Prédication, 2e dimanche de l’Avent A

7 décembre 2025

Le Royaume des Cieux est tout proche !

En ce deuxième dimanche de l’Avent, le frère Daniel Cadrin, O.P., nous parle en profondeur du prophète Jean le Baptiste qui a inspiré le Christ et l’a précédé dans l’annonce du Royaume de Dieu bientôt à venir, réveillant pour lui le peuple endormi dans l’attente.

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Prédication

En ce 2ème dimanche de l’Avent, Isaïe nous annonce un Messie à venir, qui sera sage et juste. Et une ère nouvelle de paix, où le loup et l’agneau, le veau et le lionceau, l’enfant et la vipère vivront dans l’harmonie. Un rêve célèbre, comme celui de Martin Luther King. En contraste, Matthieu nous présente un prophète vigoureux : Jean le Baptiste. Il dérange, il provoque, il ne suscite pas la paix et l’harmonie! Mais son travail, c’est justement de préparer cette belle ère messianique. Et cela demande de faire du ménage, de nettoyer le terrain.

Jean le Baptiste est une figure majeure pour nous les chrétiens. Il a initié un mouvement religieux qui a marqué nos origines. Matthieu présente ici son style de vie et de costume, typique du prophétisme, ainsi que le cœur de son message : un appel à la conversion, lié à la venue imminente du Jugement de Dieu et de son Messie. Jean invite les gens à changer leurs vies et à exprimer cet engagement en se faisant baptiser. Pour lui, il ne suffit pas d’appartenir au peuple de Dieu, d’être enfant d’Abraham, ou de faire les rituels prévus. La conversion vient toucher le cœur des personnes et elle porte des fruits de justice.

Prophète radical, il critique vivement les puissances politiques et religieuses, mais il accueille à sa suite les gens de toutes classes et origines, qu’ils soient publicains, pharisiens, prostituées, étrangers, soldats : l’égalité est dans la réponse à l’appel du Royaume, dans l’engagement à changer de vie. Richesse et pouvoir ne l’impressionnent pas. II fascine même ceux qui s’opposent à lui et qui plus tard l’élimineront.

Jean le Baptiste va marquer profondément Jésus, dont la première démarche fut de le suivre, d’être baptisé par lui, et dont les premiers disciples venaient du mouvement de Jean Baptiste. Et en ses débuts, Jésus reprend plusieurs traits du Baptiste : l’annonce du Règne de Dieu, l’appel à la conversion, l’ouverture à tous, le rite de baptême, … Avec le temps, les différences vont s’accentuer, autour des signes du Règne et de la miséricorde, mais Jean a laissé sa marque. Et Jésus finira comme lui, éliminé par les pouvoirs politiques.

Jean s’attend à ce que le Messie qui doit venir agisse avec puissance et fracas. Le grand ménage s’en vient. Jean ne se perd pas dans les nuances. Attention, ça va chauffer, comme un feu qui purifie. Le temps des mensonges et de la corruption arrive à sa fin. Aux gens qui désespéraient d’un changement, il annonce un revirement de situations, qui leur redonne espérance.

La figure de Jean Baptiste est importante aussi dans la tradition canadienne française et québécoise, dont il est le saint patron. Mais elle est bien différente du personnage biblique et elle a connu des soubresauts. Jean a été présenté comme un enfant frisé et gentil, avec ses moutons, et qui avait l’air d’un mouton plus que d’un pasteur! Ou comme un faire-valoir de Jésus, simple figurant faisant ressortir le personnage central. Et maintenant, même si sa fête du 24 juin est devenue la fête nationale, il est ignoré. Un enfant, une ombre, un inconnu. Voilà notre patron!

Pourtant, Jean le Baptiste est l’une des figures les plus fortes de la Bible, tant dans ses grandeurs que dans ses faiblesses. Homme de parole, homme de la Parole, il annonce le salut et appelle à la conversion. D’ailleurs, comme au premier siècle, il a toujours des disciples aujourd’hui, pour qui c’est lui l’Envoyé de Dieu, et non Jésus. Ce sont les Mandéens, groupe religieux centré sur des rites baptismaux, pacifiste et souvent harcelé au Proche-Orient.

Jean le Baptiste vient aujourd’hui nous déranger un peu. Peut-être sa vigueur effraie-telle nos spiritualités toutes intérieures et confortables ou risque-t-elle de mettre en désordre nos petits mondes bien ordonnés, où tout doit être tranquille et plaisant ? En ce temps d’Avent, d’attente et d’avènement, voici une figure dérangeante, réveillante, qui vient nous sortir de nos habitudes et de notre indifférence, et qui ouvre une espérance. Et si nous laissions sa voix, qui vient de nos origines et du plus profond de nous, nous toucher quelque part, là où notre cœur est froid et notre tête confuse, là où nous sommes engourdis dans le facilité de nos sécurités. Et si nous laissions sa voix préparer un chemin en nous.

Pourquoi? Parce que le Royaume des cieux est tout proche. Et sa préparation requiert des changements. Pour qu’un jour le léopard et le chevreau, la vache et l’ours, le nourrisson et le cobra, puissent cohabiter, dans la paix et l’harmonie. Amen.

Fr. Daniel Cadrin, O.P.

 

PRIÈRE

Dieu de puissance et de miséricorde,
ne laisse pas le souci de nos tâches présentes
entraver la marche de ceux qui se hâtent
à la rencontre de ton Fils ;
mais forme-nous à la sagesse d’en-haut,
qui nous fait entrer en communion avec lui.
Lui qui vit et règne avec toi
dans l’unité du Saint-Esprit,
Dieu, pour les siècles des siècles.

∞ Amen.