Homélie, 22ème lundi du Temps Ordinaire

29 AOÛT 2022

Un courage qui vient de Dieu

En ce jour où nous commémorons le martyr de saint Jean-Baptiste, le frère Jean-Louis Larochelle, O.P., souligne le courage de plusieurs prophètes bibliques et modernes.

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Homélie

Les figures prophétiques sont hautement valorisées dans l’histoire d’Israël et dans l’histoire des Églises chrétiennes. Les rôles que ces figures ont remplis dans diverses sociétés ont souvent été générateurs de changements. La force et le courage qu’elles ont manifestés dans la dénonciation d’injustices et de mépris du bien commun ont régulièrement frappé l’imagination des observateurs. La liturgie d’aujourd’hui nous rappellent deux de ces grandes figures prophétiques : soit celle du prophète Jérémie et celle de Jean le Baptiste.

Dans les traditions religieuses juive et chrétienne, on ne peut pas parler des prophètes sans les rattacher étroitement à Dieu. Aux yeux des croyants et croyantes, c’est à Dieu qu’ils devaient non seulement leur vocation mais leur courage. Eux-mêmes d’ailleurs n’étaient-ils pas convaincus d’être des porte-paroles de Dieu et d’être soutenus par Lui? N’est-ce pas ce que reconnaissait le prophète Jérémie lui-même en rappelant les paroles de Dieu? « Moi, je fais de toi aujourd’hui une ville fortifiée, une colonne de fer (…) pour faire face à tout ce pays, aux rois de Juda et à ses princes, à ses prêtres et à tout le peuple du pays. (…). Je suis avec toi pour te délivrer – oracle du Seigneur. » (Jr 1, 18)

À la suite du Concile Vatican II, les autorités ecclésiales ont régulièrement rappelé l’importance du rôle prophétique qu’avaient à assumer les communautés chrétiennes dans les pays où les petites gens étaient méprisés et exploités, les paysans en particulier. Dans les années 1970 et suivantes, nous avons régulièrement entendu les récits de chrétiens et chrétiennes qui avaient été torturés et éliminés parce qu’ils avaient pris le parti des pauvres. Du Chili, du Brésil, d’Argentine, du Salvador nous parvenaient des récits d’élimination brutale de défenseurs des droits des pauvres. Au Salvador par exemple, en mars 1980 était assassiné Mgr Romero qui avait pris le parti des petits paysans; en décembre 1980, trois religieuses américaines et une missionnaire laïque étaient à leur tour assassinées à cause de leur solidarité avec les petits du pays; et en novembre 1989, six jésuites rattachés à l’Université de l’Amérique centrale furent assassinés par ordre du pouvoir politique en place. Le tort de ces femmes et de ces hommes, c’était d’avoir pris le parti des citoyens et citoyennes marginalisés, exploités et méprisés.

Cette histoire d’affrontement des figures prophétiques face aux grands propriétaires terriens et aux autorités politiques continue aujourd’hui dans bien des régions du monde. Risquer d’intervenir au nom de l’Évangile est dangereux. Des historiens de l’Église, en analysant les résultats de ces affrontements, sont enclins à dire que le prix à payer pour faire un peu plus de justice et un peu plus de solidarité a été fort élevé. Les figures prophétiques, malgré leur courage et leur intensité, ne sont parvenues que partiellement à amener les puissants (que ce soit dans l’ordre économique ou dans l’ordre politique) à modifier leurs façons de faire. C’est dire que Dieu est loin de toujours sortir vainqueur de ces luttes qu’ont menées et que mènent présentement ses fidèles serviteurs et servantes. Comme le reconnaissait saint Paul (cf. I Co 1, 23-25), Dieu apparaît alors comme faible dans l’affrontement avec les forces du mal. Et pourtant, la lumière de la Vie n’a jamais cessé de se manifester au cœur des ténèbres. L’espérance s’est régulièrement ravivée grâce à des figures comme celles de Jérémie, de Jean-Baptiste, de Mgr Romero, des missionnaires catholiques américaines. En d’autres mots, Dieu n’a jamais cessé d’être à l’œuvre en comptant sur des prophètes, petits et grands, qu’Il a fait lever, génération après génération, pour que la lumière du salut soit présente à l’horizon. Puissions-nous en rendre grâce à Dieu!

Fr. Jean-Louis Larochelle, O.P.

 

PRIÈRE

Tu as voulu, Seigneur Dieu,
que le bienheureux Jean Baptiste
soit le Précurseur de ton Fils
dans sa naissance et dans sa mort ;
il a donné sa vie pour la justice et la vérité :
accorde-nous de savoir, comme lui,
lutter avec courage pour confesser ta Parole.
Par Jésus Christ, ton Fils, notre Seigneur et notre Dieu,
qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.
∞ Amen.