8 JANVIER 2023
Oser comme les Mages !
En cette solennité de l’Épiphanie, le frère André Descôteaux, O.P., nous pousse à prendre exemple sur les Mages qui représentent tout être humain qui par à l’aventure, vers l’inconnu, pour finalement trouver la plus belle et la plus grande des lumières, celle du Dieu qui nous tend la main.
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LIVRE DU PROPHÈTE ISAÏE (60, 1-6)
Debout, Jérusalem, resplendis !
Elle est venue, ta lumière,
et la gloire du Seigneur s’est levée sur toi.
Voici que les ténèbres couvrent la terre,
et la nuée obscure couvre les peuples.
Mais sur toi se lève le Seigneur,
sur toi sa gloire apparaît.
Les nations marcheront vers ta lumière,
et les rois, vers la clarté de ton aurore.
Lève les yeux alentour, et regarde :
tous, ils se rassemblent, ils viennent vers toi ;
tes fils reviennent de loin,
et tes filles sont portées sur la hanche.
Alors tu verras, tu seras radieuse,
ton cœur frémira et se dilatera.
Les trésors d’au-delà des mers afflueront vers toi,
vers toi viendront les richesses des nations.
En grand nombre, des chameaux t’envahiront,
de jeunes chameaux de Madiane et d’Épha.
Tous les gens de Saba viendront,
apportant l’or et l’encens ;
ils annonceront les exploits du Seigneur.
LETTRE DE SAINT PAUL APÔTRE AUX ÉPHÉSIENS (3, 2-3a.5-6)
Frères,
vous avez appris, je pense,
en quoi consiste la grâce que Dieu m’a donnée pour vous :
par révélation, il m’a fait connaître le mystère.
Ce mystère n’avait pas été porté à la connaissance
des hommes des générations passées,
comme il a été révélé maintenant
à ses saints Apôtres et aux prophètes,
dans l’Esprit.
Ce mystère,
c’est que toutes les nations sont associées au même héritage,
au même corps,
au partage de la même promesse,
dans le Christ Jésus,
par l’annonce de l’Évangile.
ÉVANGILE DE JÉSUS CHRIST SELON SAINT MATTHIEU (2, 1-12)
Jésus était né à Bethléem en Judée,
au temps du roi Hérode le Grand.
Or, voici que des mages venus d’Orient
arrivèrent à Jérusalem
et demandèrent :
« Où est le roi des Juifs qui vient de naître ?
Nous avons vu son étoile à l’orient
et nous sommes venus nous prosterner devant lui. »
En apprenant cela, le roi Hérode fut bouleversé,
et tout Jérusalem avec lui.
Il réunit tous les grands prêtres et les scribes du peuple,
pour leur demander où devait naître le Christ.
Ils lui répondirent :
« À Bethléem en Judée,
car voici ce qui est écrit par le prophète :
Et toi, Bethléem, terre de Juda,
tu n’es certes pas le dernier
parmi les chefs-lieux de Juda,
car de toi sortira un chef,
qui sera le berger de mon peuple Israël. »
Alors Hérode convoqua les mages en secret
pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue ;
puis il les envoya à Bethléem, en leur disant :
« Allez vous renseigner avec précision sur l’enfant.
Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer
pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui. »
Après avoir entendu le roi, ils partirent.
Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient
les précédait,
jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit
où se trouvait l’enfant.
Quand ils virent l’étoile,
ils se réjouirent d’une très grande joie.
Ils entrèrent dans la maison,
ils virent l’enfant avec Marie sa mère ;
et, tombant à ses pieds,
ils se prosternèrent devant lui.
Ils ouvrirent leurs coffrets,
et lui offrirent leurs présents :
de l’or, de l’encens et de la myrrhe.
Mais, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode,
ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.
Homélie
Durant le temps de l’Avent, nous avons évoqué la longue préparation de la venue du messie en nous plongeant dans les prophéties d’Isaïe, en suivant pas à pas les interventions de Dieu par ses anges auprès de Marie et de Joseph. Dieu se préparait un peuple capable de le recevoir. Ainsi, quand les temps furent accomplis, Jésus naît, l’Emmanuel, Dieu avec nous. Aujourd’hui, dans cette fête de l’Épiphanie, notre regard se porte sur des hommes qui se mettent en marche vers Dieu. Cette fête, à travers eux, est la célébration de ce merveilleux voyage de l’être humain en quête de Dieu et de sa découverte parce que Dieu était déjà parti à sa recherche. Épiphanie, rencontre de deux chemins qui se croisent : celui de Dieu en quête de l’être humain et celui de l’humanité à la recherche de son Dieu.
Des Mages, nous dit l’évangéliste Matthieu, ont observé une étoile. En passant, selon le texte évangélique, ils ne sont pas des rois et nous ne savons pas non plus combien ils étaient. Seulement des Mages d’une contrée éloignée, de l’Orient! Ils étaient des observateurs du ciel. Ils étaient aux aguets. Une nuit, ils sont frappés par l’apparition d’une nouvelle étoile dans le ciel. Ils se demandent alors ce qui peut bien expliquer la présence de cet astre nouveau. Basés sur leur savoir, ils en concluent que cette étoile inconnue devait être le signe de la naissance d’un grand roi. Ils se mettent alors à sa recherche. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi seulement quelques mages s’étaient mis en route? Cette lumière nouvelle ne s’offrait-elle pas à tous les observateurs du ciel?
Nos Mages, contrairement à plusieurs, appartiennent à la catégorie de ces personnes qui acceptent de se laisser interroger, qui ne se contentent pas de la tranquillité de leurs habitudes, mais qui sont prêts à se laisser mettre en question. Nos Mages sont des personnes audacieuses et courageuses parce qu’elles osent prendre le chemin de l’inconnu. Où cette étoile les conduira-t-elle? Ils ne savent pas.
Le pape François dans son homélie de l’Épiphanie de cette année évoque l’image des « tranquillisants de l’âme », « ces substituts pour calmer nos inquiétudes et éteindre nos questions ». « Ne pense pas trop, laisse faire, profite de la vie! » Il parle même de ceux qui mettent leur cœur dans le « coffre-fort du confort ». Les Mages refusent ces tranquillisants. Ils ne se laissent ni arrêter ni distraire. Ils osent prendre la route. Où les mènera cette étoile? Ils n’en ont aucune idée, mais ils font confiance. Sans qu’ils ne le sachent, Dieu guidait leur recherche dès qu’ils l’ont entreprise de sorte qu’arrivés à Jérusalem, l’étoile ayant disparu, ils trouvent réponse à la question qui les habitait : où est le Roi des Juifs? Hérode, après avoir consulté les scribes, les spécialistes de la Loi, les met sur le chemin de Bethléem. Les chercheurs et les chercheuses de Dieu ont souvent besoin d’une communauté pour les guider et aider à discerner le vrai du faux. Il faut aller aux sources de la foi : les Écritures.
Après cette halte à Jérusalem, l’étoile réapparaît et les Mages découvrent enfin l’Enfant. Pleins de joie, ils lui offrent leurs présents, l’or de leur amour, l’encens de leur vénération et la myrrhe de leurs souffrances exprimant ainsi leur foi en cet enfant qui n’est autre que le Dieu rendu visible à nos yeux. Comme nous le chanterons au moment de la profession de foi, ils ont reconnu en lui leur Sauveur et leur Dieu.
Et voilà qu’ils repartent. Pourquoi? Eux qui ont marché si longtemps, sans savoir où ils allaient, n’ont-ils pas trouvé le jeune Roi annoncé par l’étoile? Pourquoi ne pas rester auprès de lui pour profiter de sa présence? Ils font l’expérience de Marie, la disciple de Jésus, qui, au matin de Pâques, découvre le Ressuscité et veut le retenir, mais lui l’envoie annoncer la bonne nouvelle de sa Résurrection.
Ainsi les mages doivent partir et devenir un signe pour tous ceux et toutes celles non satisfaits de la vie, tous ceux et toutes celles habitées par une sainte inquiétude ou par une soif d’un toujours plus. La lumière est entrée au dedans d’eux. La lumière a chassé leur nuit. L’amour et la paix inondent leur cœur. Ils doivent en être les témoins. Il faut comme le proclame le prophète Isaïe que toutes les nations se rassemblent et viennent vers Jérusalem pour marcher vers sa lumière et à la clarté de son aurore.
Ainsi nos Mages repartent, mais par un autre chemin. Disciples du vrai Dieu manifesté en notre chair, ils n’empruntent plus les chemins mortifères qu’Hérode leur avait proposés. Leur vie a changé, car ils ont découvert « l’étoile radieuse du matin, le soleil de justice, l’éclat miséricordieux de Dieu, qui aime tout être humain et chaque peuple de la terre » (Pape François).
Comme les Mages, osons! Nul n’est si loin de Dieu qu’il ne lui fasse signe.
« Levez-vous, chercheurs de Dieu!
Quittez votre robe de tristesse.
Regardez l’étoile et osez le voyage.
Rompez avec votre vie.
Avant que cette vie ne vous étouffe
Et en vienne à vous empêcher de même voir les étoiles.
Brisez les chaînes qui vous tiennent captifs,
La sécurité, l’argent, la science close.
Qu’il est long, le voyage au bout de soi-même!
Qu’il est long le chemin de la foi,
Aussi long que celui de l’amour!
Aux païens que nous sommes,
Seigneur, fais luire une étoile.
Donne-nous un signe qui dérange l’ordre des choses.
Un tout petit signe,
Une douleur, une blessure,
Une petite déchirure,
Il est plus que temps que commence l’aventure.
Amen » André Beauchamp
Fr. André Descôteaux, O.P.
PRIÈRE
∞ Amen.