’ai l’impression que Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus avec sa petite voie s’est beaucoup inspirée de lui.

Je ne peux terminer sans évoquer une vertu bien développée par notre Saint : l’eutrapélie. Il aimait bien rire et appréciait les conversations joyeuses. « Quant aux jeux de paroles qui se font des uns aux autres avec une modeste gaîté et joyeuseté, ils appartiennent à la vertu nommée eutrapélie par les Grecs que nous pouvons appeler bonne conversion; ainsi on prend une honnête et amiable récréation sur les occasions frivoles que les imperfections humaines fournissent ». C’est à lui qu’on doit la fameuse formule « un saint triste est un triste saint ».

Un homme doux, mais non d’une douceur mièvre. Il s’est totalement donné aux autres quoique cela ait pu lui avoir coûté. Toujours la charité. À cet égard, une dernière anecdote : un matin se présente un calviniste dont il était devenu ami et avec qui il avait beaucoup discuté. Celui-ci lui offre des noix en lui disant qu’il pourra célébrer la messe après y avoir goûté. Il n’était pas au courant de la discipline du jeûne eucharistique. Saint François de Sales lui répond : « Non, pas cela, mais pour vous faire plaisir, je laisserai ma messe aujourd’hui ».

Ne laissons pas la messe aujourd’hui, mais rendons grâce à Dieu pour un tel pasteur et docteur. Que son exemple et son enseignement nous amènent à prendre toujours plus conscience de l’amour de Dieu manifesté particulièrement dans l’offrande du Christ pour que nos vies deviennent une offrande d’amour. Amen.

Fr. André Descôteaux, O.P.

 

PRIÈRE

Seigneur Dieu, pour le salut des âmes,
tu as voulu que l’évêque saint François de Sales
devienne le serviteur de tous en toutes choses ;
dans ta bonté, accorde-nous, à son exemple,
de manifester toujours ta douce charité dans le service fraternel.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur,
qui vit et règne avec toi, dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.